Nous avons abondamment célébré les vertus de Mme Sardine Ruisseau, mais il est trop tôt pour en apprécier les fruits.
Heureusement, Mme Ruisseau eut une prédécesseure, ou prédécesrice, ou prédécesseuse (on ne sait plus comment il faut dire), qui, par analogie, nous permettra de deviner un petit peu. Cette ouvreuse de voie, on peut la nommer à peu près Framboise Doltar.
Framboise Doltar fut, avec quelques copains ou émules ou rivaux, la créatrice du concept de l’Enfant-Roi. Il faut, disait-elle dans sa gravité matronesque, écouter les enfants, ne pas les brusquer, ne pas les morigéner, surtout ne pas leur donner de claques, etc., etc. Les enfants ont des droits, beaucoup de droits, clamait-elle dans sa lugubrité de belle-mère.
Un téléphone intelligent pour cerveau
Qu’est-ce que cela a donné ? Des merveilles. D’abord, l’école. Il faut dire que, là, elle a été aidée par de sacrés penseurs, par exemple Pierre Abourdes, du collège de France, et Philou Méiric-Erac, qui avait des titres. Grâce à ces surprenants garçons et d’autres et d’autres, plus de sanctions, d’examens traumatisants, de bonnets d’âne, le bac pour tous, l’intellectualité à portée de toutes les méninges, le mépris pour les professions manuelles qui sont si salissantes, de telle sorte que maintenant, un individu de moins de quarante ans un peu cultivé est un monstre aux yeux de ceux qui ont délégué leur cerveau à leur téléphone intelligent et préfèrent rigoler en boîte.
Autre bienfait, autre merveille : ce que certains vieux croûtons continuent d’appeler délinquance a de beaux jours. « Hé ! dit le petit marrant, moi, moi, moi, j’ai le droit. Le pépé se permet de me dire que je fais trop de bruit, je te le tabasse, je te l’égorge. J’ai le droit. La mémé qui a un porte-monnaie, je lui pique. J’ai le droit. J’ai envie de voir une illumination, je mets le feu…D’ailleurs, le duc Jean Monbouchon, qui a le cœur gros comme ça et la cervelle qui rétrécit, me regarde avec approbation, tendresse, admiration » (1) .
Note 1 : le petit marrant ne dit pas exactement ces trois derniers mots, nous traduisons.
Note 2 : celui qui réussira à comprendre ce que cachent les pseudonymes que nous avons utilisés dans ce texte aura gagné notre estime.
Illustration : Petit Marrant exprime ses opinions et combat l’injustice systémique.