Recevez la lettre mensuelle de Politique Magazine

Fermer
Facebook Twitter Youtube

Article consultable sur https://politiquemagazine.fr

Madeleine Vionnet, « l’architecte »

Facebook Twitter Email Imprimer

Madeleine Vionnet, « l’architecte »

Surnommée « l’architecte » par les couturiers, Madeleine Vionnet fut la plus grande créatrice des années 20. D’un esprit indépendant et très moderne pour son époque, elle construisit, seule, son empire. Née en 1876, elle rentre à 16 ans comme apprentie chez le couturier Vincent, part pour l’Angleterre à 20 ans, ce qui, dans le contexte de l’époque, apparaît aussi étonnant que courageux pour une jeune fille issue d’un milieu modeste. L’aventure britannique durera cinq ans et sa carrière démarre véritablement chez Kate Reily où elle s’initie aux techniques des tailleurs britanniques et habille les aristocrates et la bourgeoisie locale. Fascinée par la Grèce antique, elle explore l’art du drapé qu’elle maîtrisera si bien qu’elle sera engagée par les sœurs Callot, une maison parisienne des plus réputées. « Sans les sœurs Callot j’aurais fait des Ford, avec elles j’ai fait des Rolls-Royce » dira Madeleine Vionnet plus tard. En 1912, après avoir été l’assistante de Jacques Doucet, elle créé sa propre maison. Elle osera une révolution pour l’époque, rejeter le sacro-saint corset qui, estime-t-elle, « est une chose orthopédique. […] les muscles de la femmes sont le meilleur corset que l’on puisse rêver ». Elle imposera aux mannequins de défiler nues sous ses robes de crêpe. Madeleine Vionnet travaille comme une sculptrice, elle modèle mousseline, satin, velours, crêpe de soie et tente de réinventer le drapé blanc et fluide qui deviendra sa signature. Tout au long de sa carrière elle élabore ses créations sur un mannequin en bois articulé haut de 80 cm qui tourne sur lui-même, une distance nécessaire face au corps féminin permettant de juger de l’effet d’un drapé ou d’un biais, autre innovation de Vionnet qui permet d’exploiter l’élasticité du tissu et de mouler le corps sans l’entraver, une technique qui ne cessera d’être sa spécialité, même dans les années 30. Et lorsqu’en 1934 un vent de romantisme souffle sur sa collection, à côté de ses drapés, la créatrice s’inspire de l’air du temps, taffetas et tulle font leur retour avec cette même légèreté et minutie extrême qui caractérisent les créations de Madeleine : la fourrure s’unit à la dentelle, la dentelle se fait cape. Une fois encore le secret de Vionnet est dans sa coupe qui lui vaudra un succès retentissant ! Le styliste Marc Audibet dira : « Madeleine Vionnet comme Paul Poiret ou Coco Chanel, sont les plus importants du point de vue de la création parce qu’ils ont questionné le vêtement dans ses structures mêmes ». Créatrice d’avant-garde, Madeleine Vionnet le fut également d’un point de vue social. Elle crée pour ses employées une cantine d’entreprise, une crèche, engage un médecin et un dentiste à demeure, leur offre des congés payés avant l’heure. Décorée de la Légion d’honneur à 53 ans, en 1929, elle meurt en 1975. Depuis 1980, des expositions lui sont consacrées dans le monde entier. Une reconnaissance mondiale qui l’aurait sans doute comblée et amusée, elle qui passa la plus grande partie de sa vie entre les quatre murs de son sanctuaire.

Facebook Twitter Email Imprimer

Abonnez-vous Abonnement Faire un don

Articles liés