Civilisation

Tangueada
Le 12 décembre 2024 dans le cadre élégant et intime de l’Ambassade d’Argentine se tenait la première représentation de Tangueada, un concert séducteur où s’exprime toute l’âme du tango argentin.
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Avec Le censeur, Alexandre Tremblay nous immerge dans un Canada en pleine dictature woke, s’appuyant sur une bureaucratie kaflkaïenne. Autant dire que ce conte orwellien ne relève presque pas de la science-fiction, et s’apparente plutôt à un futur proche, trop proche.
Le héros-narrateur de cette histoire est un universitaire réactionnaire fan de Michel Houellebecq. Un être réactionnaire étant tout simplement un être pourvu de bon sens et n’ayant pas renoncé à utiliser l’intelligence face au camp du bien autoproclamé. L’origine de sa réaction puise d’abord dans les rapports hommes-femmes devenus impossibles. Peu importe ce qui conduit à se réveiller du moment que l’on se réveille réellement de cette torpeur du politiquement correct.
Mais l’intelligence nous promet l’épée, en user est se mettre en situation d’essuyer attaques sur attaques. C’est tellement plus confortable de prendre sa dose quotidienne de poison idéologique, on devient vite accro, l’être pensant est vite remplacé par l’être pensé par l’idéologie et « Il n’y a pas de vaccin contre d’idéologie. » La conséquence est que « Des gens normaux et en apparence modéré se transforment rapidement en monstres de la délation en un claquement de doigts. »
Passé entre les fourches caudines de la dictature en proposant une approche intersectionnelle de Houellebecq dans sa thèse, le héros s’aperçoit vite que cette concession ne suffira pas pour se faire une place sociale. Son être biologique fait de toute façon obstacle. Un homme blanc hétérosexuel est voué, dans notre époque, à une mort sociale prématurée : « je me destine à une vie d’amertume et de jalousie ».
Puisque le héros est fan de Houellebecq, il consent à imiter le héros de Soumission et à totalement baisser les armes et à se faire collabo. Il devient censeur d’État des livres devant être publiés en occupant le poste de reviseurice-corecteurice. « La seule personne que je risque de décevoir en acceptant ce poste, c’est moi. » La référence pour bien faire son travail de censeur : Un livre pour tout.es. Notre héros rejoint les douze apôtres de l’inclusion et se vautre dans le révisionnisme linguistique revanchard. Les censeurs sont tellement fiers de participer à cette grande œuvre ! « En attendant d’avoir le pouvoir de réécrire les histoires du passé, nous nous contenterons d’épurer les récits de l’avenir. »
Le héros, toujours lecteur de Houellebecq, toujours réac, se maintient à distance, au balcon de lui-même et un surplomb des gardiens de la révolution culturelle canadienne. Il note l’absence totale d’humour de ces gens-là, on pourrait prolonger en parlant d’absence totale d’esprit. Il nourrit de vagues projets de sabotage en agissant avec zèle dans l’application des recommandations du livre pour tous.tes. Est-ce que cela suffira pour enrayer la machine ? En attendant la littérature miroir de Houellebecq console le héros grâce à la production de raisonnements (presque sans fin) qu’elle permet. Une leçon émerge : la vraie résistance se situe dans l’acte d’écrire. Le héros du livre croit voir en Houellebecq ce résistant.