Alors que la machine financière s’est remise à tourner depuis des mois avec les créations massives de liquidités des banques centrales, la démocratie pourrait perturber le mécanisme. En Italie, troisième plus grande économie de la zone euro, les récentes élections législatives ont donné des résultats inattendus. Si la gauche a gagné de peu le scrutin (avec près de 30% des voix), le mouvement du renaissant Berlusconi l’a talonné, tandis que le parti du comique de gauche Beppe Grillo – qui se présente comme un opposant à la monnaie unique européenne – a réuni 25% des votes.
Surtout, l’ancien chef du gouvernement Mario Monti, arrivé au pouvoir suite au départ forcé de Berlusconi il y a quinze mois, n’a réussi à enlever que 10% des scrutins pour sa première confrontation populaire. Il ne pourra obtenir la majorité avec la gauche italienne pour poursuivre sa politique de défense de l’euro. Ancien commissaire au commerce extérieur puis à la concurrence, vice-président pour l’Europe de la Trilatérale, l’homme était le candidat de Bruxelles. Les mesures drastiques qu’il a mises en œuvre (taxe foncière, centres d’appels pour la délation fiscale, interdiction des paiements en liquide au-delà de 50 euros etc) n’ont pas permis de réduire la dette publique du pays, laquelle a augmenté de 5% durant sa gouvernance.
Le flou sur la politique future de l’Italie vis-à-vis de la monnaie unique a immédiatement fait grimper ses taux d’emprunts en euro. Sous l’effet de ventes importantes, les intérêts des obligations d’État à dix ans ont bondi de 4,5% à 4,9% le lendemain du scrutin.
La plus grosse dette publique d’Europe
Le gouvernement italien est le plus endetté d’Europe. Avec 2 000 milliards d’euros d’encours, sa dette représente 126% de toute la production annuelle du pays. Or, le succès du jeune mouvement conduit par Beppe Grillo, qui propose de suspendre les versements des intérêts, et la déconfiture du parti de Mario Monti, incitent les détenteurs d’obligations italiennes à céder leurs titres. En cas de dégonflement des cours, des pertes colossales pourraient atteindre les fonds d’investissement.
Le scénario n’est pas improbable. En effet, personne n’entrevoit d’éclaircie sur le front économique à même d’augmenter les recettes fiscales et d’alléger ainsi le fardeau de la dette. Alors que le PIB italien a reculé de 2,2% en 2012, les exportations n’ont pas retrouvé le niveau d’avant crise, contrairement à ce qu’on a observé en France ou en Espagne. Les enquêtes effectuées auprès des entreprises industrielles indiquent une contraction de l’activité dans le secteur manufacturier et la situation dans les services empire.
Si l’activité ne reprend pas dans un temps relativement court et que l’idée d’un défaut partiel de remboursement fait son chemin dans la classe politique, le marché obligataire italien pourrait faire trembler la pyramide des dettes occidentales, précipitant la remise en questions de la monnaie unique européenne.