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Munich serait-elle la ville de tous les abandons ?

On se souvient des fameux accords de Munich qui abandonnèrent notre allié tchécoslovaque aux convoitises hitlériennes en septembre 1938. « Vous aviez le choix entre la guerre et le déshonneur. Vous avez choisi le déshonneur, et vous aurez la guerre. » Churchill.

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Munich serait-elle la ville de tous les abandons ?

Les Occidentaux, réunis dans le cadre de la Conférence de Munich sur la sécurité, ont une nouvelle fois assuré l’Ukraine de leur soutien, le 17 février 2023 .Tout porte à penser que, cette fois, il ne s’agissait pas de céder devant l’agresseur, et la presse de se féliciter qu’une trentaine de chefs d’État se soient réunis pendant trois jours dans la capitale bavaroise pour aborder les questions de sécurité internationale.

Tout va donc très bien, Madame la Marquise (1938) ! Nous ne sommes pas dans l’ancuen scénario du renoncement, et la diplomatie (donc la politique) aura été au cœur de cette conférence.

Rien n’est moins sûr ; et l’abandon, ce 17 février, a été une fois de plus celui de la souveraineté des peuples au profit de petits (et grands) arrangements entre amis oligarques de la globalisation.

Et revoilà McKinsey

Pour ce qui est de la guerre, ils l’ont déjà, quant au déshonneur, un détail est passé sous le radar des médias de grands chemins, sa nature révèle à dire vrai une réalité bien singulière et pour le moins inquiétante. La firme McKinsey, en lien avec Ursula von der Leyen, donc l’oligarchie privée, se révèle maîtresse de l’ordre du jour politique et diplomatique de la conférence et c’est McKinsey qui a défini l’agenda. Bien sûr, l’information est demeurée presque confidentielle, mais pour identifier le pouvoir réel sous la liste des invités il faut aller à la page 169 de la bible de la conférence, the “Munich Security Report », pour y découvrir McKinsey . Le plus puissant cabinet de management privé au monde, avec son armée d’experts, a mis en forme l’agenda pour les élites globalisées en leur dictant un narratif qui sert les clients de base de la firme dans les activités de défense et d’énergie ou des hommes de pouvoir proches de la conférence. Ces informations, nous les trouvons sur le site de Politico, un site non gouvernemental basé à New-York, Londres, Bruxelles, Paris et Berlin. Le site pose la question de l’omission de l’annonce de la présence de McKinsey à la conférence, vendue comme un débat neutre dans les affaires du monde : « The extent of McKinsey’s behind-the-scenes influence in shaping the conference’s agenda is bound to raise questions about the governance and oversight of an event that sells itself as a neutral forum to debate world affairs. »

McLeyen système ?

On rappellera accessoirement que deux fils de madame von der Leyen ont travaillé pour McKinsey et que la firme de conseil est particulièrement sensible aux yeux de l’opinion allemande puisqu’elle fut au centre d’un scandale politique quand Ursula von der Leyen, alors ministre de la Défense en Allemagne, fut accusée de copinage et d’irrégularités dans certains marchés. Un rapport de 700 pages fut établi sur les centaines de millions d’euros que la ministre aurait dilapidé au bénéfice de McKinsey et d’autres consultants. Et bien entendu, en France, on se souvient de l’engagement de consultants de McKinsey dans la campagne d’Emmanuel Macron en 2017. Deux fiches d’évaluation annuelles de l’ancien patron des activités publiques de McKinsey en France témoignent à nouveau de liens répétés depuis dix ans entre le cabinet et Emmanuel Macron. Par ailleurs, de nouvelles perquisitions sont intervenues chez deux anciens de la firme investis dans la campagne de 2017 d’Emmanuel Macron. Malgré les dénégations de McKinsey, on voit bien que la Conférence de Munich sur la sécurité (MSC) est tout sauf le seul apanage de la diplomatie et que derrière cette MSC se cachent, aux yeux des peuples, de solides intérêts économiques, au bénéfice de firmes globalisées et de l’oligarchie transnationale qui en tire un maximum de profit et de pouvoir.

Où est passé le pouvoir politique ?

Macron s’est félicité du sommet de Munich, comme Scholtz et d’autres, mais la question est la suivante : sont-ils paresseux ou soumis, voire complices ? On peut leur en faire grief, tout se passe comme si, en effet les politiques ont abandonné l’analyse et la rédaction des rapports à un petit nombre d’hommes qui gravitent autour de Mc Kinsey, lesquels font constamment des aller-retours entre les ministères et le cabinet. L’article de Politico parle de « ghostswriters », rédacteurs fantômes qu’on ne voit guère et à qui le cabinet dénie tout rôle d’influence quand leur nom sont cités : il suffit d’y croire ! Les gens impliqués dans la MSC affirment que l’organisation a du mal à cacher l’étendue des implications de des consultants de McKinsey, rebaptisés rédacteurs. Selon les mêmes sources, en plus de guider la rédaction des rapports, McKinsey a offert ses avis afin de structurer le programme de la conférence et même de proposer qui inviter.

Davos bis

L’ambassadeur allemand Ischinger, qui présida la conférence, est le bénéficiaire d’un ancien partenariat avec McKinsey depuis une décennie. Son expérience avec McKinsey lui a inspiré la création de son propre cabinet, Agora Strategy Group, en 2015 ; il est en relation avec les senior executives de McKinsey qui, par exemple, l’aidèrent à fonder une université privée à Berlin où il installa une unité de réflexion sur la sécurité internationale dont le personnel, issu des cabinet ministériel allemands, supervise les travaux de la conférence pour le compte de McKinsey. La MSC, contrairement à la présentation que la presse en fait, est tout sauf une conférence internationale sur la paix : c’est un énorme think tank d’influence à prétention de gouvernance avec une centaine de sponsors, en passe de devenir une copie de Davos, avec Ischinger jouant les Schwab.

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