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Séisme et sanctions

Les Syriens connaissent depuis douze ans un tremblement de terre interminable et suffocant. Douze années de guerre civile, alimentée par toutes les puissances, qui auront conduit 90 % de la population syrienne sous le taux de pauvreté. Douze années à craindre la victoire de l’islamisme, les balles perdues, les enlèvements et les bombardements. Douze années à affronter l’isolement international du gouvernement central de Damas, honni par les puissances occidentales, et qui s’est pourtant maintenu à la tête de l’État.

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Séisme et sanctions

(230217) -- ALEPPO (SYRIA), Feb. 17, 2023 (Xinhua) -- A displaced boy collects belongings among the rubble of a shattered building in Aleppo, Syria, on Feb. 17, 2023. (Str/Xinhua) - Stringer -//CHINENOUVELLE_CHINENOUVELLE0026/Credit:CHINE NOUVELLE/SIPA/2302181126

En Syrie, la question n’est plus depuis longtemps de débattre entre les diverses opinions qui entourent le président Bachar Al Assad. Son pouvoir a résisté à toutes les milices et toutes les interventions, à toutes les vindictes comme à toutes les déclarations. Quelques conseillers goguenards montrent d’ailleurs les diverses déclarations occidentales qui annonçaient sa fin prochaine et certaine en 2013. L’histoire a parlé. Elle a parlé avec des milliers des victimes, des crimes, des horreurs. Elle parlé avec la pire des langues, celle de la guerre, et la pire des grammaires, celle de la guerre civile. Ce qui a été dit et fait demeure, et les anachronismes en cascade sur ce conflit passé n’y changeront rien

Il est patent que l’obstination occidentale, et singulièrement européenne, à ne tirer aucune conclusion des évènements du conflit syrien contribue largement à notre recul dans le monde arabe, et plus loin. Que pensent en effet les Aleppins, citadins si fiers, quand ils observent les aides humanitaires du golfe arabique, de Chine ou d’Iran, et même du Liban voisin, débarquer par convois entiers quand ceux des Européens sont réservés aux Turcs voisins ? Que pensent-ils quand ils entendent des commentateurs avachis affirmer que les sanctions occidentales n’auraient aucune incidence sur l’aide humanitaire qui leur parvient ?

Folie des hommes et injustice du destin

Dans la nuit du 6 février 2023, le séisme n’a pas jugé utile de respecter les frontières qui séparent l’ancien Sandjak d’Alexandrette, désormais en Turquie, la poche d’Idlib, tenue par des organisations djihadistes, et les zones sous le contrôle du gouvernement syrien. C’est idiot, les plaques tectoniques, ça ne distingue pas entre les bons et les mauvais Syriens. Gaïa en cède ici aux banques, aux plateformes de paiement, aux assureurs internationaux et autres transporteurs, eux sachant bien qu’il est des Syriens pour lesquels il faut se garder de toute charité : on y risquerait les poursuites des offices chargés de la lutte pour l’application des pléthores de mesures dites coercitives qui affligent la Syrie.

Assez vite nos commentateurs avachis expliquèrent que tout appel à suspendre les sanctions qui frappent la Syrie revenaient à relayer la « propagande » de « Bachar ». Leurs voix s’éteignirent rapidement : dès le 10 février, la quasi-totalité des rapporteurs spéciaux du Haut-commissariat des droits de l’homme de l’ONU appelait à la fin de ces mesures contre Damas. Puis ce fut la communauté Sant’Egidio, le Croissant Rouge et les diverses Églises orientales, dont le siège patriarcal est à Damas. Les avachis ne furent pas de poids. SOS chrétiens d’Orient évita, pour cette fois, le cavalier seul contre la duplicité des déclarations occidentales. Ce n’est que partie remise.

Pendant ce temps, les 44 000 victimes (à ce jour) du séisme qui a ravagé cette partie du monde regardent les vivants ignorer le drame qui se joue autant à Alep, à Idlib et à Antioche. Peut-être devisent-elles sur la folie des hommes et l’injustice du destin. Espérons qu’elles prient pour que les enfants frigorifiés d’Alep ne succombent pas à la perversité des chancelleries après avoir résisté à l’effondrement de leurs espoirs.

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