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Le pape, Biden et les vélos

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Le pape, Biden et les vélos

L’unité du rite romain (mais pas de tous les rites catholiques) est ainsi devenue, cet été, une cause primordiale. On a peu remarqué qu’au-delà de la fine sélection de grands principes mobilisés il y a une circonstance particulière que le pape a forcément envisagée : celle de l’âge des évêques consacrés en 1988 par Mgr Lefebvre (et dont l’excommunication a été levée en 2009). Mgr Williamson et Mgr Tissier de Mallerais ont un âge vénérable. La question de leur remplacement est posée. En travaillant à la disparition de la forme extraordinaire du rite romain dans les diocèses, en privant les séminaristes qui ont choisi cette voie de toute réelle possibilité d’exercer un ministère, le pape François, qui sait que l’âge commande (au point sans doute que ce motu proprio arrive circonstanciellement un peu trop tôt), incite la Fraternité Saint Pie X à renouveler les sacres schismatiques de 1988 pour assurer sa pérennité. Ce serait évidemment la pire solution, par rapport aux vrais grands principes, mais, les circonstances commandant… Espérons que la nasse ainsi préparée paraîtra trop étroite et que ceux qui défendent d’excellents principes sauront attendre que les circonstances leur redonnent un champ d’action.
Joe Biden, de son côté, a lui aussi profité des circonstances. Tout d’abord, une décision amorcée par son prédécesseur honni, qui pourra être chargé à loisir de toutes les fautes de toutes les administrations. Ensuite, la lassitude des Américains, qui n’en peuvent plus de ces “héros” et autres “vétérans”. Enfin, l’opportunité de trouver facilement des ressources immenses pour financer sa politique de relance économique : en expliquant combien l’Afghanistan a coûté, Joe Biden explique en fait, lui aussi, comment cet argent aurait pu être dépensé au profit direct des Américains. Tout en affirmant le maintien de la présence universelle des États-Unis comme gardiens des droits de l’homme, avec les accents ronflants propres aux grands principes, il poursuit la politique circonstancielle de relatif isolationnisme amorcée par Barack Obama (que d’amorçages, quelle continuité !) : les États-Unis Démocrates, illuminés et éveillés, pensent être un role model et se satisfont désormais de l’exemple admirable qu’ils donnent. Espérons que le colosse aux pieds d’argile, surendetté et avide, ne s’écroulera pas d’abord sur ses “partenaires”, qu’il ignore chaque fois que ses intérêts circonstanciels commandent.

L’automobile a vécu

J’aurais dû terminer cette série de grands hommes, de grands principes et de grandes décisions en parlant d’Emmanuel Macron, terme logique de toute série consacrée à la grandeur. Mais voilà qu’on annonce la naissance d’une coopérative de fabricants de vélos du côté de Lyon. Le véhicule est à la mode, les transporteurs ne jurent plus que par le triporteur et le vélo cargo, le smart floating (oui) permet de récupérer sa bicyclette n’importe où, les vieux clous peuvent se voir dotés de batteries électriques, bref, l’automobile a vécu ; ou presque. Comme tout coûte cher, quelques fabricants qui produisent quelques centaines de pièces annuelles (comme Benur et ses « tricycles à assistance électrique conçus pour accueillir un fauteuil roulant » ou Cyclik et ses vélos en bambou du Gard et lin de Normandie – Les Échos), se sont réunis pour monter une ligne d’assemblage commune, qui sera aussi un groupement d’achats, et pourra sortir jusqu’à 15 000 véhicules par an. Ça m’a paru si intelligent, si corporatiste, si pratique, si empiriquement bien organisé que j’en ai oublié Macron, ses grands principes et ses grandes circonstances. La coopérative de Lyon applique d’excellents principes, sans dédaigner les aides de l’État (j’oubliais de vous dire qu’il y a un « cluster vélo régional MAD » dans la région Auvergne-Rhône-Alpes). Bambou et batteries s’y côtoient sans heurts et personne ne cherche noise à son voisin. Mieux, on voit poindre, sur le terrain, commandé par la demande, l’espérance d’une relocalisation partielle d’autres petites industries : comme l’explique l’un des industriels cité par Les Échos, « Les délais sont de 54 semaines pour des freins, produit qui n’est plus du tout fabriqué en France […] un volume de 10 à 15 000 pièces suffirait à intéresser un industriel régional, un sous-traitant automobile par exemple ». C’est de la base, petitement mais sûrement, que va renaître le tissu industriel des petites entreprises tout à la fois jalouses de leur savoir-faire et soucieuses de bien commun. Il y a sans doute là une leçon à méditer pour certains grands hommes attachés à de grandes chimères.

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