Le gardien n’est qu’une marionnette que manipule Cerbère, à l’aide de plus de douze guindes (terme employé au théâtre pour éviter l’appellation maudite et fatale de corde, celle qui est utilisée pour la pendaison). Ces guindes sont les douze apôtres félons du Sauveur. Le pantin ne sait point où il se trouve et le pourquoi de sa présence.

Un plateau sans acteurs, mais avec un marionnettiste qui dispose de ses doigts directeurs, tel un pianiste virtuose, une Némésis sortie d’une mystérieuse pantomime, et une voix qui incarne les mots anodins que prononce, annone, la poupée en bois subitement humanisée. Nous sommes dans l’antichambre du grand départ. Les mots sont inutiles, seul le silence répond au bavardage. L’homme est en adoration devant le Logos. Face au silence absolu, les mots sont vains, et le tintamarre de notre civilisation ne sont que poussière. Henry Le Bal, une fois de plus, nous entraîne dans ses interrogations, parfois errances mystiques. Il sait nous tendre un hameçon et sait nous perdre dans les ondes du grand océan des mystères.

La qualité de l’interprétation vocale et visuelle, la précision dans chacun des mouvements, tous symboliques, habitent cette représentation. Dans ce petit joyau qu’est le théâtre de l’Île Saint-Louis, situé dans un ancien hôtel particulier aristocratique, cette cérémonie accueillera initiés ou promeneurs d’un soir du long de la Seine. Il faut ne pas être dérouté par cette œuvre théâtrale, il faut se laisser aller au rythme d’une musique spatiale.

Le Gardien, Pièce d’Henry Le Bal, Théâtre de l’Île Saint Louis, 39, quai d’Anjou, Paris 4e
Tous les dimanches jusqu’au 11 décembre, à 17h30. Réservation : 01 46 33 48 65