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LACTALIS : l’arbre qui cache la forêt

La question est d’ordre plus général. La course à la baisse systématique des prix et, en même temps, au profit maximum entraîne une mécanique impitoyable sur laquelle la société civilisée sera bien obligée de revenir.

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LACTALIS : l’arbre qui cache la forêt

La société Lactalis qui occupe une place de choix dans les titres des médias depuis plus d’un an maintenant (prix du lait, pénurie de beurre, lait pour nourrisson contaminé, etc.) a-t-elle vraiment un comportement scandaleusement déviant ou n’est-elle que l’arbre qui cache la forêt des dérives de l’agro-alimentaire et du commerce mondial… au risque d’en devenir le bouc émissaire ?

Si le grand-père d’Emmanuel Besnier était un fromager dont la qualité des produits a toujours eu une excellente réputation, son père avait choisi de développer considérablement l’entreprise. Depuis qu’il est aux commandes, et compte tenu de l’évolution du monde économique – en particulier la libre circulation des biens, des services, des hommes et des capitaux imposée par l’Union européenne à la suite de l’Organisation mondiale du commerce –, le petit-fils du fondateur a transformé l’entreprise en un groupe multinational pour qu’il devienne « too big to fail », comme on dit aujourd’hui. Présent dans la plupart des pays du monde, le groupe Lactalis est ainsi devenu le premier groupe fromager du monde. Mais en devenant ainsi le plus gros arbre de cette forêt il est aussi devenu celui vers qui tout le monde regarde. Il ne faudrait pas qu’en l’isolant du reste du marché on pense que sa conduite constitue une exception alors qu’il n’est que la manifestation de ce que visent toutes les multinationales et de ce que permet le système mis en place par nos gouvernements successifs, dans le cadre international construit sous l’égide des Anglo-saxons.

Lactalis et l’application du principe de précaution

Depuis le début de l’année 2018, les médias se font l’écho d’un scandale de « santé public » dans lequel Lactalis est désignée comme coupable. Dans une émission présentée à la télévision le 16 janvier 2018, la journaliste qui interrogeait le directeur de la communication du groupe, exigeait grossièrement qu’il explique quelle « faute, négligence ou défaillance » il fallait lui reprocher. Elle savait jouer sur du velours puisque ce qui était en cause, c’est la santé des nourrissons. On comprend bien que, dans cet article, il n’est pas question de rechercher une quelconque responsabilité dans une affaire particulière. C’est à la justice qu’il appartiendra de trancher quand elle sera en possession de tous les éléments pour.

Mais qu’est-ce qui permettait à la journaliste une telle attitude ? Fin décembre, une analyse du lait pour nourrisson produit dans l’usine de Craon y avait décelé la présence de salmonelles. Trente-cinq nourrissons – dont trente et un avaient consommé de ce lait – avaient été atteints de salmonellose. Principe de précaution oblige, on fit rappeler toutes les boites de lait produites depuis début décembre, puisque l’analyse officielle précédente n’avait rien décelé. Puis on apprit que les analyses réalisées en interne par le groupe avaient décelé quelques salmonelles, « dans l’environnement », en août et octobre. Mais rien dans le lait. Le ministre imposa alors le rapatriement des millions de boites non consommées produites depuis février 2017 et diffusées dans 83 pays !

Puis on chercha la cause. On n’a, au jour où cet article est rédigé, rien trouvé dans le processus de production. On a alors incriminé l’ensilage du maïs servant à l’alimentation du bétail des éleveurs fournissant l’usine. Mais, outre qu’ils auraient été les seuls contaminés alors que de très nombreux autres producteurs de lait procèdent de la même façon, on n’a rien trouvé. On a ensuite imaginé qu’un membre du personnel aurait pu être porteur de la bactérie, sans en être lui-même affecté et on a alors procédé à des analyses de selles … ce qui ne correspondait pas à grand-chose puisqu’une personne bien portante qui attrape des salmonelles les élimine en général en une quinzaine de jours ! Quant aux milliers de personnes habituellement infestées par des salmonelles, elles les contractent principalement auprès de leurs animaux domestiques.

On n’a pas manqué de rappeler que cette usine avait déjà été infectée au début des années 2000 avant même qu’elle ne soit rachetée par le groupe Lactalis … mais on a oublié de dire que la coopérative néo-zélandaise qui alimente la plupart des concurrents de Lactalis avait connu une infection beaucoup plus importante en 2013. En attendant, l’usine de Craon est à l’arrêt, le personnel au chômage technique, les éleveurs laitiers inquiets pour leur avenir sans que l’on ne soit vraiment sûr que les nourrissons soient à l’abri de toute contamination tant les sources sont nombreuses.

Lactalis et l’inégalité devant la loi

Ce scandale, médiatiquement entretenu, a permis de mettre le groupe Lactalis sous les feux des projecteurs et de révéler ainsi d’autres aspects du système économico-politique du pays.

Lorsqu’ils ont hérité du Groupe Lactalis, Emmanuel Besnier, son frère et sa sœur n’avaient pas les moyens de régler les droits de succession, sauf à vendre (à quelque fond de pension ?) les parts sociales représentant le capital et de perdre la direction du groupe. Ils ont donc négocié avec l’État l’étalement dans le temps, en fonction des bénéfices futurs attendus du groupe, le paiement de ces droits de succession … ce qui n’est pas donné à tout le monde !

Mais ce n’est pas tout. On a aussi appris que le groupe ne déposait pas ses comptes annuels au tribunal de commerce comme la loi l’y oblige, et que le président préférait payer l’amende normalement exigible que de les déposer. Mais comme le montant de l’amende est calculée en fonction des comptes précédemment déposés et que le groupe ne les a jamais déposés, on se demande bien comment est calculé le montant de cette amende.

