Civilisation
Pour Charles Maurras, In Memoriam
Il y a 70 ans de cela, le 16 novembre 1952, Charles Maurras s’éteignait à la clinique Saint-Grégoire de Saint-Symphorien-lès-Tours, dans le département d’Indre-et-Loire, âgé de 84 ans.
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Personne ne le contestera : le prince Henri, comte de Paris, a réussi sa sortie. Avec quelque chose relevant de cette exactitude dont on dit qu’elle est la politesse des rois, avec aussi cette sorte d’élégance princière discrète, affable et inquiète que lui connaissaient ses proches, il a quitté ce monde deux cent vingt-cinq ans, jour pour jour, après que la mort brutale du roi Louis XVI eut plongé la France dans une période d’incertitudes, de troubles et de tragédies qui dure encore. Les Gilets jaunes étaient alors dans la rue, comme pour rappeler que le pays n’en a toujours pas fini avec la Révolution. Le fil du couteau régicide a privé le peuple de son recours naturel contre l’arbitraire, les cahiers de doléances sont toujours à refaire et les ronds-points à prendre comme on a pris la Bastille. En twittant sur la « légitimité de la colère du peuple », le prince Henri avait ouvertement soutenu les Gilets jaunes tout en les appelant à la modération : il leur désignait les nouvelles bastilles, redoutables celles-là, qui verrouillent aujourd’hui le pays. Vaines paroles, dira-t-on, que ces tweets ou ces déclarations diffusées par le site de l’Institut de la Maison royale de France. Mais n’est-il pas dans le rôle d’un prétendant de dire, avec des mots simples, ce que serait sa ligne de conduite s’il était à nouveau investi des fonctions souveraines dont a si longtemps été chargée sa famille ?
Plus difficile, à bien des égards, que le métier de roi. Les grâces d’état y sont beaucoup plus parcimonieuses, il y faut un investissement personnel d’une autre nature, un effort de volonté le plus souvent peu gratifiant, dans un contexte où le manque de prise sur les événements incite facilement au découragement. S’y ajoute la difficulté plus grande à savoir s’entourer d’hommes de confiance et aussi à savoir leur faire confiance. Le prince Henri a-t-il rempli le contrat ? Mais quel contrat ? Dans cette fonction, il n’y en a qu’un : reprendre le pouvoir. De ce point de vue, l’échec est total, partagé, il est vrai, avec les générations précédentes. Mais s’il appartient à chaque prétendant d’inventer sa place, d’imposer sa façon propre de faire savoir « ce qu’il ferait si… », quel bilan laisse le prince Henri ? Chacun est libre de l’apprécier. On sait quel handicap a représenté pour lui sa difficulté à gérer ses relations familiales et les péripéties qui en ont résulté. On ne sait pas moins comment il a su faire montre de vertus typiquement Orléans : le courage militaire dûment décoré, la sensibilité artistique et une œuvre d’aquarelliste appréciable, et la défense, sagement mesurée mais convaincue, de la cause de l’environnement. Depuis 1989, il avait publié pas moins de huit livres, dont À mes fils et La France survivra-t-elle en l’an 2000 ?, et encore, en 2016, La Royauté de l’homme. On a pu le constater : au fil de ces ouvrages, jamais il n’a « abdiqué » sa fonction, il s’est toujours délibérément inscrit dans la lignée historique de la Famille de France.
Aussi la continuité des générations a-t-elle été assurée dans les meilleures conditions, le prince Jean, duc de Vendôme et Dauphin de France, ayant aussitôt assumé la succession, et repris le titre de comte de Paris, non sans laisser quelques regrets à ceux qui aimaient entendre, dans le nom du duc de Vendôme, sonner le carillon d’Orléans, Beaugency, Notre-Dame de Cléry… Tous adhéreront aux termes de sa prise de fonctions :
Si les Français le veulent, nous renouerons le pacte historique et nécessaire entre la Nation et la Famille royale. Ensemble, nous nous efforcerons d’assurer l’unité de la France, sa grandeur et sa prospérité, l’ordre intérieur, enfin la paix dans le monde.