France
Orages de septembre, année blanche ou année noire ?
Budget, fiscalité, révoltes sociales : à quelle sauce allons-nous être mangés ?
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La dette publique est une drogue à laquelle nos gouvernants sont désespérément attachés. Prisonniers de dogmes keynésiens, entravés par l’euro et l’Union européenne, persuadés que n’importe quel problème social se règle à coups de milliards et aveugles sur les dépenses nuisibles, ils ne savent pas décrocher.
Pour l’heure, ce ne sont pas les contorsions de ce pauvre Lecornu pour garder son gouvernement qui nous préoccupent mais bien évidemment le budget et le montant de la rapine supplémentaire que nous subirons, parce que le changement de Premier ministre ne change rien à la situation désastreuse des finances de notre pays.
Les vingt premières années du XXIe siècle resteront dans l’histoire comme celle des dettes. Dès l’an 2000 et la crise numérique, puis en 2008 avec la crise des subprimes, la crise des dettes en Europe en 2011 et enfin celle du Covid, le remède a été le poison. Qu’on ne s’y trompe pas, tous ces phénomènes ne sont pas la cause mais seulement une condition nécessaire à la manifestation de la crise.
Car Il s’agit bien d’une addiction des hommes politiques français depuis 1974 (plus aucun budget en équilibre depuis cette date) qui, après quelques moments d’euphorie, tels la drogue, nous fait retomber dans le marasme économique. Addiction qui est une imitation servile d’un modèle keynésien qui voulait que la dépense publique stimulât l’économie : or la démonstration est faite que plus de dette et de déficit public ne produisent pas de croissance (0,7% selon la Banque de France).
Mais l’économie étant un organisme vivant, elle est intoxiquée par cette masse de dettes ; elle devrait se désintoxiquer mais dans un premier temps une réduction de la dette produirait une baisse supplémentaire de croissance. Aussi les politiciens en reprennent, tel un drogué en manque. La dette, c’est le fentanyl de la politique.
Et la monnaie est une victime collatérale de l’endettement. Par analogie avec un organisme vivant, la monnaie étant un intermédiaire des échanges elle est sécrétée par le système bancaire (un peu comme le sang dans l’organisme vivant) à la mesure des besoins de l’économie et dans un rapport à due proportion de la croissance.
Il n’est pas difficile de comprendre que les dettes depuis vingt ans, et donc le volume de monnaie en circulation (avec le quantitative easing), n’ont plus aucun rapport de proportion raisonnable avec l’activité manufacturière, tandis qu’elles profitent à la sphère financière mondialisée.
Ainsi la monnaie, déjà monopole des États (donc de la BCE et de l’UE), est devenue totalement artificielle et politique, dispensée « d’en haut », la monnaie numérique étant le sommet en la matière. Quelles conséquences ? La mort de la monnaie historique. La monnaie n’est plus la monnaie, elle est détruite par la dette.
Je m’appuierai ici sur l’excellente publication de la fondation Polémia, « 3000 milliards de dette, ouvrons la chasse aux dépenses nuisibles », lors du Xe Forum de la dissidence. Couvrant la palette complète du problème, les intervenants témoignent d’une grande compétence et d’une lucidité aux antipodes des politiciens empêtrés par l’incompétence et l’idéologie. Un monument de réalisme qui ne laisse pas de soulever l’espoir qu’enfin la France sorte du bourbier fiscaliste qui la ligote littéralement et constitue une des voies de sa servitude. Car la dette, surtout quand elle est détenue par l’étranger (contrairement à l’Italie ou au Japon), est un pacte de sujétion.
Les Français, qui sont les champions de l’impôt, sont en droit de penser qu’avec de tels prélèvements ils auraient au moins le bénéfice d’un endettement réduit. Que nenni ! Les deux se cumulent !
Quelques chiffres pour éclairer le problème. Notre dette globale est de 3 415 Mds€, en augmentation de 43 % depuis 2019. Elle se répartit ainsi :
Pour mémoire, le PIB de la France est de 2 920 Mds€, celui de l’Allemagne de 4 300 Mds€.
