Civilisation
Juste un souvenir
Avec Myriam Boyer. Mise en scène de Gérard Vantaggioli. Avec la participation de Philippe Vincent
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Aucune pièce ne se joue mais on peut espérer qu’elles se joueront à nouveau. Et le principal plaisir de lire une critique n’est-il pas d’apprécier le goût de son auteur ? Nous ne priverons donc pas les lecteurs de Politique Magazine de cette chronique théâtrale.
L’auteur de cette pièce, comédien et metteur en scène émérite, s’était déjà signalé par une pièce traitant d’une brève liaison entre Prosper Mérimée et George Sand, Prosper et George, créée en 2009 au Théâtre Montansier à Versailles et récompensée par le Grand Prix du Théâtre. Se replongeant dans cette époque et la vie de George Sand, il nous propose une pièce sous forme de conte.
Marie Caillaud, âgée de onze ans, entre à Nohant au service de George Sand. Sa première fonction sera d’aller chercher les œufs au poulailler, d’où le surnom de Marie des Poules dont on l’affuble. La prenant sous son aile, George Sand s’occupe de son éducation et lui apprend à lire, écrire et à jouer la comédie en interprétant 35 de ses pièces. Elle rencontre aussi les célébrités de son temps, Alexandre Dumas fils, Delacroix, Nadar… et elle entretient une liaison avec le fils de George Sand, pour elle une immense histoire d’amour, pour lui une passade. La pièce prend alors toute sa saveur et de comédie devient drame.
George Sand qui se veut le parangon de la féministe révolutionnaire, se révèle une femme pleine de préjugés et s’acharne à ce que son fils abandonne Marie des Poules pour s’engager dans un mariage plus convenable et digne de son rang. Marie Caillaud donna naissance à une fille naturelle, Marie-Lucie, et décèdera le 11 janvier 1914.
Pour interpréter ce personnage et celui de George Sand, Béatrice Agenin, ancienne sociétaire de la Comédie Française, connue pour avoir été la brillante partenaire de Jean-Paul Belmondo dans plusieurs pièces dont Cyrano de Bergerac, réussit dans cette pièce un tour de force en passant d’un personnage à l’autre sans aucun artifice, en ne travaillant que sur l’intériorité. Arnaud Denis, fondateur de la troupe théâtrale des Compagnons de la Chimère, campe avec élégance et brio le rôle du fils. Il a obtenu pour son interprétation le Prix du Meilleur Comédien décerné par le jury du Prix « Avignon à l’Unisson ». Rares sont ces duos au théâtre où l’osmose et l’intelligence des deux interprètes soient aussi aboutis. Cette complicité naturelle pourrait avoir pour explication leur formation commune, bien qu’à des générations diverses, comme élèves de Jean Périmony et Jean-Laurent Cochet – comme l’auteur de la pièce. On ne saurait achever cette chronique sans féliciter Laurent Béal pour ses éclairages, dont la luminosité peint la scène, et Catherine Bluwal pour ses décors.