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Codex laboris

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Codex laboris

J’avais suivi mon maître de stage, Guillaume, Conseiller d’État, jusqu’à l’Hôtel du Châtelet, rue de Grenelle. A peine une demi-heure après notre arrivée, un fonctionnaire légèrement voûté nous avait fait pénétrer dans les entrailles du ministère du travail. Sous sa direction, nous avions arpenté galeries et corridors jusqu’au bureau de Georges, le chef de bureau de la réglementation. Il était aveugle mais je n’osais attribuer son caractère taciturne à ce léger handicap car, d’une part, c’était interdit par la loi et, d’autre part, il y avait beaucoup de contre-exemples. Mon maître rappela le but de la mission que lui avait confiée le gouvernement : il fallait radicalement simplifier le droit du travail. À cet effet, il avait proposé le texte suivant au Premier ministre :

Art. 1er – Le code du travail est abrogé à compter du [Compléter].

Art. 2 – À compter de la date mentionnée à l’article 1er, Le code civil régit les relations de travail.

Son projet avait été refusé, mais l’idée générale avait séduit : il devait trouver une autre manière de parvenir sensiblement au même résultat. Il s’avéra rapidement que Georges n’avait pas les mêmes vues sur le sujet (si j’ose m’exprimer ainsi) :

« Le Code est le résultat d’une longue sédimentation, à raison d’une centaine de pages supplémentaires tous les ans, on ne le modifie pas comme ça. C’est très compliqué.
– C’est justement pour cela qu’il faut tout changer en une fois. Un contrat est un contrat. On verra plus tard s’il faut des ajustements. »

Ce dialogue de sourds (si j’ose m’exprimer ainsi) aurait pu durer longtemps mais Georges y mit brusquement fin et, saisissant sa canne blanche, nous invita à le suivre. Par une porte dérobée située derrière son bureau nous accédâmes à un escalier étroit et escarpé menant à une grande bibliothèque plongée dans la pénombre. Les murs étaient couverts de livres jusqu’au plafond. Derrière des pupitres faiblement éclairés, des fonctionnaires se tenaient debout, penchés sur des feuillets qu’ils corrigeaient à la plume d’oie.

« Regardez, voici le Code en pleine évolution. Mes légistes conçoivent ses modifications en fonction des demandes passées, présentes et futures des partenaires sociaux, des ministres, du Premier ministre, du Président, des professeurs de droit social et quelquefois des parlementaires. »

Georges nous guida jusqu’au centre de la pièce où un magnifique lutrin soutenait un gros ouvrage aux pages non assemblées.

« C’est le texte consolidé. Lorsque les nouvelles dispositions sont adoptées, on vient les recopier ici. »

Mon maître se pencha sur l’ouvrage avec le respect qu’éprouvent tous les collectionneurs de livres d’heures et d’incunables.

« Allez-y, Guillaume, admirez ce chef d’œuvre de plus près, feuilletez le Code… »

Le Conseiller enfila un gant à sa main droite et commença à tourner les pages. Au bruit, Georges avait compris la manœuvre de Guillaume. Tout en poursuivant son examen, ce dernier demanda avec une feinte indifférence :

« Les pages sont empoisonnées, n’est-ce-pas ?
– Comment l’avez-vous deviné ?
– 1000 pages et 1 million de chômeurs en 1990, 3500 pages et 3 millions de demandeurs d’emploi en 2016. Je veux bien qu’il y ait d’autres explications mais quand même, la plus simple est que ces pages soient empoisonnées. Cela expliquerait aussi que personne ne puisse toucher au code du travail sans graves conséquences. »

Il fallait être aveugle pour ne pas s’en apercevoir, pensais-je, mais je chassais immédiatement de mes pensées ce dicton aussi illégal que déplacé.

Georges poussa un cri de rage et renversa le lutrin, ce qui précipita les pages sur le sol. S’agenouillant, il craqua une allumette mais le papier ne prit pas feu. Il essaya à nouveau, voulant absolument détruire les preuves du forfait, toujours sans succès. L’un de ses clercs vint à lui et l’aida à se relever.

« Ça ne brûlera pas, Monsieur. Le papier est ignifugé. Classé A2 à la suite de la dernière délibération du comité technique ministériel… »

In Memoriam Umberto Eco

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