Être flic à Moscou en 1937 en pleine terreur stalinienne n’est pas un métier de tout repos, Alexei Korolev en sait quelque chose, lui qui a une fâcheuse tendance, par souci de la justice, à fourrer son nez dans des affaires gênantes.

De récents ennuis avec le NKVD où il avait failli laisser des plumes lui avaient pourtant fait jurer de ne pas recommencer. Mais il y a des gens doués pour s’attirer les ennuis et Korolev, à l’évidence, en fait partie.

Lorsqu’il a été appelé dans un immeuble huppé réservé à l’élite de la Nomenklatura où l’on vient de découvrir le cadavre d’un éminent scientifique, assassiné, et que ses copains de la Sécurité d’État ont aussitôt déboulé sur les lieux en interdisant à la Milice de se mêler de l’histoire, il a obtempéré, jusqu’au moment où un second meurtre de scientifique l’a remis en selle. À son vif déplaisir. D’abord parce que les deux victimes, spécialistes des manipulations mentales et du lavage de cerveau, étaient deux ordures se servant d’enfants des rues pour cobayes de leurs expériences démentielles, et qu’il les aurait volontiers tués lui-même ; ensuite parce que le NKVD, mouillé jusqu’au cou dans les recherches douteuses des pseudo-médecins, le tient à l’œil et que, pour s’assurer sa docilité, il a enlevé Youri, le fils unique de Korolev, et menace de le soumettre au fameux programme de rééducation par effacement de la mémoire si son père ne retrouve et ne leur remet certain dossier compromettant …

L’on n’avait pas encore pensé à situer une intrigue policière dans le Moscou de Staline et à confronter un flic honnête, resté secrètement attaché aux principes de son éducation orthodoxe, aux atrocités du monde soviétique. C’est fait, assez bien d’ailleurs, même s’il manque à l’Irlandais Ryan d’avoir connu de l’intérieur un tel régime dont la reconstitution demeure fatalement un peu superficielle.

William Ryan : Les enfants de l’État, 10-18 ; 445 p . 8,40 €