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Angoissante bête du Gévaudan

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Angoissante bête du Gévaudan

Peu d’énigmes auront autant fasciné que celle de la Bête dévorante qui terrifia, entre 1764 et 1767, les paroisses gévaudanaises par ses attaques ciblées contre des enfants, des jeunes filles et des femmes. Qu’il ne s’agissait pas d’un loup, les louvetiers de l’époque le savaient déjà, et la zoologie moderne n’a fait que le confirmer, sans résoudre le mystère. L’hypothèse privilégiée, hormis l’introduction accidentelle dans la région d’un fauve exotique d’une espèce aujourd’hui disparue, échappé d’une ménagerie, demeure celle d’un hybride, chien-loup dressé à tuer, ce qui oblige à conclure que, derrière la Bête, s’en tenait une autre à face humaine. Piste criminelle, donc, avec toute la charge perverse inhérente à pareille série d’assassinats.

C’est précisément pourquoi l’histoire de la Bête n’est pas de celles qu’il faut livrer, dans sa brutalité et son horreur, aux enfants. Or, Francette Vigneron s’adresse à eux, sans rien leur épargner des mutilations subies par les victimes, insistant sur leur évident caractère sexuel. Au passage, elle stigmatise Louis XV, accusé d’avoir été incapable de mettre le monstre hors d’état de nuire, et « monté » la capture d’un grand loup afin de laisser croire le fléau éradiqué ; elle n’oublie pas non plus d’accuser l’Église pour avoir dénoncé « un châtiment divin lié aux débauches », en quoi l’évêque avait parfaitement compris la nature du mal auquel ses ouailles avaient affaire…

Les dessins de Laurent Miny, très réalistes, contribuent à rendre l’album angoissant. Même si les enfants aiment jouer à avoir peur, même s’ils sont plus informés et moins innocents que jadis, ce « loup »-là véhicule des fantasmes spéciaux. On ne le révélera donc, non sans précaution, qu’aux plus grands, en leur expliquant beaucoup de choses et corrigeant les erreurs contextuelles.

La bête du Gévaudan, de Francette Vigneron, éditions Ouest-France, 60 p., 4,90 euros.

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