Civilisation
Vauban pour toujours
1692, le duc de Savoie franchit le col de Vars, emporte Embrun, puis Gap. Louis XIV demande à Vauban de fortifier le Queyras.
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Hormis quelques spécialistes, l’on ignore, en France, la littérature grecque contemporaine, et qu’elle compte d’étonnants auteurs de romans policiers. La preuve en est brillamment administrée par cette Nostalgie des dragons au titre singulier et au contenu plus singulier encore.
Ancien résistant, ancien militant communiste, ancien prisonnier sous les colonels, le professeur Ion Dragonas, jadis anthropologue mondialement apprécié, ne s’intéresse plus à rien depuis la mort de sa femme ; et surtout pas au stupide Musée de la Préhistoire, établissement vétuste auquel l’État n’accorde pas un sou, dont il est le conservateur.
Désintérêt universellement partagé jusqu’au jour funeste où la presse révèle la disparition, que Dragonas n’avait même pas remarquée, d’une momie délabrée qui pourrissait dans un sous-sol et que la rumeur prétend soudain la plus vieille jamais découverte … Bouc émissaire rêvé de l’impéritie étatique, le malheureux universitaire est accusé d’avoir, par négligence, privé la Grèce de cet inestimable trésor ; ou d’être complice des malfaiteurs.
Désireux de laver son honneur, Dragonas, escorté d’une jeune inspectrice, fille, ce qui n’arrange rien, du policier qui le fit emprisonner autrefois, se lance dans une course folle à travers l’Europe à la recherche de sa momie perdue. Hélas, Ibycos, comme il avait surnommé l’antiquité, oublié des millénaires, semble maintenant convoité par tous les fous de la planète. Traqué par des mafieux, des adorateurs de la Lune adeptes du suicide collectif, des groupes paramilitaires balkaniques, des descendants supposés des Néanderthaliens décidés à obtenir réparation pour le premier génocide de l’humanité, et une société secrète visant l’hégémonie mondiale, Dragonas risque sa peau à chaque étape de cette chasse au trésor délirante au cour de laquelle cet éternel innocent peine à distinguer, sous leurs masques tragiques ou farfelus, amis et ennemis.
Il y a l’intrigue policière sur fond de mystère archéologique, évidemment, bien bâtie et qui donne envie d’en connaître le dénouement, mais il y a surtout une réflexion, amère et profonde, sur la condition humaine, l’engagement politique, l’amour, la mort, la jeunesse enfuie, l’amitié perdue, la liberté, qui fait de Kourtovik tout simplement un grand romancier
Démosthène Kourtovik : La nostalgie des dragons
Actes Sud Babel Noir ; 400 p ; 9,70 €.