Dans un bar d’Amsterdam, Jean-Baptiste Clamence, ancien avocat se définissant juge-pénitent, livre à un interlocuteur invisible une confession. Tyrannisé par le souvenir d’une jeune fille qu’il n’a pas tenté de sauver d’une noyade, il vit emmuré dans le remords. Dans son récit, cet ancien avocat, vaniteux, égocentrique, à qui tout réussit, défendant ses clients sans les juger, se croit lui-même hors d’atteinte et supérieur jusqu’à cet évènement tragique qui lui renvoie l’image d’un lâche. « Tout homme, dit-il, quelle que soit son excellence, connaît toujours un moment de chute ». Avoir assisté avec indifférence au suicide de cette femme sera le début de la chute de Clamence. Ce monologue calculé entre le narrateur et l’interlocuteur (en fait, nous) est un miroir tendu et une attaque en règle de l’homme face au contraste de son image publique et de son moi profond. La mise en scène de Géraud Bénech bouleverse et questionne : quel sens donner à sa vie après une telle faute ? Stanislas de la Tousche, en sachant instiller ce malaise existentiel jusqu’au bout, interprète son personnage à la perfection : « Ô, jeune fille, jette toi encore dans l’eau pour que j’aie une seconde fois la chance de nous sauver tous les deux ! […] Mais il est trop tard, il sera toujours trop tard ».

Théâtre de la Contrescarpe. 5, rue Blainville, 75005 Paris. Réservation : 01 42 01 81 88

Illustration : ©Fabienne Rappeneau