Editoriaux
Cierges et ministres
Il y a une semaine à peine, une grave question agitait le monde politique : qui allaient être les ministres délégués aux Personnes en situation de handicap et aux Anciens combattants ?
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C’est parti. L’année qui vient et qui mène à l’échéance présidentielle dans douze mois ressemblera à celle qui s’achève. En pire. Dans une atmosphère plus tendue, dans un environnement aggravé.
Il faut s’attendre à une détérioration du climat social et à une multiplication des révoltes de quartiers autant que des violences collectives et individuelles. Les services concernés le savent parfaitement. Un Xavier Raufer en a analysé avec justesse les raisons ; et les faits ont toujours vérifié ses diagnostics et ses pronostics. Comme il le montre dans son dernier livre, au-delà des dérives individuelles, demeurent les stratégies d’État et de déstabilisation universelle dont le djihad est l’instrument. (à qui profite le djihad ? Xavier Raufer, Cerf 2021). Ce n’est donc qu’un début.
L’accélération de la dégradation générale est vertigineuse ; il n’est pas un agent des renseignements qui n’en ait conscience. Mais il est interdit de le signaler officiellement. Les fonctionnaires habilités gardent pour leur service les informations, quitte à en discuter entre eux. Il s’agit de ne pas affoler les citoyens en cette période difficile et c’est un choix du gouvernement ; la population est déjà suffisamment perturbée par la crise sanitaire dont le chef de l’État fait son affaire personnelle. Il veut être en 2022 Macron le Victorieux de la Covid, ce qui le placerait en père de la patrie ! D’où le tout sanitaire. La question sécuritaire ne saurait être abordée de face et avec détermination pour le moment : trop de dangers électoraux, donc à reporter après l’élection. L’assassinat de Rambouillet est minimisé, comme tout le reste qui n’est pas su sur l’état réel des banlieues et des réseaux islamisés qui alarment pourtant les services concernés du renseignement et de la lutte contre le terrorisme. Laurent Nuñez est à la manœuvre. La DGSI reçoit ses ordres. Comme les services de police et de gendarmerie qui en savent quelque chose, tout en rechignant. Les gens avertis – et il y en a – savent à quoi s’en tenir, à la manière d’un Stefanini ; il n’y a pas que lui !
Toutefois, rien ne sert à rien, comme eux-mêmes le confessent, sans vraiment oser le dire. République oblige ! Toutes les causes sont archi-répertoriées et depuis longtemps et font partie essentiellement de nos faiblesses institutionnelles, légales, juridiques et judiciaires. Ce, sur tous les plans, de l’immigration à la nationalité, de la criminalité organisée à la déroute de l’autorité, de la complaisance idéologique et administrative à l’impossibilité pour les services, sauf exception, de faire leur travail véritable. Cependant que dans les micros officiels ne s’expriment que les gens missionnés pour rassurer et faire croire que la situation est sous contrôle. Il n’y aura pas à s’étonner des conséquences. Sans concrètement que rien soit fait, sauf à renforcer les dispositifs de surveillance et, dans la mesure du possible, d’encadrement et de renforcement : totalement dérisoire ! Les syndicats de police sont les premiers à dénoncer ces fausses réponses qui, souvent, ne font qu’empirer leur position et accroître les risques. Comme à Viry-Châtillon où des policiers supplémentaires étaient chargés de surveiller la surveillance !
Le clan Macron, c’est-à-dire la petite bande qui dirige vraiment le pays – les ministres techniciens n’étant en charge que des aspects techniques de leur fonction –, mène sa stratégie en vue de 2022. La carte électorale de la sécurité ne sera jouée par les institutions en place qui sont à la disposition de l’État, que lorsqu’elle sera jugée opportune. Si c’est nécessaire au moment de passer le cap, le seul point de visée, sans donner à l’avance du grain à moudre à l’opposition nationale, unique souci de la manœuvre macronienne.
Tel est le plan. Et, en attendant, il faut faire des phrases et des tweets. « Nous ne céderons pas ! » proclame Macron. Les Français connaissent la chanson. Depuis des années ! Paroles vaines ! D’ailleurs, les gens qui ont bonne mémoire se souviennent que Mitterrand, ministre de l’Intérieur, lors des crimes terroristes en Algérie en 1954-1955, prononçait les mêmes mots. Exactement les mêmes ! Comme Chirac cinquante ans après ! La République a tout cédé et continûment, en abandonnant en surplus aux tueurs les populations qui faisaient confiance à la France. Terrible leçon qu’il convient aujourd’hui de méditer ! Tout peut recommencer. À l’identique.
Pour faire semblant d’agir et apaiser quelque peu l’opinion, voilà que Darmanin et Nuñez vont mettre sur la table du Conseil des ministres un nouveau projet de loi afin d’améliorer pour la nième fois la sécurité des Français, en ajoutant quelques mesures coercitives de perquisitions et de suivis et en usant d’algorithmes pour prétendument mieux repérer l’adversaire multiforme par l’analyse des données. Rien que du défensif comme toujours et qui ne fera que confirmer ce que l’on sait déjà, sans aucune décision effective de reconquête et, surtout, de salut national. Rien ! L’accumulation des lois dites de sécurité – une bonne vingtaine en vingt ans –, avec encore les dernières votées ces derniers mois, l’une dite de sécurité globale –dont les énoncés sont contradictoires ! –, l’autre dite de renforcement des principes républicains – quel titre absurde ! –, à quoi s’ajoute maintenant ce nouveau texte en préparation, suffit à prouver l’incapacité des gouvernements successifs et surtout de l’État macronien de résoudre la question ou, du moins, d’apporter des solutions efficaces. La nullité est ici, comme ailleurs, comme dans tous les domaines qui relèvent aujourd’hui de l’État, au niveau de la doctrine même de l’État et de sa pratique, ce qui engage la légitimité de ceux qui détiennent la puissance publique et qui ne savent plus en user au service des Français. Il ne s’agit pour eux que de conquérir le pouvoir, de le conserver et, comme ils s’en croient les maîtres, de façonner la France au gré de leur chimère. Et Dieu sait si Macron a l’esprit rempli de chimères !
