Sylvester et Rose Mason exerçaient une curieuse profession : ils se prétendaient capables de délivrer personnes possédées et lieux hantés. Malgré les mises en garde des autorités religieuses et les railleries dont il faisait l’objet, le couple était parvenu à une immense notoriété. On le consultait des quatre coins des États-Unis. Jusqu’à ce soir d’hiver où, piégés par un de leurs « clients », ils ont été froidement abattus presque sous les yeux de Sylvie, leur fille de quatorze ans.
Désormais livrée à des services sociaux incapables de rien comprendre aux dessous de cette affaire singulière et à Rose, sa sœur aînée devenue sa tutrice mais qui a joué un rôle trouble dans la mort de leurs parents, Sylvie décide de découvrir la vérité sur ce drame. Cette enquête, entravée par le mauvais vouloir de sa sœur, les difficultés quotidiennes, les brimades de leur communauté, et les inquiétants événements dont le sous-sol de la demeure familiale semble le théâtre, obligera l’adolescente à se pencher sur les personnalités et les parcours d’un père et d’une mère infiniment moins lumineux qu’elle se l’imaginait. Mais, si l’approche de la vérité s’avérera douloureuse, elle va aussi mettre en péril la vie de la jeune fille.
De prime abord, ce pourrait être un roman fantastique de bonne facture, avec fantômes, démons, possédés et objets maléfiques chargés d’ondes mortifères ; cependant, après avoir dressé de main de maître ce décor de film d’épouvante, Searles, avec une habileté machiavélique, va travailler à le déconstruire et ramener peu à peu sa jeune héroïne à une vision tristement prosaïque et désenchantée du monde qui l’entoure. De cette quête initiatique, Sylvie Mason émergera adulte et lucide. Et les amateurs de frissons gothiques affreusement déçus !

John Searles : Pitié pour leurs âmes, Lattès ; 445 p ; 20,90 €