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Hong Kong : le calme avant la tempête ?

En pleine crise sanitaire, le pari communiste chinois n’a pas renoncé à mettre au pas Hong-Kong. Les arrestations reprennent.

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Vendredi 17 avril à Hong-Kong : les rues sont calmes, les passants peu nombreux et masqués, les magasins et les restaurants sont ouverts. Les manifestants ont quitté les trottoirs depuis la pandémie du coronavirus. Samedi matin : la police aux ordres de Pékin procède à quatorze arrestations. Quatorze personnes, symboles de la lutte pour les libertés. Elle pénètre dans la maison du patron du journal d’opposition Apple Daily, Jimmy Lai, 72 ans, qui ne se trouvait pas chez lui. Prévenu de son arrestation, il y arrivera en milieu de journée. Au lieu de lui intimer l’ordre de se rendre au commissariat, la police tient à l’arrêter devant sa maison, entouré de 20 policiers, pour l’humilier. La photo servira de propagande. Deuxième personnage clé à être arrêté, Martin Lee, 81 ans, fondateur du Parti Démocratique de Hong-Kong, surnommé le « Père de la Démocratie ». Ils forment avec le Cardinal Zen, 88 ans , évêque émérite de Hong-Kong – qui n’a pas été inquiété – « la Sainte Trinité », surnommés ainsi affectueusement par leurs proches. Ce sont des vétérans, des pionniers, des piliers de l’opposition au régime communiste. Celui-ci a nommé le 4 janvier un dur, Luo Hining, au poste stratégique de directeur du « Bureau de liaison du gouvernement chinois à Hong-Kong ». Le 12 février, un très proche de Xi Jinping, Xia Baolong, a pris la tête du non moins stratégique « Bureau des affaires de Hong-Kong et Macao ». Il est connu pour avoir décapité en 2014 un millier d’églises du Zhejiang en déboulonnant leurs croix ou en rasant leurs clochers après la visite du nouveau maître de Pékin. Le 15 avril, la Chine célébrant une journée d’« Éducation à la Sécurité Nationale », un communiqué du Bureau de liaison faisait souffler un vent mauvais, affirmant qu’ « un haut degré d’autonomie ne signifiait pas une autonomie complète » et qu’une nouvelle législation sur la sécurité nationale devrait intervenir « dès que possible ». Les manifestations et les actions des leaders pro-démocrates sont illégales, commentait à l’unisson la N°1 du gouvernement, Carrie Lam, évoquant dans son discours la « sécurité sanitaire publique » avant même la « sécurité politique ». Se profile aux yeux des Hongkongais le spectre d’un nouvelle tentative de Pékin pour introduire l’Article 23 dans leur Constitution : un article qui sanctionnerait les activités qualifiées de subversives. En 2003, au cœur de la crise sanitaire du SRAS (Syndrome Respiratoire Aigu Sévère), Hong-Kong avait infligé une fin de non-recevoir au gouvernement qui entendait bâillonner la liberté d’expression ; la circulation des informations avait justement permis de limiter l’épidémie, « alors que de l’autre côté de la frontière on cherchait à cacher l’ampleur de la crise » écrivait déjà en 2014 Jean-Philippe Béja, directeur du CNRS à Hong-Kong ! Le 1er juillet 2003, 500.000 manifestants contraignaient le gouvernement à retirer son projet. Ces jours-ci, l’inquiétude grandit. Le lendemain de l’arrestation des quatorze activistes, relâchés depuis sous caution, les gens commencent à sortir dans les rues tout de noir vêtus, en signe de protestation silencieuse. Un signe de la reprise prochaine des manifestations ?

Article rédigé le 19 avril 2020

Légende photo : le patron d’Apple Daily arrêté devant sa maison à Hong-Kong : une photo qui sera exploitée par la propagande sur le continent chinois mais qui montre au reste du monde que la Chine est une dictature. © Vincent Yu, Associated Press.

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