Civilisation
Guynemer, premier chevalier du ciel
Un héros bien français, tel qu’en lui-même, au-delà de la légende.
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Encore à propos de Guynemer, Quatre questions à Christophe Soulard-coutand
J’ai lu avec le plus vif intérêt votre magnifique biographie Guynemer, la légende et le mystère. Dites-nous la raison de votre prédilection pour ce chevalier du ciel, ce que vous aimez dans sa personnalité singulière.
Mes parents possédaient une bibliothèque dans laquelle trônait un ouvrage sur les héros français : parmi eux, saint Louis, Louis XIV, Guynemer, Mermoz, etc. Si je reste très attaché aux deux premiers, je le suis également aux deux autres. Tous les héros sont des pionniers, des conquérants, des personnages extraordinaires, avec une force d’âme, du caractère, une envie et un objectif. Celui de Guynemer était de défendre son pays, au risque de sa vie.
Il y eut d’autres héros, côté français, côté allemand aussi. Vous les évoquez tous. Vous notez leur singularité, leurs rapports tumultueux. Mais Guynemer est « à part », n’est-ce pas ?
Oui, il est à part dans le sens où il est le premier aviateur à être autant “médiatisé” de son vivant. C’est l’un des points saillants de mon ouvrage. Dès qu’il dépasse les cinq victoires, ce qui fait de lui un as de l’aviation, la presse lui donne déjà ce qualificatif de « héros ». Il est vrai que la durée de vie d’un aviateur ne dépassait pas deux à trois semaines… Il est à part parce que c’est un jeune homme, avec la foi chrétienne et patriotique chevillée au cœur et au corps, qui n’aurait jamais dû faire la guerre. Il a été ajourné six fois en raison de sa constitution physique trop fragile. La Providence a fait en sorte qu’il réalise son rêve en faisant de lui une véritable légende.
Légende, oui, mais laquelle ? Car elle fut nationale, même internationale. Une vocation ? Qui a entraîné d’autres vocations ?
Guynemer, c’est un destin, c’est une légende dans le sens où acteur de sa vie, il a également su transmettre sa passion, avec bienveillance, aux nouveaux pilotes qui arrivaient dans son escadrille. Le matin de sa mort, le commandant Brocard était venu le chercher pour le transférer dans un poste moins exposé. Guynemer savait pourtant qu’il n’était pas invulnérable. Il a été descendu au moins sept fois par des ennemis. Bien que n’étant pas l’as des as, titre qui revient à René Fonck avec 75 victoires, Guynemer reste le modèle par excellence. Au point que tous les 11 septembre, dans toutes les bases aériennes françaises, on lui rend encore hommage. Mais sa mort restera à jamais un mystère.
Mystère ? Bien sûr, de sa mort ?
Mais au-delà ? Quelle conclusion ?
Guynemer n’a pas été qu’une comète dans le ciel de France ou de Belgique. Il nous a légué deux enseignements qui mériteraient d’être gravés au fronton de bien des édifices. Le premier est : « Faire face ». C’est sa devise, reprise depuis par l’armée de l’air. Le second est une phrase qu’il aimait répéter : « Tant qu’on n’a pas tout donné, on n’a rien donné ». Georges Guynemer, descendants des rois de France par les femmes, a donné sa vie.
Guynemer, le mystère et la légende
de Christophe Soulard-coutand
Édition du Félin, 304 p, 12€