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Dernière première dame

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Dernière première dame

La couverture de l’hebdomadaire Point de Vue n°3451, paru le 10 septembre dernier, met à l’honneur, non point une tête couronnée – le couple royal belge entouré de ses enfants ou bien le nouveau Roi d’Espagne entouré de sa famille -, mais, de façon inhabituelle pour ne pas dire surprenante, le portrait d’une ex-maîtresse de président, bafouée, vengeresse (titre de couverture : « Les dessous d’une vengeance »), auteur d’un best-seller ; tout un dossier consacré à celle par qui le scandale arriva. Devant ce choix dérangeant, il est légitime de s’interroger sur les motivations de la rédaction de Point de Vue ; a-t-elle misé sur une popularité durable ou une compassion unanime de ses lecteurs pour « l’ex-première dame » ?

Certes, la publication de Merci pour ce moment a électrisé les rédactions de toute la presse écrite. Aucun journal ne pouvait faire l’impasse sur « l’affaire », et l’actualité s’imposait à Point de Vue comme aux autres. Mais cet illustre hebdomadaire ne nous a-t-il pas habitués à plus de brillance, plus de panache, plus de belles histoires, ces histoires de princesses qui font rêver à tous âges ? Le livre et son auteur peuvent faire vaguement et brièvement saliver l’opinion publique, car une nouvelle attaque contre le président a son côté « croustillant »… mais ils sont loin de nous faire rêver !

La pauvreté littéraire de l’ouvrage, en cohérence avec la pauvreté du récit, méritent au mieux l’indifférence. Dans un pays où s’inversent progressivement les valeurs, l’intérêt porté à la médiocrité, au règlement de comptes, à la délation, à la dénonciation… ne laisse pas d’étonner les derniers résistants que nous sommes. On est dans l’anti-séduction, dans l’apologie des contre-valeurs. Mais certes, la presse écrite doit vivre, il faut vendre, et il faut donc « coller » à l’actualité. Dommage que Point de Vue n’ait pas choisi de se distinguer des autres…

Première dame, avez-vous dit ? Ce titre, attribué depuis longtemps* et officiellement aux épouses des présidents des Etats-Unis (« the first Lady »), fut introduit en France, sans doute véhiculé par un vent d’Atlantisme, après le mariage de Nicolas Sarkozy avec Carla Bruni. Bernadette Chirac n’a jamais été qualifiée ainsi, et Cécilia Attias n’en a pas eu le temps. L’américanisme pouvait être toléré, soit !, en l’affectant à un couple légitime. Cependant, dès l’élection de François Hollande, l’expression fut officialisée par les médias complices – et pour cause, eu égard à la profession et aux orientations politiques de l’intéressée – au bénéfice d’une femme encore mariée… ailleurs ! Or, civilement, fiscalement, et surtout devant la Nation, cette dame de première n’avait droit à aucun privilège spécifique, sinon celui de suivre son bien-aimé dans ses déplacements, ce qu’elle ne manqua pas d’exiger. Qu’importe le mariage, proclama-t-on : « dame » ne veut pas dire « épouse » !

Là où le bât n’en finissait pas de blesser, c’est dans les dépenses que la « première maîtresse » engageait au nom de… mais au nom de quoi, au fait ? Collaborateurs affectés à son service, frais de fonctionnement et de déplacement, autres engagements divers ont été financés par les deniers de la – généreuse – république (nos impôts) ; certes, le Président Sarkozy avait lui-même attribué, sans trop d’explications, un bureau et des conseillers à son épouse. Pourquoi ne pas continuer après mai 2012, d’autant que l’intéressée avait ses exigences ? Mis à part un recours en justice qui n’aboutira vraisemblablement pas, la cause étant éteinte, toute l’oligarchie en place applaudissait à la présence bénéfique à l’Elysée – même si illégitime et coûteuse – de la « première dame ».

A la suite de « l’affaire », l’oligarchie et les médias complices semblent avoir opéré un virage à 180°, en proposant « de ne plus employer l’expression première dame » ; sans doute de peur qu’elle soit abusivement utilisée ou qu’elle se retourne contre ses attributeurs ! Pour notre part, nous proposons : « épouse du président de la république »… jusqu’à ce qu’une loi éradique la notion d’épouse ?

* l’expression fut employée dès la moitié du XIXe siècle, sous le mandat de James Buchanan (1857-1861), veuf qui avait emmené sa nièce orpheline à la Maison blanche; c’est cette dernière, Harriet Lane, qui inaugura le titre de First Lady.

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