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La Politique agricole commune et le libre marché

Au prétexte de sauver la planète et les humains, l’OMS et Bruxelles ont décidé de tuer les agriculteurs, les éleveurs et les pêcheurs. Et quels meilleurs instruments que le marché et le saint libre-échange pour y parvenir ? Une seule arme pour les contrer, le boycott.

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La Politique agricole commune et le libre marché

Le 19 janvier dernier, notre premier ministre, Gabriel Attal, a reçu Jordan Bardella et a pu évoquer avec lui l’état de notre agriculture et des mesures qu’il conviendrait de prendre pour éviter un mouvement qui rappellerait celui des Gilets jaunes. Cet entretien, plus politicien que politique, a pris place entre les manifestations agricoles en Allemagne et en Hollande accompagnées de la grogne des agriculteurs français et le début de la campagne pour les élections européennes. L’enjeu est important car chacun est conscient du fait que la situation actuelle est très largement la conséquence de la mise en œuvre de la politique agricole commune censée « garantir un approvisionnement stable en denrées alimentaires et préserver les revenus des agriculteurs » ainsi que des directives européennes destinées à préserver sur le plan international le libre-échange tout autant qu’au sein de l’Union un environnement durable !

Les premiers symptômes du mal-être

Dans un monde où le maître-mot est la liberté du commerce qui suppose la libre négociation entre divers intervenants n’obéissant qu’à la loi de l’offre et de la demande, les pouvoirs publics se sont invités en multipliant les taxes et les subventions, en imposant des normes aussi complexes que diversifiées et en passant des accords avec des pays étrangers pour permettre aux autochtones de pouvoir avoir accès en toute saison à tous les produits offerts en n’importe quel point du monde. Le Bonheur serait à ce prix !

En Allemagne la goutte d’eau qui a fait déborder le vase a été la suppression de « l’avantage fiscal » sur le gazole dont les agriculteurs – au même titre que les pêcheurs – bénéficiaient jusqu’à présent. En France, dans le même sens, Bruno Le Maire a récemment déclaré qu’il envisageait « une refiscalisation progressive du carburant des agriculteurs de 2025 à 2030 ». Les agriculteurs, déjà sous pression à cause des tracasseries administratives et du manque de considération, avaient commencé gentiment en retournant les panneaux indicateurs situés à l’entrée des villes ; le 19 janvier, certains d’entre eux ont commencé à bloquer une autoroute aux alentours de Toulouse. De leur côté, les agriculteurs hollandais sont en butte aux règles qui leur imposent de diminuer les émissions d’oxyde nitreux (autrement dit les rots et les pets des vaches) ce qui suppose une diminution drastique du nombre d’éleveurs. Cette revendication qui agite aussi les agriculteurs italiens s’ajoute chez ces derniers à leur contestation du poids pris par les intermédiaires. Mais le plus important n’est pas là.

Dans une intervention récente, le directeur-général de l’OMS, le docteur Adhanom Ghebreyesus, a accusé les agriculteurs de tuer 8 millions personnes chaque année. « Nos systèmes alimentaires, a-t-il dit, sont préjudiciables à la santé des populations de la planète. Ils contribuent à plus de 30 % des émissions de gaz à effet de serre et sont responsables de près d’un tiers de la charge de mortalité mondiale ». C’est pourquoi il préconise une transition vers des systèmes alimentaires plus sains ; à base d’insectes ou de viande de culture (autrement dit de viande obtenue en développant artificiellement une forme de cancer de cellules animales cultivées en laboratoire) ?

