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Un singe en hiver

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Un singe en hiver

Soulographie cinématographique plus qu’attachante, Un Singe en hiver compte, sans nul doute, parmi les meilleurs films de la longue et inégale filmographie belmondienne. Adapté du roman du même nom d’Antoine Blondin, il a bénéficié d’un quinté immanquablement gagnant, tant l’alchimie s’est révélée aussi rare que concluante. D’abord, un auteur, estampillé « hussard » par le journaliste Bernard Frank, alors secrétaire de Jean-Paul Sartre. Par là voulait-il signifier que sévissait au sein de la république des Lettres un quarteron de « fascistes » dont Félicien Marceau dira que ce qui les unissait était tout à fait étranger à la politique, mais participait d’un « irrespect pour les tabous de l’époque, le dédain des doctrines, le goût d’une écriture vive, rapide, volontiers insolente, une certaine manière de prendre la littérature comme un plaisir plus que comme un devoir ». Bref, le style, en l’occurrence, était représenté par des écrivains aussi dissemblables que Michel Déon, Roger Nimier, Jacques Laurent, Antoine Blondin, auxquels on pourrait ajouter Jacques Perret, André Fraigneau ou encore Kléber Haedens. Ensuite, un cinéaste, Henri Verneuil qui avait déjà connu moult succès en dirigeant Fernandel à plusieurs reprises (La Table-aux-crevés, Le Boulanger de Valorgue, Carnaval, L’Ennemi public numéro un, Le Mouton à cinq pattes, La Vache et le Prisonnier). En 1961, la MGM lui commande trois productions qui seront trois chef-d’œuvre, tous avec Jean Gabin, les deux autres, successivement avec Belmondo et Alain Delon : Le Président (1961), Un Singe en hiver (1962) et Mélodie en sous-sol (1963). Trois énormes succès auxquels le troisième de ce jubilé mémorable, Michel Audiard et ses répliques jubilatoires, ne contribuèrent pas peu : « Dis-toi bien que si quelque chose devait me manquer, ce ne serait plus le vin, ce serait l’ivresse ! » (Jean Gabin à Suzanne Flon) ; « Vous avez le vin petit et la cuite mesquine. Dans le fond, vous ne méritez pas de boire ! » (Jean Gabin à Paul Frankeur) ; « Monsieur Hénault, si la connerie n’est pas remboursée par les assurances sociales, vous finirez sur la paille » (Belmondo à Paul Frankeur). Quatrième, et non des moindres, dans cet attelage qui en contient cinq, Jean Gabin. Immense vedette avant-guerre (La Bandera, La Belle équipe, Pépé le Moko, tous de Julien Duvivier, sans oublier La Grande Illusion et La Bête humaine de Jean Renoir), Gabin saura négocier le second tournant de sa déjà prestigieuse carrière avec des films mythiques tels que Touchez pas au grisbi de Jacques Becker (1954), La Traversée de Paris (1956) ou En cas de malheur (1958) de Claude Autant-Lara. Sur le plateau d’Un Singe en hiver, il se liera d’amitié avec Bébel : « Embrasse-moi, mec. T’es mes vingt ans ! », lancera-t-il à Gabriel Fouquet-Belmondo. Quant au cinquième, Jean-Paul Belmondo, on peut dire que depuis À bout de souffle (1960) de Jean-Luc Godard, il est quasiment devenu incontournable, enchaînant à un rythme effréné des succès souvent synonymes de véritables réussites et souvent filmés par des maîtres authentiques : Classe tous risques de Claude Sautet (1960), La Ciociara de Vittorio De Sica (1960), Léon Morin, prêtre (1961) et Le Doulos (1962) de Jean-Pierre Melville, Cartouche de Philippe de Broca (1962). Celui qui commence, alors, à devenir l’un des acteurs les plus populaires du cinéma français ne s’arrêtera plus. Avec Un singe en hiver, il rentre pour la postérité dans le club très fermé des « patrons » que seront Gabin, Bernard Blier, Alain Delon, Lino Ventura. Film nostalgique s’il en est, l’œuvre n’offre pas simplement à voir une transmission de témoin générationnel, mais prend date d’un changement d’ère. Si Gabin-Quentin représente incontestablement la France d’avant-guerre, ses usages et ses valeurs surannées, Belmondo-Fouquet symbolise, quant à lui, par sa profession (publicitaire), son statut erratique et désespéré de père maritalement séparé, comme par l’objet de sa visite (la récupération de sa fille pensionnaire), le passage vers une modernité individualiste, hédoniste et consumériste que Mai 68 allait tumultueusement revendiquer. Les vieux singes allaient demeurer dans l’hiver, quand les jeunes coqs partiraient en quête d’éternels printemps…

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