Les agitations de Darmanin, les déclarations de principe, les cérémonies d’hommage à répétition qui ne font qu’épuiser la compassion, la communication à outrance, les baratins aussi verbeux qu’inutiles des uns et des autres, du moindre journaleux au dernier des politiciens, l’Exécutif qui navigue à vue, uniquement en fonction de la future réélection, des parlementaires qui, pour la plupart, n’y comprennent rien, des magistrats qui, tout en revendiquant leur indépendance, sont concrètement par leur conception même les complices des criminels et, qu’ils le veuillent ou non, les instigateurs de la criminalité, comme ne le montrent que trop toutes les dernières décisions de justice, avec un garde des Sceaux qui, à force de démagogie, n’a plus aucun sens de sa fonction, son énorme moi étant sa seule finalité, tout cet ensemble qui ne peut que soulever l’indignation de ceux qui gardent encore un cœur français, ne saurait en rien changer la ligne implacable des événements. La France va s’enfoncer dans une crise durable, effroyablement longue, pas seulement sur la question sanitaire, mais plus fondamentalement sur les questions sécuritaires, politiques, bientôt économiques et sociales et, nécessairement, financières. Le personnel politique est tel qu’elle ne peut plus avoir les ressorts nécessaires pour une forte et salutaire réaction. Il va se poser logiquement un problème de légitimité lors de la présidentielle, quoi qu’il arrive par ailleurs. Dans les votes mêmes et dans les résultats. Un délitement s’ensuivra. Avec des risques de rébellion caractérisée, comme il arrive déjà maintenant dans toutes les agglomérations.
Le régime républicain, en tant que tel, a donné trop de gages à l’ennemi de la France, par une sorte de connaturalité. « La République en France est le règne de l’Étranger. » Jamais le mot de Maurras n’a été si vrai. Macron est le prince d’une France qui n’est plus la France et dont il ne veut plus qu’elle soit la France. Pan après pan, le pays est détruit, loi après loi, toutes plus absurdes les unes que les autres pour satisfaire des idéologues et des rhéteurs : agriculture, industrie, commerce, vie sociale, tout y passera. Cependant que la préoccupation des belles âmes « progressistes » est de légaliser de toute urgence toutes les morts possibles et imaginables, l’enfant jusqu’à neuf mois, le malade, le déficient mental, le simple dépressif et le vieillard au nom d‘une généreuse euthanasie. C’est le nec plus ultra de la société dont rêvent nos nouveaux apôtres. Leur secte est à la manœuvre. Et pas une voix morale, pas une voix religieuse qui s’élève !
Est-ce trop tard ? Il est inutile d’épiloguer. Une constatation simple s’impose : malgré ses grands principes républicains – tous inadaptés, inintelligents et contradictoires au regard d’un simple esprit raisonnable, cause directe de notre décadence –, la France est une société divisée, parcellisée, « archipellisée » comme il a été justement dit, et, surtout et de plus en plus, en conflit interne permanent, social, intellectuel, matériel, spirituel, moral, religieux, politique. L’État n’y peut plus rien. Il est encore quelques maires, quelques élus, quelques préfets, quelques administrateurs pour tenter de réagir : tous conviennent en privé qu’ils ne sont pas réellement soutenus. Affaire de régime et de logique de régime. Il faudra bien un jour, dans un désastre inéluctable, que cette évidence apparaisse dans toute sa cruauté. Car le plus terrible tient dans la mécanique institutionnelle : de manière monstrueuse mais, pourtant, normale, pareille situation est psychologiquement et, hélas, politiquement propice à la confrontation électorale. C’est ainsi ; nos institutions fonctionnent sur ce schéma de guerre civile larvée. Nul ne peut rien contre ce phénomène : la démocratie a besoin de tragédie ; elle s’en repaît. Le drame lui fournit ses ressorts et ses argumentaires. La querelle sur l’appel des militaires en est une illustration.
Qu’y peut-on ? Le chef de l’État lui-même ne sait pas ce qu’est la France. Non seulement il ne la connaît pas, mais il ne l’aime pas, il la méprise, et ses conseillers vont dans le même sens. Il la laisse insulter sans protester par des faquins qui n’existent en réalité que par elle et qui la définissent comme leur ennemie éternelle. Plus grave, il la couvre d’ignominie lui-même, croyant bon d’en rajouter sur des crimes qui lui sont injustement et inégalement imputés. Il n’a pas hésité encore à affirmer devant une journaliste américaine que « nous devons déconstruire notre propre histoire ». Il eut beau gloser par la suite sur son propos, les Français de bon sens ont bien compris que la France dans son esprit n’était jamais que son idée à lui, celle qu’il s’en faisait, et qu’il voulait la refaçonner entièrement selon sa conception personnelle qu’il juge supérieure, tel un despote éclairé qui se prend pour un démiurge, en essayant de purger la France, enfin et idéalement, de ce qu’il pense être ses tares indélébiles et ses fautes obsessionnelles. Ce chef de l’État n’est pas à sa place. Il est indigne de sa fonction.