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Le commencement de la fin

Premier ministre introuvable ! Des semaines durant. Avec un gouvernement démissionnaire pendant plus d’un mois.

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Le commencement de la fin

Des ministres qui votent en tant que députés à l’assemblée nationale selon les stratégies des partis et qui, en même temps, ce qui est très macronien, continuent d’exercer leurs fonctions ministérielles sous l’appellation générale « d’affaires courantes », mélange des genres qui n’effraie pas la conscience des Macroniens et ne soulève aucune opposition sérieuse, sauf celle de Mathilde Panot qui en appelle au Conseil constitutionnel, mais elle aussi pour des intérêts de parti, tout le monde invoquant la constitution et chacun n’en faisant qu’à sa guise. Sur ce point particulier, toucheront-ils des indemnités de parlementaires ou des émoluments ministériels ? La qualification juridique sera intéressante politiquement parlant. Les deux ? Et les frais pris en charge ? Car aucun de ces illustres personnages ne vit sur ses fonds propres qu’ils conservent précieusement pour leurs affaires personnelles. La politique est devenue sous la Ve République un art de vivre, et une manière de se trouver une situation sous le couvert de belles idées. Les arcanes financiers de la République ont des réduits secrets que Macron a, d’ailleurs, pour son compte souvent explorés à l’Élysée comme au ministère des Finances. Il y a utilisé, pour sa propagande personnelle, jusqu’au dernier sou, les fonds de représentation et de réception du ministère. Au grand scandale de ceux qui l’ont vu faire. Mais jamais un scandale n’éclate quand il s’agit de Macron.

L’avantage de la situation est qu’il n’y aura pas de questions posées sur un tel sujet au gouvernement. Au vrai, tout le monde s’en moque. Parmi les autorités politiques bien sûr, l’important pour elles étant de maintenir leurs propres affaires. Les commissions parlementaires ne servent à rien. Pourvu qu’ils restent en place, les responsables se fichent de tout. Comme de l’état de la France, comme des finances de la France, comme de son avenir totalement compromis. Même chez les hauts fonctionnaires, ce souci est désormais aboli. La seule chose qui compte à l’évidence, c’est à qui reviendra le pouvoir, même dans un état pitoyable et désespéré, et encore comment garantir la perpétuation des avantages de situation, soit au pouvoir, soit dans les allées du pouvoir, soit dans les ramifications para et pseudo-étatiques, les cercles d’influence, les jeux médiatiques, les associations dites « sociétales », les innombrables caisses de résonance de toutes les perversités politiques et morales. Des places, de l’argent, du pouvoir ! Unique règle de ce régime d’infamie.

Premier ministre introuvable, donc, pendant plus d’un mois ! à ne pas confondre avec la chambre du même nom, plus royaliste que le roi. Là, c’est le contraire. Le président n’a plus d’assemblée à sa dévotion comme en 2017, ni même une représentation partisane avec laquelle il puisse composer, comme en 2022, voire cohabiter comme sous Mitterrand et sous Chirac.

