Tribunes
Que faire ?
Adieu, mon pays qu’on appelle encore la France. Adieu.
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L’arme atomique a modifié en profondeur l’art de faire la guerre, c’est-à-dire qu’elle a bouleversé la diplomatie.
Avec Hiroshima et Nagasaki, la preuve est faite qu’un pays peut annihiler d’un coup une population civile et ruiner en un instant une ville entière sans plus s’inquiéter de savoir s’il élimine des combattants ou de simples civils. C’est le temps de l’équilibre de la terreur, où on se dissuade mutuellement. Le pape François vient de déclarer que la chose était inadmissible. Le Vatican avait déjà des doutes sur la légitimité d’une telle diplomatie, et sur la pertinence de tels fondements dans les relations humaines. On peut néanmoins considérer que la posture récemment adoptée est problématique car elle suppose un monde doublement parfait, où celui qui désarme est assuré de ne pas s’exposer et où aucune arme ne serait aussi dévastatrice qu’une tête nucléaire. Pour ce qui est de la sûreté du monde contemporain, l’actualité des cinquante dernières années nous prouve qu’elle est loin d’être acquise : le pape, en répondant aux journalistes, a néanmoins déclaré que la “simple” possession d’armes atomiques est une immoralité que le catéchisme condamnera ; et pour ce qui est de la nocivité spécifique de l’arme atomique, les bombardements conventionnels (dits « stratégiques ») qui ont ravagé le Japon avant Hiroshima et Nagasaki ont fait plus de victimes. La fascinante horreur d’une destruction immédiate par l’effet d’une seule bombe suffit-elle à ne pas penser toute la guerre et toutes ses horreurs ? Ou cet appel du pape ne serait-il qu’un élément de plus dans sa promotion d’un ordre international totalement affranchi des nations ? Remarquons au passage que le pape fustige « l’hypocrisie de ceux qui produisent des armements, pays chrétiens ou au moins de culture chrétienne, pays européens ou de culture européenne », ce qui revient à valider l’idée d’un catholicisme culturel, dont on nous assure par ailleurs qu’elle est une abomination… Au-delà de l’examen des propos du pape, il nous est donc apparu nécessaire de traiter le sujet de la dissuasion nucléaire de la France, pays « au moins de culture chrétienne », bien qu’il s’en défende : avons-nous la volonté et les moyens de poursuivre notre politique de dissuasion nucléaire ? Et, surtout, nous avons voulu reposer la question de la guerre juste. Le sujet des moyens guerriers en est l’un des aspects, la finalité de la guerre en est un autre, et on pourrait presque poser la question de la paix juste.