Lola, 13 ans, handicapée, vit avec son père Pierre, seul pour l’élever. Très protecteur, il souhaite pour son enfant une vie « normale ». Est-ce possible ? Les journées de Lola sont rythmées principalement par les visites de Jérémie l’orthophoniste qui cherche à communiquer avec elle et y parviendra par le biais de l’Origami, un art du pliage venu du Japon qui, tout en éveillant sa créativité, apporte satisfaction et confiance à l’être en souffrance. Il lui conte alors la légende nippone de senbazuru, « celui qui plie mille grues en papier verra son vœu le plus cher se réaliser ». Le mot senbazuru, difficile à prononcer pour la jeune fille, deviendra Zourou. Grâce à Jérémie, Lola franchit, autant que faire se peut, la passerelle qui la sépare des autres mais ses progrès sont lents et le père, entre incompréhension et déni, s’exaspère. Épaulé par sa nouvelle compagne, la douce Jeanne, il comprendra avec le temps qu’il faut pour rentrer dans le monde de Lola, « colorier la vie selon sa volonté ». La mise en scène de Mélodie Molinaro, tout en finesse, met en parallèle non pas deux mondes mais deux perceptions du monde que symbolisent les deux parties de l’appartement, l’univers du quotidien où la communication peine à s’établir et la chambre de Lola, seul lieu où peut s’exprimer sa liberté et s’envoler son imaginaire. Cette rencontre avec la différence faite d’amour, de patience et d’abnégation, n’est-ce pas le cadeau qu’offre Lola du fond de sa nuit ? Morgane L’Hotis interprète l’adolescente avec cette justesse nécessaire qui la rend bouleversante. Mélodie Molinaro et Francis Borand, sans un mot de trop, abordent avec pudeur et acuité un sujet complexe qui, s’il bouscule, n’en captive pas moins le spectateur par les questions qu’il soulève. L’émotion et la poésie partout présentes accompagnent l’espoir.

La pièce sera présentée cet été au festival off d’Avignon.

Illustration © Noémie Kadaner