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Lampedusa : quelle honte ?

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Lampedusa : quelle honte ?

Réflexion à propos de réactions journalistiques sur le drame de Lampedusa.

Il y a des mots malheureux : le mot honte en est un, et doublement, car il exprime un sentiment pénible, empreint d’humiliation et d’infériorité, et aussi un état, proche du déshonneur. Ce n’est pas un sentiment élevé : celui qui a honte se sent abaissé, il a envie de se cacher, de rester immobile loin des regards. En effet, la honte est aussi un statut : celui qui est objet de honte ne peut échapper au mépris, il est « montré du doigt », on l’évite, il n’est plus fréquentable.

Ainsi, les Occidentaux, face à la terrible tragédie de Lampedusa sont sommés d’avoir honte, et leur réputation qui est déjà mauvaise, tend vers l’exécrable.

Pour aggraver l’affaire, le sinistre tocsin de la honte est souvent sonné en pareil cas par de véritables professionnels de la haine de soi, qui pullulent dans les médias en particulier. Et par un singulier paradoxe, ce sont souvent les mêmes fossoyeurs de l’honneur qui gémissaient voici peu parce que l’on tardait à « punir » la Syrie de Bachar el Assad…

Etablir les responsabilités, et tirer les enseignements d’un phénomène-évènement tel que celui-ci dépasse largement le niveau de l’anathème ordinaire du thuriféraire de la mauvaise conscience de l’Occident ; il s’agit d’une situation extrêmement grave, qui ressortit à des responsabilités collectives à la fois historiques et planétaires, qui requiert des décisions courageuses à prendre à la faveur d’une concertation internationale allant totalement à contre-courant du jeu politique classique et des égoïsmes nationaux traditionnels : que peut apporter de dynamique la honte ressentie ou infligée dans une telle conjoncture ?

La richesse et la puissance de l’Occident au sens large lui confèrent une lourde responsabilité, on ne saurait le nier ; ce qui lui reste de valeurs chrétiennes également, car il convient tout de même de rappeler que le découvreur et le propagateur des notions de personne, de dignité humaine, de charité, c’est l’Occident chrétien, même s’il est aujourd’hui rongé par l’individualisme, l’hédonisme et autres abcès purulents…

Bien au rebours du pitoyable et masochiste repli sur une misérable impuissance qui est le fruit de la honte, Lampedusa et son cortège de misères et de mort devrait provoquer un sursaut des personnes, des corps intermédiaires et des Etats, fait de compassion, de volonté réaliste, et de dynamisme novateur ; ce pourrait, ce devrait être le socle d’un grand projet européen, autrement fédérateur que les dimensions requises pour la commercialisation des homards ; une Europe animée par des nations souveraines et responsables se doit de mener une réflexion commune en vue de choix et d’actions relatifs au problème de la pauvreté des pays en développement. En s’affranchissant le cas échéant des lourdeurs institutionnelles de l’OMC et du FMI, pourquoi ne pas construire un ensemble vaste et cohérent de maillages de solidarité Nord-Sud sous les espèces d’accords bilatéraux, favorisant et patronnant de véritables jumelages à tous les niveaux de communautés ? Il ne s’agit pas ici de prétendre tracer la feuille de route de nos dirigeants politiques, patrons d’ONG, d’organisations caritatives, certains déjà auteurs de belles réalisations ; qu’il soit seulement permis d’affirmer que notre identité, nos racines chrétiennes, nos traditions humanistes, font que, pour nos pays occidentaux, et tout particulièrement pour la France, il n’est pas de politique honorable sans satisfaire à l’ardente obligation de solidarité envers les pays pauvres…Toute honte bue !

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