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Les malheurs du petit Jules

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Les malheurs du petit Jules

Ah ! les « valeurs républicaines » dont on nous rebat les oreilles à longueur de débats télévisés ! Mais, au fait, pourquoi cette insistance sur ce concept qui semble aujourd’hui totalement privé de substance ?

Les Français ont été éliminés de la Coupe du monde de football en quart de finale. Nous avons une fausse grande équipe, qui gagne en 1998, puis ne franchit même pas les éliminatoires en 2002, se ridiculise en 2010, se fait battre en 2014, logiquement puisque, à la différence de la nôtre, les équipes d’Allemagne, du Brésil – pourtant humiliée cette année –, de l’Argentine, de l’Espagne ou de l’Italie sont de vraies grandes équipes. Nos compatriotes sont toujours inférieurs à leurs prétentions. Ils ressemblent à ces collégiens chétifs qui bombent le torse et se hissent sur la pointe des pieds pour égaler les grands. Il est loin le temps où la France donnait le ton à l’Europe par le raffinement de sa culture, sa force militaire, l’audace et l’habileté de sa diplomatie, et où les élites étrangères parlaient français. La France est devenue une puissance de second ordre celée dans le passé, à la peine dans le présent, sans prise sur l’avenir. Les peuples échangent en anglais, notre littérature ressortit au passé, comme les lettres grecques et latines, nos artistes sont noyés dans l’amalgame de l’art moderne, et nous sommes à la traîne aux plans scientifique et technique.

Étatisme débilitant

Notre modèle républicain prend eau de toutes parts. Notre système de protection sociale est grevé depuis quarante-cinq ans d’un déficit devenu abyssal nonobstant toutes les réformes visant à le résorber. La Sécurité Sociale ne protège plus seule – ce qui était sa raison d’être initiale – , et les mutuelles, qui se sont substituées à elle, sont elles aussi déficitaires. Notre taux de chômage reste incompressible, d’autant plus que notre politique sociale caractérisée par un étatisme débilitant, en empêche la résorption. Dès lors, la précarité s’installe, les salaires diminuent en valeur réelle et le niveau de vie de nos compatriotes baisse continûment. Notre modèle économique et social présente tous les défauts de celui de l’ancienne URSS : dirigisme, bureaucratie, blocages, impuissance, endettement, appauvrissement général. Institué en 1945, il n’a pu tenir que durant la période de croissance des Trente Glorieuses (1945-1973) et ne cesse de se déliter depuis la crise de 1973, l’émergence des pays concurrents du Tiers-Monde, la disparition de l’ordre monétaire issu de Bretton Woods et des règles commerciales du GATT, la mondialisation de l’économie.

L’utopie de la France républicaine

Cela, les Français le savent, tout en se refusant à l’admettre. Ils se réfugient dans le mythe d’une France mère des droits de l’homme, guidant les peuples vers la justice, l’égalité et le bien-être. Ce mythe en subsume un autre : celui d’une société étayée sur une école républicaine qui aurait accompli le tour de force de mettre à la portée de tous la plus aristocratique des cultures et d’assurer le succès du plus grand nombre aux études les plus élitistes, permettant ainsi « la réussite de tous les jeunes ». Utopie d’une société à la fois hédoniste et élitiste, individualiste et collectiviste, conciliant égalité et promotion personnelle, adonnée à la vulgarisation de masse d’une culture d’élite. La France de Louis XIV et de Louis XV aboutit à l’enchantement jack-langien de la démocratie. Nos compatriotes s’accrochent d’autant plus à cette illusion que, précisément, ils savent qu’elle n’est qu’un opium du peuple et, dans ses manifestations concrètes, une fantasmagorie. Celle-ci, mise en scène par les pouvoirs publics, tient d’une propagande qui s’efforce de dissiper les doutes des Français à l’égard de leur pays, lequel est peut-être un modèle typologique (un pattern), mais sûrement pas un modèle au sens d’exemple à imiter. Ainsi, nous vivons à l’heure des célébrations – sous forme de commémorations, films, émissions télévisées, spectacles et festivals – des grands moments et grands hommes fondateurs de notre démocratie : la Révolution française, l’institution du suffrage universel, l’abolition de l’esclavage, la fondation de l’école primaire ferryste, la loi de séparation de l’église et de l’état, Gambetta, Jules Ferry, Jean Jaurès, les luttes sociales d’antan, de Gaulle, etc… On se réfère à la République à tout bout de champ. Les républicains de la fin du XIXe siècle le faisaient parce qu’elle était menacée par des ennemis encore puissants ; notre classe politique actuelle le fait parce qu’elle en perçoit le délitement. Avant 1981, les socialistes n’évoquaient jamais la République, la jugeant surannée et « bourgeoise » car s’accommodant des inégalités. Seul le socialisme permettrait de lui faire tenir ses promesses d’égalité. La droite modérée, elle non plus ne se référait guère à la République.

On lutte contre la « morisité ambiante »

Mais voilà : le « socialisme à la française » (slogan des socialistes au début des années Mitterrand) a échoué ; la droite qui, elle, fondait son crédit sur la prospérité des années 60, s’est trouvée embarrassée après la fin de celle-ci. L’une et l’autre privées de raison d’être, se sont rabattues sur l’exaltation de l’idéal républicain, le seul encore consensuel, leur semble-t-il. Tous rivalisent de républicanisme, à commencer par le PS, qui devrait s’intituler « parti républicain ». On s’efforce de ranimer la foi vacillante, on lutte contre la « morosité » ambiante. On mobilise les médias à cette fin. Il y a peu de temps, France 2 diffusait, après le JT de 20 h, une courte émission, « Mon parcours gagnant », présentant chaque jour l’itinéraire d’un Français ou d’une Française méritant(e) ayant réussi, afin de nous donner des raisons de ne pas désespérer de notre pays et de soi-même. On ne sait plus que faire pour conjurer le mauvais sort. « Jules », ce prénom longtemps considéré comme désuet, revient en force et serait devenu, depuis quelques années, le troisième prénom choisi par les jeunes parents pour leur garçon nouveau-né. Et de fait, dans les crèches et les écoles, on trouve de plus en plus de petits Jules… comme Jules Ferry. Vaine nostalgie de la IIIe République. Les petits bourgeois radicaux veulent leurs aises tout en étant le phare de l’humanité, les champions du monde. Les Français aimeraient retrouver l’école ferryste avec ses maîtres en blouse et ses préaux, la hiérarchie sociale simple d’antan, la stabilité des situations, l’illusion d’un progrès indéfini sous la direction d’un état jacobin protecteur (comme dirait Marine), le crédit facile et le pouvoir d’achat des années 60 et 70. Ils invoquent les grands ancêtres et les grands moments du passé pour le faire revenir. Ils évoquent ces peuples primitifs d’autrefois qui, confrontés à un péril mortel, s’abîmaient dans la prière et l’exécution de danses sacrées et de processions rituelles. Et comme eux, ils ne se sauveront jamais ainsi.

Le monde de la fin du XIXe siècle et des trois premiers quarts du XXe siècle s’accordait à peu près à celui de la IIIe République ; le monde actuel ne s’accommode pas de notre actuel ordre républicain. Les petits Jules n’ont pas de chance.

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