Fasciné par les tempêtes en mer, le gros temps sur les côtes de la Manche et de l’Atlantique, Jean Guichard, dès qu’un fort coup de vent s’annonce sur l’Ouest, prend un hélicoptère et décolle afin d’aller photographier au large la fureur des éléments. Le jeu est dangereux mais le résultat, à couper le souffle, l’a rendu célèbre.

Les clichés réunis ici ont pour thème l’assaut des déferlantes sur les phares en mer. Des murailles d’eau, parfois aussi hautes qu’eux, assaillent la Jument, Creac’h, Triagoz, Nividic, Le Four, La Vieille, les Pierres Noires, Ar Men, Eckmüll, les Poulains. Les abords de Sein ou Ouessant se transforment en enfer marin hallucinant. De La Hague à Quiberon, durant les hivers 2014 et 2015, le photographe a bravé le vent, les vagues, les roches déchiquetées pour ces images à chavirer le cœur du marin le plus chevronné.

Le soleil surgissant des nuées noires jette des lueurs somptueuses sur un océan émeraude, jade, saphir, améthyste, turquoise, gris acier, pourpre ou vineux parfois, l’écume est si dense que l’on dirait un tapis de neige. Les vagues, en se fracassant, dessinent des roues de paon, vêtent de dentelles les bâtiments, tracent avec leurs creux des escaliers d’eau, esquissent des figures compliquées … C’est d’une beauté folle. Et mortelle.

Pourtant, comme le rappelle Jean-Christophe Fichou, dans ces conditions dantesques, sans les moyens techniques dont nous disposons aujourd’hui, obstinés, des hommes ont bâti ces ouvrages parfois dressés à six ou sept heures de navigation des côtes. Quelques-uns ont péri à la tâche. Et d’autres, dans une solitude à rendre fou, ont occupé ces phares jusqu’à l’automatisation des systèmes. L’hommage qui leur est rendu par cet album photographique, l’un des plus spectaculaires que vous puissiez trouver, est mérité.

Phares en tempête, Jean Guichard et Jean-Christophe Fichou, Ouest-France ; 125 p ; 28 €.