Nous sommes en guerre a dit le Premier ministre. Dont acte !
Dans une guerre, il y a donc des perdants et des gagnants et, le soir d’une bataille, il importe de faire le point, ne serait-ce que sur les combats à venir. Mais encore faudrait-il désigner clairement l’adversaire !
Les perdants : « Nous vaincrons car nous sommes les plus morts » Philippe Murray
Hommage aux innocents victimes des terroristes : agents de police, employés de maintenance et clients du magasin de la porte de Vincennes. Ceux-là n’étaient pas des protagonistes de la guerre comme les journalistes de Charlie hebdo, bien qu’ils s’en défendent. La dérision est pourtant une arme dont il faut assumer les risques.
Aux rangs des perdants, les hommes politiques de droite, toute la droite qui s’est fourvoyée dans la « charlisation » des esprits. Cocus magnifiques et autres Charlie courant après la reconnaissance par les médias qui, ces jours là, ont fonctionné comme la grande caisse de résonnance de la manipulation. Le procès en canonisation étant ouvert : il fallait être à la procession ! A quand la panthéonisation des rédacteurs assassinés ? Qui ne voit que ce grand pathos est un simulacre de religion avec son clergé (les clercs précisément) et ses légions de (petits) inquisiteurs : qui n’est pas Charlie est hérétique. Même certains membres du showbiz s’en sont aperçus à leur détriment ! Les bûchers sont prêts pour les empêcheurs de s’affliger en rond avec les « mutins de panurge ». C’était l’heureuse formule du regretté Philippe Murray qui nous eut dépeint avec talent cette hystérie collective ou la « rebellitude » des rédacteurs de Charlie-Hebdo devint institutionnelle. Car enfin, tartuffes ou complètement décervelés, les Charlie n’ont-ils pas compris que, dans cette grande communion mimétique, il est une chose à laquelle ils renonçaient : à leur libre arbitre précisément, pour lequel ils étaient censés défiler. A propos des défilés militaires, Einstein affirmait que, pour les suivre, il n’est pas besoin d’un cerveau mais qu’il suffit d’une moelle épinière : il semble bien que ce fut le cas au cours de ces jours sombres pour l’indépendance d’esprit. Que l’on s’entende bien : si l’indignation était fondée, rien, en revanche, ne justifiait la grande messe en question organisée par ceux-là mêmes qui portent la responsabilité du drame. Si la prison avait été appliquée à la lettre pour les assassins, il n’y aurait pas eu de victimes et Hollande aurait été privé de sa récréation !
Néanmoins, si la République et son culte semblent avoir gagné dans l’affaire par la surabondance de la liturgie ejusdem farinae, il n’est pas tout à fait sûr que ladite République profite autant qu’on le pense de ces évènements.
Les naïfs s’imaginent ainsi que l’islamisme, par la manifestation de ses horreurs, n’en retirera que dégoût et discrédit dans l’opinion. Rien n’est moins sûr. Pour certains, le culte de « l’autre suprême » va continuer de fasciner, non seulement dans les banlieues, mais aussi dans la population française, et surtout dans sa jeunesse – Robin des Bois, le cow-boy ou même le guérillero sont djihadistes.
Des gagnants ou un gagnant ?
Alors, me direz-vous, Hollande et Valls, la gauche et les socialistes sont gagnants dans l’affaire, en témoigne leur remontée spectaculaire dans les sondages. Mais ce dont on crédite le président est beaucoup plus sa capacité à utiliser l’évènement à son profit que celle d’y avoir répondu en homme d’Etat. C’est de la tactique et pas de la stratégie. L’on peut, en effet, admirer la façon dont les hommes du pouvoir actuel ou passé, largement responsables de la politique d’immigration et de la politique judiciaire, ont su s’exonérer de cette même responsabilité. Ainsi en est-il de Hollande jouant les pères de la nation. Chapeau l’artiste ! Mais gare à la chute une fois l’opinion dégrisée…
Qui donc alors est le vrai gagnant dans cette affaire ? Pas l’islamisme, c’est entendu, mais… l’islam. Et il ne s’agit pas d’un amalgame ! Nous ne confondons pas extrémistes décervelés et fanatiques avec des gens qui veulent persévérer dans leur être comme musulmans. De fait, si amalgame il y a, c’est à l’islam qu’il profite. Demain, dans l’espace public, les musulmans seront de plus en plus visibles. Pas par les armes, mais par le voile et le ventre des femmes, les minarets, les produits hallal, les quartiers communautarisés… Souvenons-nous de la déclaration de l’actuel président de la Turquie : « Les minarets seront nos baïonnettes, les coupoles nos casques… ». Dans ces populations qui n’ont que faire de la république et de la laïcité, incompréhensibles pour elles, on n’est pas algérien, turc, tchétchène ou français. On est d’abord et avant tout musulman et si l’on est français par la loi, on votera musulman.
Tel est, en effet, l’argument de l’islam en France face aux autorités et à l’opinion : « Vous ne voulez pas du djihad, du terrorisme, il n’y a que nous pour l’éviter ! Il faudra donc nous accorder plus de droits, plus de visibilité dans l’espace de la République, plus de dérogations communautaires, plus de représentation, plus de crédits, l’islamophobie doit être considérée comme un délit etc. ». C’est pourquoi la République, on l’aura compris, déjà bien malmenée par ceux qui s’en réclament, entrera en décomposition. C’est pourquoi, malgré la réaffirmation du dogme républicain, la République devra être rangée au rang des victimes de ces évènements qui signent un peu plus sa décrépitude.
Quant aux musulmans qui souhaitent vraiment s’assimiler, ils sont à ranger eux aussi parmi les victimes de cette implacable logique. Car l’assimilation est une aventure personnelle et, dès lors qu’il s’agit d’assimilation de masse, la chose devient impossible. D’autant plus que l’observation des sociétés islamiques nous enseigne qu’elles sont des sociétés de surveillance mutuelle extrêmement efficaces.