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La France et le retour du nucléaire militaire

La France ne peut se passer de sa dissuasion nucléaire ou bien il lui faut renoncer à son statut de puissance au moment où ce statut commence à être revendiqué par de plus en plus d’États. Il ne semble pas malheureusement que les politiques en aient parfaitement conscience.

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La France et le retour du nucléaire militaire

Les armes nucléaires sont de retour. Outre les crises coréenne et iranienne, on constate que les États-Unis et la Russie mentionnent de plus en plus ouvertement leur arsenal atomique. Et plus uniquement comme un instrument de dernier recours, de dissuasion, mais comme un armement pouvant être effectivement utilisé dans certaines circonstances.

Quant à la France, les crédits annuels pour ses forces nucléaires vont passer de 3,9 milliards à 6, prévoit-on, à l’horizon 2025. Mais il existe aussi un mouvement inverse, visant à interdire et délégitimer les armes nucléaires. L’Assemblée générale de l’ONU a voté en juillet 2017 un traité stipulant la fin du nucléaire militaire. Ce traité ne comporte aucune clause de contrôle ou de contrainte, et n’a donc qu’une portée symbolique, mais le dernier Prix Nobel de la Paix a été attribué à une ONG qui plaide cette cause, et il ne faut pas sous-estimer l’écho de cette évolution dans une partie de l’opinion.

Un héritage paralysant

La question est compliquée par l’existence de l’héritage nucléaire du général de Gaulle, politiquement difficile à remettre en cause. Tout le monde, ou presque, est certes d’accord sur le dogme fondamental de la « Force de frappe » : son autonomie, aussi bien politique que militaire et technique, qui est la garantie suprême de l’indépendance nationale.

Autre élément intangible de l’héritage : la notion d’« intérêts vitaux », qui subsume, avec le flou nécessaire, les différents facteurs qui relèvent de la dissuasion nucléaire : intégrité du territoire national, liberté de décision, voire la menace sur les États qui pratiqueraient le terrorisme ou s’attaqueraient à notre ravitaillement essentiel. En fait les « intérêts vitaux » n’ont pas à être définis à l’avance : ils sont déterminés à tout moment par le président de la République, qui détient seul le feu nucléaire ; ce qui correspond à la pratique, plus qu’à la lettre de la constitution, soit dit au passage, mais depuis que François Mitterrand a proclamé « La dissuasion, c’est moi », cette doctrine n’est plus contestée.

Intangible également le refus d’un quelconque « combat nucléaire » : le seul mode stratégique des armes nucléaires est « la dissuasion ». Ce point n’est pas du tout aussi tranché pour les Américains, et encore moins pour les Russes.

En revanche, d’autres éléments théoriques ont été déjà été révisés ou abandonnés après la fin de la Guerre froide. La doctrine était alors celle de « la dissuasion du faible au fort » : il ne s’agissait pas de menacer l’adversaire de le détruire complètement, mais de lui faire subir des dégâts inacceptables. Cet argument pouvait valoir face à l’URSS, mais n’a plus de sens désormais contre certaines menaces, par exemple celles provenant d’États radicalisés, à l’égard desquels il faut imaginer au contraire une dissuasion « du fort au faible » avec des frappes ciblées !

Pendant la Guerre froide, enfin, un non-dit rétablissait la rationalité d’une doctrine qui sans ce sous-entendu tacite reposait essentiellement sur la perspective d’un suicide national : c’était la notion de « force tierce », selon laquelle l’URSS aurait été obligée de prendre au sérieux notre potentiel, même relativement faible, car en cas de conflit elle aurait été dans un premier temps très affaiblie par les frappes américaines. Le scénario envisagé supposait évidemment que la France ne s’engagerait pas d’emblée dans un conflit nucléaire, mais resterait en quelque sorte dans un premier temps en réserve ; sa position géographique, dans la conjoncture post-1945, le lui permettait… Mais cela n’a plus de sens aujourd’hui.

Le bouleversement

En effet, la fin de la Guerre froide et des deux blocs, les déséquilibres du système international, les innovations scientifiques et techniques, l’informatique, les armes précises, etc., changent la donne. Et de nouveaux problèmes stratégiques sont apparus : les moyens modernes permettent à beaucoup de pays, voire à des États radicalisés, d’exercer un « déni d’accès » empêchant les expéditions occidentales, en menaçant leurs aviations et leurs flottes. Il n’est pas douteux que ces réalités d’aujourd’hui remettent en cause le modèle en fonction duquel avait été pensée la « Force de frappe » et imposent une importante modernisation, matérielle et doctrinale.

L’effort va être considérable : on devrait passer de 3,9 milliards d’euros en 2017 à, en principe, 6 milliards en 2025 pour les forces nucléaires sur un budget total de la Défense d’un peu plus de 31 milliards. Car il faut achever les programmes de renouvellement en cours, qui touchent les vecteurs et les charges nucléaires. Et, en même temps, lancer la préparation de la génération suivante, pour ses deux composantes, sous-marine et aéroportée.