La question de la dette est éminemment politique puisqu’en France on a laissé filer la dette comme on a laissé filer l’immigration, la désindustrialisation, la délinquance ou l’enseignement. Tout se tient, en effet, selon l’énarque Michel Geoffroy qui nous rappelle utilement quelques chiffres : la France est le troisième pays le plus endetté de l’UE derrière la Grèce et l’Italie (respectivement 162 % et 137 % du PIB) en valeur relative, mais la première en valeur absolue car la dette grecque s’établit à 369 milliards d’euros, celle de l’Italie à 2 948 milliards et celle de la France dépasse les 3 400 milliards, sans compter d’autres dettes moins avouables (la dette cachée des retraites des fonctionnaires) : certains économistes la font monter à 7 000 milliards.
Mais à l’incompétence et au cynisme s’ajoute ce que Michel Geoffroy appelle le grand secret. En clair, les États et les régulateurs sont tout simplement dépassés par l’évolution financière chaotique du monde occidental.
On notera qu’en France « tout le monde il est socialiste » bien au-delà des écolos et des communistes résiduels car c’est une affaire de culture : l’école française est une école du collectivisme et de l’envie. Le problème n’est pas « les riches » mais l’oligarchie financière qui, loin de s’occuper de l’administration des choses (Saint-Simon en 1815, Fukuyama en 1991 ), prétend aussi s’occuper de l’administration des hommes.
Le problème, c’est l’effacement de la classe moyenne et le creusement du fossé entre riches et pauvres (11 millions quand même, en France) : l’augmentation du nombre des milliardaires français n’a pas fait moins de pauvres en France .
On voit donc en effet le reflexe facile : faire payer les riches… Or la richesse n’est pas un stock mais un flux. C’est là que s’observe l’effet pervers par excellence : le levier fiscal conduit fatalement à concentrer la taxation non pas sur « les riches » mais sur ceux qui ne disposent pas du pouvoir de relocaliser à leur gré leurs actifs : PME, classes moyennes, retraités, petits épargnants, propriétaires immobiliers, héritiers… C’est tout l’esprit du budget de Bayrou, ce sera celui de Lecornu. Tandis que moins de 45 % de Français sont assujettis à l’impôt sur le revenu, selon les chiffres de la Direction générale des impôts, les 10 % de contribuables les plus aisés en supportent 76 % de la charge et le 1 % supérieur, 35 %.
Et pour ajouter à tout cela, l’Europe devient la prison des peuples, l’empire de la norme. L’invention de l’euro a été un piège mortel. En effet la zone euro, aux régulières crises de change et de balance de paiement, ne peut plus ramener les gouvernements à la raison, par la sanction politique de toute dévaluation du franc. L’euro a fonctionné comme un pousse-au -crime de la dette et du déficit. Jean-Claude Martinez souligne par ailleurs que l’Occident souffre depuis un siècle du fait qu’il a mis un impôt sur le travail quand le Sud global n’en a pas.
Dans la crise covidienne qui a aggravé les choses, la France a pris l’option d’un confinement très sévère à partir de mars 2020.Les modalités de gestion ont induit une énorme récession économique, compensée par une totale ouverture des vannes des finances publiques. Georges Le Breton, haut fonctionnaire, spécialiste des politiques publiques, analyse la crise du Covid par comparaison avec la Suède. Il met lourdement en cause la gestion Macron-Le Maire. Il montre que la Suède s’est fortement démarquée du reste du monde occidental. La dette publique en proportion du PIB a bondi de 16 points en France, en 2020, contre trois points en Suède. Il cite en conclusion Louis-Ferdinand Céline :« On ne meurt pas de dette, on meurt de ne plus pouvoir en faire. »
N’est-ce pas le sort létal des gouvernements depuis un an en France, avec toutes leurs dépenses nuisibles ? Les milliards s’alignent : transition écologique, immigration, surencadrement bureaucratique… Bref « il y a du gras ». On pourrait commencer par la révision des accords avec l’Algérie, la cessation des subventions au développement de la Chine et la contribution au budget européen. Jean-Yves Le Gallou conclut de son coté : « pour les dépenses nuisibles ce qu’il faut, ce n’est pas le rabot mais la tronçonneuse. » Voilà un outil que le pouvoir semble ne pas connaître.
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