Quelques exemples de fonctionnement du marché

Cette contestation trouve un écho puissant en France chez les éleveurs spécialisés dans l’élevage laitier. Ceux-ci se plaignent en particulier du fait que le groupe Lactalis – premier groupe agro-alimentaire du secteur laitier – ne leur achète le lait que sur la base de 40 centimes le litre alors que le même litre se retrouve dans les rayons des supermarchés à plus d’un euro et vingt centimes. Avec le développement de l’urbanisation qui coupe de plus en plus les populations de tout ce qui a trait de près ou de loin à la nature, le consommateur de lait ne connaît plus le producteur ; il achète cet aliment simple et complet à un puissant intermédiaire (chaîne de super et hypermarchés) qui lui-même l’acquiert auprès d’un autre intermédiaire (industrie agroalimentaire) dont les pouvoirs de négociation tant face aux producteurs que face aux consommateurs les rend tout-puissants. Le lait produit au nord ou dans l’ouest de la France se retrouve ainsi consommé dans le sud ou dans l’est tandis que le lait produit dans ces deux dernières régions suit le chemin inverse, au gré des « marchés » passés par ces intermédiaires devenus indispensables. Et cela ne concerne que le lait frais car le lait en poudre et le lait condensé se négocient quant à eux sur le marché néo-zélandais. Mais peut-on vraiment encore parler de marché quand le producteur et le consommateur ne peuvent en aucun cas se rencontrer et qu’ils sont tributaires d’intermédiaires qui imposent leurs conditions et leurs prix ?

Dans une société qui ne se soucie plus véritablement de Dieu, le mot religion rime désormais avec consommation. Ainsi dans quelques semaines, les Français vont se précipiter dans leur supermarché favori pour y acheter « l’agneau pascal ». Comme tous les ans, le gigot provenant d’un agneau élevé dans le voisinage et récemment abattu sera vendu deux fois plus cher que celui, congelé, arrivant par avion des antipodes. Et pourtant, les nouvelles règles de la PAC se veulent respectueuses de l’environnement ce qui, comme chacun le sait, impose de diminuer de façon drastique toute consommation superflue d’énergie et toute émission non indispensable de CO2.

Cette folie mondiale qui permet simplement d’enrichir quelques fonds de pension et autres géants de la finance touche aussi le monde de la pêche. Ainsi, à la mi-janvier, alors que débutait sur nos côtes la saison de la pêche à la sole, cette activité nourricière a été interdite dans le golfe de Gascogne pour ne pas risquer d’y troubler la présence de dauphins. Le gouvernement a promis que les pêcheurs ainsi privés de leur gagne-pain seraient indemnisés… avec de l’argent qu’il n’a pas et qu’il devra donc emprunter sur les marchés financiers mais qu’il faudra bien un jour rembourser. Dans le même temps, le port de pêche de Lorient, pour faire face à la baisse des volumes de poissons vendus à la criée du port de Keroman du fait des quotas imposés par l’Union européenne, a décidé de faire venir chaque jour du sultanat d’Oman, et par avion-cargo, les poissons que les pêcheurs locaux n’ont plus le droit d’aller chercher. Et, dans un souci de communication marketing parfaitement hypocrite, la société française créée à cet effet a été appelée – on n’ose pas dire « baptisée » – Ker Oman !

Comment en sortir ?

Ce qui a conduit à de telles aberrations est en fait l’idéologie de la liberté commerciale, de la libre circulation des biens et des capitaux, du libre-échange à laquelle s’est ajoutée désormais l’idéologie d’une écologie dont l’homme a été exclu. De la même façon que le socialisme est foncièrement de même nature que le libéralisme politique, le dirigisme étatique est de même nature que le libéralisme économique. Dans tous les cas ce qui est en cause c’est l’absence de transcendance seule garante de la liberté fondamentale de chaque être humain.

À force de ne plus éduquer les nouvelles générations à la poursuite du bien individuel dans le strict respect du bien commun, à force de vouloir imposer à tous ce qui est considéré à un moment donné comme bon pour chacun, on en arrive à imposer des règles infernales. La paupérisation est en route ! De 2010 à 2020, la France a perdu plus de 100 000 exploitations agricoles et d’ici 2030 le nombre des disparitions risque d’augmenter encore. Si l’on ne veut pas que les agriculteurs (et les pêcheurs) n’en arrivent à des manifestations violentes pour obtenir simplement de vivre décemment dans un pays riche, il est indispensable de revoir intégralement la politique du pays et de refuser les diktats imposés par une Union européenne influencée par des lobbys aux mains des financiers internationaux. Les consommateurs sont-ils prêts à soutenir une telle action en privilégiant les circuits courts, en accordant la priorité aux produits nationaux, fussent-ils un peu plus chers (ce qui suppose de se priver de quelques loisirs faciles) et en allant jusqu’à boycotter les produits importés arrivant à des prix avantageux car ils ne supportent pas les mêmes charges sociales et ne protègent pas de la même façon leurs producteurs ? Notre avenir est entre nos mains.

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