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En Afrique, la lutte contre l’homosexualité est devenue un enjeu majeur

L’Ouganda est le dernier pays d’Afrique de l’Est à avoir renforcé drastiquement son arsenal juridique contre la communauté LGBTQIA+. Depuis deux décennies, la majeure partie du continent africain a fait de la lutte contre l’homosexualité un enjeu majeur. Pour beaucoup d’Africains, cette « maladie de blancs » est incompatible avec leurs traditions.

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En Afrique, la lutte contre l’homosexualité est devenue un enjeu majeur

En dépit d’une forte pression internationale, le président ougandais Yoweri Museveni a signé en mai 2023 le décret d’application de la nouvelle loi anti-homosexuelle, votée « en un temps record » par le Parlement. Dans un pays qui possède déjà un arsenal juridique draconien contre la communauté LGBTQIA+, le renforcement de la loi prévoit désormais de lourdes peines de prison pour toutes personnes reconnues coupables d’homosexualité ou pour toute association qui ferait la promotion de cette identité sexuelle qualifiée de « déviante » par l’ancien rebelle qui dirige cette république de l’Afrique de l’Est depuis 1986. Ce cas est loin d’être unique en Afrique où le continent a fait de la lutte contre la théorie des genres et l’homosexualité un enjeu majeur, sur fond de nationalisme et d’afrocentrisme. Soutenus par des mouvements intégristes religieux (comme le « Front islamique pour la défense des valeurs éthiques » au Sénégal ,par exemple), une église qui n’hésite pas à dénoncer l’homosexualité, une presse racoleuse qui affiche sans complexe les visages des personnes accusées d’être inverties, les dirigeants africains versent dans la surenchère quand il s’agit de réprimer « cette maladie de blancs, incompatible avec leurs traditions » comme le rapporte Michel Bourrelly qui a consacré un livre sur ce thème intitulé L’homosexualité n’existe pas en Afrique.

En Afrique, il n’est pas rare que les homosexuels soient dénoncés par un proche ou même un membre de leur famille. Les personnes de la communauté LGBTQIA+ qui souhaitent vivre au grand jour leurs préférences sexuelles ont en permanence une épée de Damoclès au-dessus de leur tête : elles peuvent être pourchassées, emprisonnées, torturées voire assassinées, comme le mannequin, et designer kenyan Edwin Chiloba en janvier 2023. Les lesbiennes n’échappent pas à la règle et sont violées collectivement « afin de les guérir ». Les lois répressives trouvent la plupart du temps leur origine dans l’héritage colonial de l’Afrique… qui est pourtant aussi accusé d’avoir introduit cette pratique sur le continent. Ainsi, se basant sur une ordonnance française du régime de Vichy, datée de juin 1942, le code pénal sénégalais punit de cinq ans d’emprisonnement et d’une forte amende quiconque est pris en flagrant délit « d’acte impudique ou contre nature avec un individu de son sexe ». Interrogé sur la multiplication des cas de discriminations envers les homosexuels dans son pays, le président sénégalais Macky Sall a rappelé que les « lois de son pays obéissent à des normes qui sont le condensé de leurs valeurs de culture et de civilisation » (février 2020). Récusant toute homophobie de la part de ses compatriotes, il s’est dit agacé par ceux qui essayent de « transférer leurs problèmes de société ailleurs ». « Ce ne sont pas les organisations des droits de l’homme qui gouvernent mon pays […]. Au nom de quoi, l’homosexualité dépénalisée doit être une loi universelle ? Tous les pays n’ont pas la même culture et la même histoire, les gens doivent le comprendre » a rappelé le président du Sénégal, confirmant qu’il n’était pas question qu’une marche des Fiertés soit organisée dans cette partie de l’Afrique de l’Ouest pas plus que l’Assemblée nationale n’avait à légiférer sur le mariage pour tous.

« Dépravation importée de l’Occident »

Des propos qui font écho à ceux que l’on peut entendre de la bouche d’autres dirigeants depuis des décennies. Dans les années 1990, au moment où l’Afrique du Sud prenait le contre-pied de ses pairs en adoptant une série de lois largement favorables à la communauté LGBTQIA+, les présidents namibien (Sam Nujoma) et zimbabwéen (Robert Mugabe) de l’époque avaient publiquement condamné cette « dépravation importée de l’Occident ». En 2008, se targuant de pouvoir guérir les personnes infectées par le HIV avec une potion de son cru, le président gambien Yayah Jammeh (depuis renversé par un putsch) a excellé dans les propos homophobes. En mars 2008, il a appelé tous les homosexuels à quitter le pays, récidivant sept ans plus tard en menaçant d’égorger tous ceux qui prônaient le mariage entre personnes de même sexe et de mettre en place des lois anti-homosexuelles « plus dures qu’en Iran ». Au Ghana, où la législation anti-homosexuelle est tout aussi drastique qu’en Ouganda, le ministre Paul Evans Aidoo a simplement ordonné en 2011 que tous les homosexuels de l’ouest du pays soient rassemblés et arrêtés, réclamant que les propriétaires et leurs locataires informent l’administration compétente sur les personnes qu’ils soupçonnaient d’être homosexuelles. En 2018, soutenu activement par l’Église presbytérienne locale, le président Akufo-Addo a clairement affirmé que son pays ne céderait pas aux lobbys européens et ne décriminaliserait pas l’homosexualité, invoquant les propos d’un de ses prédécesseurs qui avait tenu tête au Premier ministre britannique David Cameron qui le menaçait de couper toute aide financière du Royaume-Uni si l’ancienne Gold Cast ne montrait pas plus de respect envers les droits des LGBTQIA+. Si toute l’Afrique du Nord interdit catégoriquement toutes relations entre personnes de même sexe, les douze états du nord du Nigeria appliquent la charia avec au choix, pour les homosexuels, la lapidation, les coups de fouets ou de longues peines de prison, sous couvert d’une loi anti-homosexuelle également renforcée, il y a peu, dans cette république fédérale. Sns parler de Zanzibar où les relations entre personnes de même sexe sont simplement interdite depuis …1864. Un couple de touristes français en a récemment fait les frais et a été expulsé manu militari de l’île.

Mais l’Afrique se voile la face sur l’homosexualité. Malgré ce qu’affirment les dirigeants africains, cette pratique sexuelle y a toujours été présente sur le continent originel de l’Homme. On la trouve au Congo, en Angola, à Zanzibar, au Cameroun… Certaines ethnies ont intégré l’homosexualité comme concept culturel. Parfois, il s’agit même de rites initiatiques, de harems masculins, existants au sein de certaines monarchies, bien loin du concept de l’Africain viriliste par excellence prôné par les opposants locaux au lobby homosexuel. Mais les partisans des droits LGBTQIA+, qui ont pourtant pignon sur rue, ne cessent de se heurter au poids du traditionalisme, très présent dans la société africaine, et à l’affirmation de plus en plus nette d’une indépendance politique totale vis-à-vis de l’Occident.

 

Illustration : À Westminster, les Anglais vertueux exigent que les Africains du Commonwealth (dont fait partie le Ghana) adoptent leurs conceptions sociétales, hors de toute pensée colonialiste, bien sûr.

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