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« Je veux chanter l’enclos de la terre habitée »

Au IIe siècle après Jésus Christ, Denys d’Alexandrie décrit en un poème savant la terre des Grecs, des Romains et des barbares.

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« Je veux chanter l’enclos de la terre habitée »

“Décrire” est un terme impropre : il compile les récits des voyageurs et la géographie des mythes, il rassemble ce que l’on sait du monde mais surtout ce que l’on doit en savoir quand on est érudit. L’ouvrage fut étudié, considéré comme un traité de géographie, enseigné par les Jésuites et Bénigne Saumaise, aimable magistrat bourguignon fidèle à Henri IV en donna une traduction charmante au XVIe siècle. Traduction que Christian Jacob a déterré et ajouté à la sienne, après une belle introduction. Les noms s’enchaînent, l’Amérique n’existe pas, ni le cap de Bonne-Espérance, mais on nous parle des Scythes, des Chorasmiens, des Tokhariens et des Sères, « qui tissent les fleurs bigarrées de leur terre déserte ». Ce qui deviendra, sous la plume de Bénigne : « Leurs délicates mains n’ont point d’autre exercice / Qu’à cueillir souplement d’un soigneux artifice / Tout un fleuri printemps et d’un plaisant travail / À peigner et carder le doux-flairant émail / De mille et mille fleurs et de l’honneur des prés, / Titre mignardement des robes bigarrées […] » Bénigne s’emporte, amplifie démesurément le texte grec et y projette ses rêveries de Français de la Renaissance, alors que les poètes de la Pléiade ont installé un nouvel art poétique. La traduction de Jacob, fidèle sans sècheresse, a elle aussi des charmes puissants car sa fidélité nous restitue une peu de cette âme alexandrine : « Non, on ne pourrait blâmer les femmes qui, autour de ce divin séjour, une ceinture d’or sur la hanche, dansent en tournoyant une ronde admirable […], avec elles aussi, de jeunes vierges bondissent comme des faons ; des brises sonores agitent leurs charmantes tuniques » (il faut dix-huit vers à Bénigne pour dire la même chose). Comment ne pas, à la suite de Jacob, et tenant ferme sa traduction comme guide, se laisser emporter par le Bourguignon qui voyait voler les robes des Lydiennes ?

 

Denys le Périégète, La Description de la terre habitée. Introduction, traduction et notes par Christian Jacob. Les Belles Lettres, 2024, 262 p. ; 25 €

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