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Trèbes une Pâque française

Après les sinistres événements de Trèbes il semble que la France fasse enfin son «  passage » vers la sortie de l’enfermement dans le déni de réalité. Il est encore trop tôt pour en juger pleinement, mais la lucidité semble avoir gagné certains politiques, parmi eux, Macron et Mélenchon dont nous devons reconnaître qu’ils nous ont surpris. Reste que la lucidité n’est pas encore la chose la mieux partagée. En témoigne les propos de la classe jacassante ; une longue traversée du désert est encore prévisible dans la désignation de l’ennemi, dans le choix ambigu de la défense de la république ou de la France et le moment historique, le kairos provoqué par cette mort exemplaire.

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Trèbes une Pâque française

Quand la lucidité vient aux hommes politiques.

« Soudain se levèrent obscurément dans l’esprit de tous les Français les ombres chevaleresques des cavaliers de Reims et de Patay, des héros anonymes de Verdun et des Justes, des compagnons de Jeanne et de ceux de Kieffer ». On voudrait que ce discours se rappelle à lui sans cesse lorsqu’il voudra toujours  « en même temps », cette Europe de Bruxelles qui n’a ni chair ni sang et qui a tout fait pour arracher ses peuples à leur identité en pleine contradiction avec son discours.

Acceptons en l’augure et écoutons Mélenchon ; personne ne pourra ici nous soupçonner de sympathie pour le personnage et ses idées, mais le voilà qui, en plein parlement nous fait du René Girard ; « Alors que le pire était en place, (…) le mal a été vaincu, parce que la scène a été inversée », a déclamé le député de la France insoumise. « Le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame a remis le monde humain en ordre », poursuit-il en rendant hommage au gendarme tué après avoir pris la place d’une otage civile. Cette phrase est toute empreinte de la logique sacrificielle telle que Girard l’exposa ; l’ancien prof de philosophie s’est ici souvenu de son premier métier. La suite du discours est tout aussi marquée de pensée sacrificielle et… chrétienne : « Il a assumé la primauté d’un altruisme absolu: celui qui prend pour soi la mort possible de l’autre, » la chute est plus humaniste avec un rappel à Malraux auquel il n’a pas pu ne pas penser : « illustrant ainsi les valeurs de foi et de philosophie auxquelles il était attaché personellement.En ce sens, le lieutenant-colonel Beltrame est un héros de la condition humaine ». On ne peut pas croire qu’il n’y ait là que de l’affectation et le peuple français devra s’en souvenir. Mais, pour la première fois, sont clairement confrontés la haine meurtrière de l’islamisme et l’amour du prochain du christianisme.

Nommer l’ennemi 

Macron, encore lui, a progressé là encore dans cette nécessité politique de désigner l’ennemi. S’est-il rappelé que celui-ci, de toute façon, avait depuis longtemps désigné la France ? Le président français a également associé la figure de l’octogénaire juive Mireille Knoll, assassinée à Paris, à l’hommage à Arnaud Beltrame, estimant qu’elle avait été victime du même « obscurantisme… une femme innocente et vulnérable (assassinée) parce qu’elle était juive et cette barbarie ainsi a profané nos valeurs sacrées et notre mémoire. » Il dénonce l’islamisme (et non le seul salafisme) ce qui est déjà transgressif. En revanche dans le cas du meurtre de Mireille Knoll la presse s’en tient à l’antisémitisme, procédé utile qui évite de mentionner l’origine islamique des meurtriers. Tout comme lors de l’assassinat du lieutenant-colonel Beltrame les journaux télévisés parlent de coups de couteaux dans le cou, feignant, avec une singulière hypocrisie, d’ignorer la réalité de l’égorgement rituel propre à l’islam. De la sorte le lien entre islam et islamisme devient de plus en plus visible et pose le problème du caractère inassimilable de cette religion en l’état. En voici un exemple frappant. Quelques jours avant l’attentat de Trèbes un chef de service musulman d’un grand CHU de province et membre du conseil municipal (droite) de la dite ville a démissionné et dans une lettre au Monde déclare ne plus vouloir se taire sur le sort (malheureux) des musulmans en France, prenant au passage la défense de Tariq Ramadan, et illustrant, en dépit de son degré élevé d’éducation et «  d’intégration », qu’il avait choisi son camp.