La composante sous-marine, à peu près invulnérable, arme de « la frappe en second », donc par essence arme de la dissuasion, pose le moins de problèmes, y compris sur le plan doctrinal, même si tout est loin d’être réglé. Les quatre SNLE – quatre, de façon à pouvoir en avoir toujours un à la mer – sont en cours de modernisation pour recevoir le nouveau missile M51 – 8000 km de portée au lieu de 6000 et sa nouvelle tête nucléaire. Ce programme sera achevé en 2019. Mais la génération suivante – la troisième – entrera en service à partir de 2035. Il faut donc commencer à la préparer dès 2020. Le nouvel SLNE devrait être développé sans problème majeur, ainsi que les nouvelles versions du missile M 51, avec une portée accrue, une furtivité améliorée et des aides à la pénétration pour échapper aux armes antibalistiques de plus en plus efficaces.

Sous-marins nucléaires - Politique Magazine

Un des quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) en maintenance, afin qu’il y en ait en permanence un en mer.

La composante aéroportée pose beaucoup plus de problèmes. Elle se dédouble entre l’Armée de l’Air et la Marine par son aviation embarquée, avec des avions équipés de missiles pouvant frapper des objectifs « tactiques » ou « stratégiques ». En fait la distinction entre armes « stratégiques » et « tactiques » a disparu, au profit de gammes d’options multiples, dont la frappe d’objectifs précis, comme un abri gouvernemental adverse, ou encore une frappe comportant des effets spéciaux, comme l’impulsion électromagnétique, qui détruit réseaux électriques et informatiques, radio, radar, etc., sans pertes humaines, au moyen d’explosions en altitude.

La modernisation en cours devrait maintenir la composante aéroportée à un niveau efficace jusque vers 2035. Mais, pour « après », il faudra renouveler avion, missile, et tête nucléaire, en fonction des progrès des défenses. On est très loin d’en avoir défini les paramètres et il existe beaucoup d’incertitudes, techniques, financières et stratégiques ; mêmes incertitudes sur les objectifs et l’avenir à long terme de cette composante…

Pourquoi, en effet, une composante aéroportée – que les Britanniques n’ont plus ? Officiellement, pour sa souplesse d’emploi contre des objectifs très différents, et pour les possibilités de « gesticulation » – car un avion est visible et peut être rappelé – qu’elle offre en cas de crise. Ce n’est pas totalement convaincant : les SNLE britanniques couvrent les mêmes types d’objectifs, avec la même souplesse, y compris les cibles précises. Et en ce qui concerne la « gesticulation », en cas de vraie crise, les Alliés nous laisseront-ils gesticuler ? Et oserons-nous le faire ?

Rester crédible : problème politique

En cas de grave crise avec la Russie le scénario est difficile à préciser, mais le concept de la France comme « Puissance tierce » ne s’applique plus. Et face à un État radicalisé et bien armé par ailleurs ? Le concept de « frappes précises » est délicat à afficher… Dans ces deux cas, les plus vraisemblables actuellement, on peine à imaginer et encore plus à proclamer des réactions crédibles.

La France a toutes les raisons de garder des forces nucléaires. Mais la composante aéroportée, en particulier, devra être mieux justifiée, davantage financée, balisée techniquement. Sur le plan stratégique, une manœuvre nucléaire purement nationale n’est plus envisageable dans une crise dans les régions baltes ou autour de l’Ukraine par exemple, dans un contexte très différent de celui de la Guerre froide. Il y aurait alors nécessité à coordonner les capacités et les plans de frappes dissuasives avec les Alliés. Ce qui poserait le problème de l’adhésion de la France au Groupe des plans nucléaires, de l’OTAN, un vieux tabou, ou, alors, nous exposerait à des pressions provenant de Washington, voire de Berlin, en vue d’une coordination de notre Force de frappe avec la politique de défense de l’OTAN ou de l’Union européenne.

Sans oublier que la capacité scientifique et budgétaire de tout continuer seuls n’est pas assurée au-delà de 2035 dans le cadre de notre politique actuelle. Et que restera-t-il pour les autres missions des Armées, qui, elles, ne découlent pas d’hypothèses mais de réalités immédiates ? Et les électeurs resteront-ils toujours insensibles aux sirènes du désarmement nucléaire, surtout si « on » leur tient un discours moins cohérent et assuré qu’à la grande époque de la Ve République, et si « on » n’ose pas nommer les nouvelles menaces et expliquer les nouvelles stratégies ?

Porte avions Charles de Gaulle - Politique Magazine

Rafale embarqué sur le porte-avion nucléaire Charles de Gaulle.

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