Retour du régime des partis

Ainsi la situation reste bloquée, même si le Premier ministre est enfin désigné, après la dissolution de l’assemblée nationale qui est du seul fait de Macron pour prétendument clarifier la donne politique, – dissolution inspirée par Darmanin, dit-on, pour mieux couler Attal ? – et après les tripatouillages éhontés qu’ont constitués les élections législatives. En réalité, elles auraient dû corroborer les élections européennes, mais ne furent, là aussi, du fait principal de Macron, avec l’accord de la gauche la plus folle et de tout le centre le plus mou, comme en 2017, comme en 2022, qu’une sordide et habile manœuvre électoraliste – sous intention de pureté républicaine ! – pour écarter le Rassemblement national de l’ombre même du pouvoir. À quoi sert à ce parti de courir derrière tous les grands « trucs » républicains, y compris l’avortement constitutionnalisé ? Ce ralliement est plus qu’une erreur, une faute. De toute façon, ces procédés ne sont pas nouveaux en République, ils sont récurrents : depuis l’origine, dès 1792, jusqu‘aux invalidations des années 50 et jusqu’aux combines sarkozystes et macroniennes. Oui, malgré ces procédés employés sans scrupule sous l’impulsion déterminante du chef de l’État qui, loin d’être un arbitre, n’est plus aujourd’hui qu’un misérable chef de clan accroché à son pouvoir et, pire, un chef de gangs de magouilleurs et de tricheurs, la situation ne s’est pas améliorée pour lui. L’opération dite de clarification aboutit à une confusion générale. Le chef de l’État n’a plus de parti majoritaire, mais vraiment plus du tout, même une majorité la plus relative qui soit, dans une République qui reste fondamentalement, et par définition même, le régime des partis. Les constitutionnalistes le répètent à l’envi : la Ve République qui s’était donnée avec son fondateur des allures présidentielles et de monarchie républicaine, n’est jamais, dans sa nature profonde et dans son principe essentiel, faute de transformation décisive, même avec l’élection du président au suffrage universel, qu’une constitution de régime parlementaire. Les partis l’ont d’ailleurs fait savoir en 1969 au monarque temporaire que se voulait Charles De Gaulle. Le quinquennat n’a fait que rajouter à l’aspect partisan du choix du président. Macron qui s’imaginait transcender les ambiguïtés du régime par la vertu de sa personnalité, fait aujourd’hui l’expérience du caractère dérisoire de son pouvoir. Il n’y peut rien ; c’est de nature.

Oui, misérable, en fait, comme le fut la majorité des pouvoirs républicains en France depuis le meurtre et la disparition du Roi. Cette misère institutionnelle et constitutionnelle avait été bien notée, après Maistre, par un Balzac, un Taine, un Renan, un Maurras, comme par les meilleurs analystes du système et en particulier par ceux qui en ont subi les mécanismes destructeurs de l’intérieur, tel un Tardieu, voire même un Pompidou, qui ont écrit sur le sujet des pages décisives. Quel aveuglement de ne pas le voir ! Il y a, bien sûr, des exceptions comme toujours, mais qui, comme toujours encore, confirment la règle par la vanité finale de l’effort consenti ou par l’aspect brutal d’une reprise en main à la Bonaparte. Avec des manières de dictature, cela s’achève, comme toutes les autres expériences républicaines, en catastrophes nationales, sociales et politiques. Sera-t-il possible de faire admettre un jour ces vérités incontestables par tous les esprits critiques qui ont encore l’amour ou simplement le souci de la France ?

Une constitution inversée

Le président qui ne voyage plus à l’étranger, comme ces derniers temps en Serbie, que pour faire semblant d’exister comme chef de l’État, même s’il se fait vendeur de Rafale, en est réduit ainsi, sur le plan intérieur, comme un vulgaire Premier ministre, à chercher lui-même la « confiance » auprès des chefs de partis, ce qui est en principe, toujours selon la constitution, le rôle du chef de gouvernement. On peut dire que la Ve République n’existe déjà plus. Le chef de l’État se substitue au Premier ministre, chef de gouvernement. C’était une tendance récurrente depuis des décennies – et même un principe chez Sarkozy –, mais il s’agissait alors, non de déterminer la composition d’un gouvernement, mais d’accaparer toujours plus de pouvoirs, et donc de renforcer la présidentialisation. Il faut souligner sur ce point que tous ces hommes politiques qui prétendent diriger, ne savent pas gouverner – et ce depuis fort longtemps –, la plupart n’ayant jamais de leur vie assumé une responsabilité humaine. Et donc ils s’imaginent que gouverner, c’est montrer son pouvoir, le plus de pouvoir possible. « C’est moi le chef ! » Grotesque !

Non, maintenant, c’est le chef de l’État qui n’est presque plus rien en politique intérieure, malgré toutes ses agitations et ses folies sociétales par pure démagogie, de l’avortement à la fin de vie, – et ce à tous points de vue, politique, moral, personnel, l’homme étant presque totalement décrédibilisé. Malgré les Jeux olympiques et paralympiques où les médias l’ont pourtant bien servi. Alors il tente de se recréer une audience, une sorte d’aura, comme maître de la politique quotidienne et chef, sinon de l’État, du gouvernement qui serait issu de sa décision et qui ne recevrait sa légitimité que de lui, ce qui n’apparaît plus possible.

