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2001, L’odyssée de l’espace

Objet cinématographique soumis à un processus perpétuel d’identification philosophique, scientifique et artistique, 2001: A Space Odyssey a acquis, depuis sa sortie en 1968, le statut de film culte, ayant même fait son entrée à la bibliothèque du Congrès des États-Unis.

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2001, L’odyssée de l’espace

À la manœuvre, Stanley Kubrick (1928-1999), cinéaste dont chaque film, ou peu s’en faut, s’est révélé être un chef-d’œuvre, ce depuis son deuxième long métrage (le premier, Fear and Desire, avec Paul Mazursky dans le rôle-titre, film de guerre tourné en 1953 avec un très petit budget, fut quasiment renié par Kubrick, lors même que tout le savoir-faire du réalisateur s’y trouvait déjà), Le Baiser du tueur (1955), un thriller urbain inventif et rondement mené tout comme le suivant, L’Ultime Razzia, sorti en 1956.

À partir de là, Kubrick manifestera un éclectisme qui le portera à s’investir dans à peu près tous les genres : le film de guerre, à nouveau, avec Les Sentiers de la gloire (1957, avec Kirk Douglas qui en assurera la production), le péplum à grands spectacle avec Spartacus (1960, toujours avec Kirk Douglas, acteur et producteur, entouré de Tony Curtis, Jean Simmons, Laurence Olivier, Charles Laughton et Peter Ustinov), le drame sociologique avec Lolita (1962, inspiré du roman éponyme de Vladimir Nabokov, avec James Mason et Sue Lyon), la comédie avec Docteur Folamour (1964, avec Peters Sellers endossant des rôles multiples, George C. Scott et Sterling Hayden), la science-fiction avec 2001, l’anticipation dystopique avec Orange Mécanique (1971, tiré du roman d’Anthony Burgess, avec un Malcolm McDowell sadique et manipulateur à souhait), la fresque historique avec Barry Lyndon (1975, avec Ryan O’Neal et Hardy Krüger), le film d’horreur à huis clos avec Shining (inspiré du roman de Stephen King avec Jack Nicholson, névropathe halluciné et dérangeant poursuivant de ses assiduités destructrices une Shelley Duvall diaphane et apeurée), une nouvelle incursion dans le film de guerre avec Full Metal Jacket (1987, avec Matthew Modine et Adam Baldwin) et enfin le drame psycho-érotique avec Eyes Wide Shut (1999, d’après une nouvelle d’Arthur Schnitzler avec Tom Cruise et Nicole Kidman, alors au bord du divorce).

On le voit, la filmographie de Kubrick est aussi brève que dense mais littéralement caractéristique d’une œuvre, d’un style et d’un univers. Il était le type même de l’artisan méticuleux, sachant tout faire ou presque sur un plateau, vétilleux à l’extrême, y compris dans la post-production (il aménagera chez lui une salle de projection en 35 mm).

Sur le plan formel, 2001 est un film esthétique et métaphysique où les personnages comptent peu face à l’infini du cosmos et aux interrogations philosophiques qu’il suscite. L’on ne reviendra pas sur les ballets spatiaux somptueusement orchestrés sur Le Beau Danube bleu de Johann Strauss fils (sans oublier le générique du début et des commencements de l’humanité, servi par le poème symphonique nietzschéen, Ainsi parlait Zarathoustra de Richard Strauss). Inspiré de deux nouvelles d’Arthur C. Clarke, (À l’aube de l’histoire et La Sentinelle) qui participera au scénario (tout en écrivant, en parallèle, son roman 2001 l’Odyssée de l’espace, à la fois issu du film mais indépendant de lui), le film est entièrement tourné en Angleterre en Cinerama. De l’aveu même de Kubrick, 2001 se présente comme une création d’« expérience visuelle, qui contourne l’entendement et ses constructions verbales, pour pénétrer directement l’inconscient avec son contenu émotionnel et philosophique. J’ai voulu que le film soit une expérience intensément subjective qui atteigne le spectateur à un niveau profond de conscience, juste comme la musique ». Pour notre part, bien loin des évocations habituelles d’une entité extra-terrestre ayant positivement influencé le développement de l’humanité, nous y avons toujours vu une parabole divine, l’approche théologique s’ordonnant d’ailleurs harmonieusement autour de conjectures astrophysiciennes. Qui ne verrait, en effet, dans l’ultime et tourbillonnant voyage « au-delà de l’infini » entrepris par Dave Bohman, une tentative d’exploration des confins mystérieux de l’univers, par-delà l’infranchissabilité quantique du « mur de Planck », jusqu’aux premières milliardièmes de nanosecondes de la « singularité initiale », ce point euclidien hypothétique d’une densité inimaginable qui nous séparerait de Dieu… Cette pensée, vertigineuse en soi, constitue, sans nul doute, le meilleur scénario de ce film inouï aux multiples interprétations…

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