On peut d’ailleurs se demander pourquoi il en est ainsi. Et si cela avait pour but de ne pas publier le montant de l’endettement du groupe ? Car, si la famille Besnier n’avait pas les moyens de régler les droits de succession, on peut se poser la question de savoir comment ils ont financé les diverses opérations de croissance externe réalisées depuis … sans diluer le capital. Seuls des crédits importants semblent pouvoir l’expliquer. Mais alors qu’elle est la valeur mathématique nette de la part sociale du groupe Lactalis et quelle est la fortune réelle des divers membres de la famille Besnier ? Et ces opérations de croissance externe n’ont-elles pas été réalisées – du moins certaines d’entre elles – parce que les familles des fromageries absorbées ne pouvaient pas régler les droits de succession ?

Où est donc l’égalité devant la loi ?

Lactalis et l’égarement des consommateurs

Mais, il est une autre leçon à tirer de cette affaire. C’est tout ce qui résulte de l’immense et incompréhensible règlementation qui est censée permettre aux consommateurs de se décider en connaissance de cause. Deux éléments pour bien comprendre.

Comme d’autres producteurs, Lactalis a renoncé pour nombre de ses camemberts à l’appellation d’origine protégée. C’est-à-dire que l’on vend désormais, sous ce nom, d’une part des fromages au lait cru fabriqués à partir du lait de vaches normandes nourries sur les verdoyants pâturages normands et des fromages élaborés à partir de lait thermisé ou pasteurisé produits par des vaches de la race Holstein engraissées n’importe où dans le monde à partir de maïs fermenté, de tourteau de soja ou même de farine de poisson. Est-ce vraiment le même produit ? Et sauf à examiner de près l’étiquette, le consommateur sait-il vraiment ce qu’il achète ? Les étiquettes aussi peuvent être trompeuses, car si certaines appellations correspondent à des critères objectifs précis – « camembert de Normandie » –, d’autres ne sont que des arguments de marketing « moulé à la louche » –, parfois trompeurs : tel camembert aujourd’hui fabriqué à partir de lait pasteurisé collecté n’importe où en France exhibe sur ses boîtes des « médailles d’or » obtenues autrefois par la marque, du temps où elle n’était pas devenue la propriété du groupe industriel et où le fromage était fabriqué exclusivement avec du lait cru de la région.

C’est que les grandes surfaces doivent pouvoir donner l’illusion aux consommateurs que la concurrence existe encore et qu’elle stimule ainsi la qualité. Mais qu’importe à l’industriel de vendre du camembert Lanquetot plutôt que Graindorge ou Lepetit puisque c’est toujours le même financier qui en tirera bénéfice ? Bien plus, l’un des concurrents français de Lactalis, dont on ne parle pas, fabrique une grande partie de son camembert en République tchèque,… à partir de quel lait ? Il est vrai que, pour l’instant du moins, ce camembert ne semble pas vendu en France. Dans les années 1980, j’avais eu le privilège de goûter à Laval du camembert fabriqué par Besnier pour être vendu aux États-Unis : il était naturellement fabriqué avec du lait pasteurisé, ne présentait aucune croute et était vendu outre-Atlantique dans une boîte en aluminium, hermétique.

Sauf à passer des heures à éplucher les indications en tout petits caractères figurant sur les emballages, le consommateur ne peut plus savoir ce qu’il achète vraiment : le camembert vient-il de Normandie ou d’ailleurs, même de Tchéquie ? Le yaourt est-il fabriqué à partir de lait et de ferment lactique (lequel ?) ou son onctuosité est-elle le résultat d’un savant dosage entre le lait (il en faut bien, même s’il est « reconstitué »), l’amidon de maïs (ou de pomme de terre) modifié et un quelconque extrait d’algue ?

La question qui se pose désormais face à cette publicité trompeuse est celle de savoir si ce semblant de concurrence est destiné à améliorer la qualité du produit au profit du consommateur ou à accroître les marges bénéficiaires du producteur pour la plus grande satisfaction de ses actionnaires.

Lactalis et le marché du lait

Surfant sur l’émotion engendrée par ce « scandale » sanitaire, le Gouvernement a réuni « les états généraux » de l’alimentation au cours desquels il a pris l’engagement de proposer une loi – non encore déposée au jour où cet article est rédigé – qui imposerait que le prix auquel les industriels français achèteront désormais le lait aux producteurs « tiendrait compte » du coût de revient pour ces derniers. Mais, outre le fait que ce prix de revient varie d’une exploitation à l’autre et que tout le lait produit n’est pas de même qualité, une telle solution est lourde de menaces. En effet, à ce jour, et pour des raisons qui n’ont rien à voir avec la qualité du produit, le lait vendu sur le marché international de Nouvelle-Zélande est d’un tiers moins cher que le lait produit en France ; le lait allemand est aussi, lui pour des raisons fiscales et sociales, moins onéreux que le lait français.

Une fois cette loi votée, le Gouvernement pourra-t-il assurer que le lait français sera toujours vendu dans les mêmes proportions et que les « grandes surfaces » ne préfèreront pas acheter leur lait et les succédanés de fromage sur le marché international plutôt qu’auprès des industriels français de l’agro-alimentaire ? Comme le constatait le journal Marianne le 12 janvier 2018 : « Le poison et la malbouffe pourraient être sérieusement limités, voire évités, si l’on comprenait une fois pour toutes que, plus on baisse le coût de production, plus on abaisse la qualité, donc la sécurité alimentaire ». N’est-ce pas sur ce point que le gouvernement devrait véritablement faire œuvre de pédagogie ?

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