Ecoutons encore le président Macron :

« Nous l’emporterons grâce au calme et à la résilience des Français, peuple rompu aux morsures de l’histoire, comme si souvent, l’a montré notre longue et belle histoire […] Nous l’emporterons par la cohésion d’une nation rassemblée. »

Résilience peut-être, jusqu’à présent elle se manifesta par des fleurs, des bougies et des marches blanches. A ce stade, ce n’est pas de la résilience mais de la soumission. Le président ignore-t-il l’existence d’un arsenal juridique organisant la répression, avec l’aide des juges, contre toute voix discordante, déclarée logiquement islamophobe (on le serait à moins) ainsi que l’a montré le procès contre Georges Bensoussan l’auteur des Territoires perdus de la République (2006), et surtout Juif en pays Musulmans en (Taillandier, 2012) qui lui valut sa mise en examen ?

La République ou la France ?

La question est donc la suivante : la classe politique une fois encore ne se réjouit-elle pas à bon compte ? Ouf ! La République est sauvée, le consensus est rétabli, le sang des fils de France sert à cela, le “vivre-ensemble” est restauré au prix du “mourir-seul”, comme en 1914 ! L’on pense à la thèse de Jean de Viguerie : il existe bien deux patries. L’une est la terre des pères, le pays de naissance et d’éducation. Cette patrie a toujours existé. L’autre est récente. La première est la France. La seconde n’est pas la France, mais la France est son support et son instrument (Jean de Viguerie, Les deux Patries, Ed DMM). Pour l’heure l’hommage rendu au lieutenant-colonel Beltrame va servir le locataire de l’Elysée ; comme Hollande après Charlie, il verra sa cote remonter, l’ordre républicain règnera… Côté cohésion nationale, il faudra repasser, l’exclusion de Mélenchon et Le Pen de la Marche blanche pour Mireille Knoll en témoigne.

Le Kairos pour Macron et pour la France ?

Il se dit qu’il y aura un avant et un après “Trèbes” dans le mandat de Macron. C’est en effet vrai : jusqu’à présent celui-ci était demeuré assez flou sur l’islam. L’impératif majeur est pour lui de dissiper toute ambiguïté par des mesures radicales, d’arrêter l’immigration, ce qui l’obligerait à transgresser Schengen et ses propres tropismes européens, puis d’organiser le désenclavement des « quartiers » par d’autres moyens que sociaux. Surtout, désormais l’antiracisme a épuisé ses effets et sa modalité « islamophobe » ne pourra plus fonctionner. S’il veut vraiment agir, alors il sera, lui aussi, « islamophobe ». La question est maintenant de savoir de quel côté il entend se situer. 100% des terroristes ayant frappé la France sont musulmans, étude inédite de l’IFRI portant sur 137 terroristes : 74% de naissance, 26% convertis, 69% sont français, mais 59% des parents originaires du Maghreb ; 40% ont été déjà condamnés, 12% signalés, 48% casier judiciaire vierge ; âge moyen : 26 ans ; 58% au chômage ; 40% sont issus de quartiers défavorisés (source : France 2, 28 mars 2018).

Ce moment décisif, ce Kairos, s’il ne le saisit pas hic et nunc, il laisse passer l’ultime chance d’éviter le pire. Et, puisqu’il veut entrer dans l’histoire, des voies inédites s’offrent à lui aujourd’hui qui n’étaient pas, certes celles qu’il envisageait. Il se doit de les suivre, lui le chef de l’Etat français. Le peuple français a ressenti cette mort jusque dans les tréfonds de son âme : il faut que cette mort ne soit pas vaine.

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