Tribunes
Que faire ?
Adieu, mon pays qu’on appelle encore la France. Adieu.
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D’abord, l’hygiène. Il faut se laver les mains jusqu’aux aisselles avant le petit-déj, après le petit-déj ; idem pour le déjeuner, le goûter, le dîner, les grignotages. Il faut se doucher au minimum deux fois par jour, quatre, cinq quand on a transpiré : quand on transpire, on évacue des toxines, il ne faut pas les garder sur soi. Il faut se peser matin, midi et soir, veiller scrupuleusement à son IMC. On surveillera son alimentation. Attention au sucre, au sel, au gluten, au lait, aux casseroles en alu. L’eau et les biscottes, c’est ce qu’il y a de mieux. Mais il faut surtout se renseigner. Ne lisons plus Balzac, Platon, Christine Angot, c’est une perte de temps, ça a même une mauvaise incidence sur la santé, car ça pousse à la sédentarité et aux ruminations stériles. Consultons plutôt des revues de diététique, de bien-être, ce n’est pas ce qui manque sur le marché, personne n’aura le front de dire qu’il n’en a pas trouvé. Passons-y des heures, pesons le pour et le contre, ne pensons qu’à ça. N’oublions pas les check-up, les coloscopies, les IRM, voyons un, deux, trois, quatre toubibs, les premiers peuvent se tromper. Portons des masques, sur la bouche, sur le nez, sur les oreilles, ailleurs, partout, partout. Rendons-nous chez le kiné : il nous malaxera, nous étirera, nous fera mal, signe qu’il y a quelque chose qui ne va pas dans notre squelette et allons voir l’ostéopathe, le naturopathe et d’autres patpathes. Faisons du sport, du sport, du sport. Nous ferons quelques chutes, obtiendrons quelques entorses ou fractures ; tant mieux, nos os, nos ligaments étaient trop vieux, ils se ressouderont : grâce au sport, ils se régénéreront. Grâce au sport, on peut faire un infarctus, signe qu’on a oublié de voir le cardio. N’oublions pas la santé mentale. Il y a le yoga, le bouddha, on peut pratiquer aussi des exercices chinois où on lève lentement la jambe, où on propulse encore plus lentement la main, cela en groupe, on se sent moins seul, on fait rire quelques badauds, mais d’autres admirent. Et puis il y a les psy. Les uns vous bourrent de médicaments, les autres vous montreront que vous avez subi dans la petite enfance une éducation détestable et que vous avez tardé à effectuer le meurtre du père et à œdiper avec maman. Mais il n’est jamais trop tard pour bien faire. Ça mettra de la bisbille dans la famille, de quoi rendre l’existence moins monotone.