Au point que c’est lui qui, pendant des semaines, a essayé d’élaborer des combinaisons partisanes et des types d’alliances plus ou moins permanentes ou même temporaires, au cas par cas ; il serait plus juste de dire : au coup par coup. Rencontres avec les chefs de parti, déjeuners avec tous les possibles partenaires pour en faire des « copains », au sens étymologique ! Macron est à l’aise dans ce genre d’exercices en forme de duperies, format Saint-Denis ! Rien ne le gêne. Il remplit tous les rôles. Et, en l’absence d’un vrai ministériat, il se garde pour lui tous les honneurs, ce dont il raffole. Mais la vérité est que le roi est nu, comme dans le conte d’Andersen. Réduit à chercher un chef de gouvernement possible et admissible.

Un régime à bout de souffle

Chef de gouvernement si introuvable que, même s’il est trouvé quand ces lignes seront publiées, il ne sera que le résultat d’un pari momentané sur une possible conjoncture favorable, absolument pas en considération de l’intérêt national ou d’une nécessité politique impérieuse de réussite dans le cadre d’une crise qui devient générale, sociale, économique, financière et politique.

Souvenons-nous que, pendant des semaines, malgré les candidatures annoncées ou suggérées, aucun nom n’est arrivé à susciter un immédiat et suffisant assentiment, non seulement des partis, mais des Français dans leur ensemble, pour avoir à sa disposition les plus élémentaires moyens de gouverner. Les choses n’ont pas changé. En dépit de ce que diront les médias aux ordres.

Introuvable, donc – même s’il est trouvé – veut dire improbable, hasardeux, de toutes façons mal choisi, puisque le choix s’est avéré si difficile, voire quasi impossible, et que s’il s’effectue sous la pression des circonstances, il ne sera jamais qu’un coup de dé aléatoire.

Le résultat de la politique macronienne au bout de sept ans d’exercice aboutit concrètement à une France ingouvernable. Elle le laisse, lui seul, au milieu d’un champ de ruine institutionnel. Il en profite dans son narcissisme pour concentrer sur sa personne toutes les lumières de l’actualité. Il s’en grise. Il a osé ainsi présider les Jeux olympiques et paralympiques à la seule gloire de sa personne, afin de se voir féliciter unanimement pour l’énormité des moyens mis en œuvre. C’est trop facile et, selon son habitude, il a su utiliser sa petite camarilla pour organiser la cérémonie d’ouverture avec une intention bien précise, de braver à cette occasion le code des bonnes mœurs et, surtout, le respect du caractère sacré de la religion, de sa religion à lui qui est la religion de la France, bafouant de plus l’histoire de son pays comme il se délecte à le faire en toutes circonstances, cette fois-ci en jetant en pâture au public mondial la tête de la reine Marie-Antoinette, transgressant de cette façon, avec son mental de malade psychologique, toutes les limites de la plus abominable imagination, suivant les modèles qu’il s’est fait à lui-même, tant dans ses mœurs privées que dans sa conduite publique. Transgresser, toujours transgresser, et faire de sa transgression un exemple de sa liberté de penser. Une telle démesure ne peut que mal finir, selon l’antique tragédie. Et il n’est jamais bon d’outrager de Seigneur de la Gloire !

Premier ministre introuvable donc, mais, de toute façon, immédiatement contesté par une bonne partie de la représentation dite nationale, en passe aussi rapidement d’être censuré par les coalitions les plus étranges, contraint donc de démissionner. Ce qui reposera inéluctablement le problème du Premier ministre introuvable. Car que faire alors ? Eh bien, recommencer : Premier ministre à nouveau introuvable, peut-être, enfin, mais plus encore incertainement trouvé, bien sûr aussitôt censuré et conséquemment démissionné. Et, donc, alors ? Combien de fois ? Le budget qui est le point crucial ? Sortira de sa boîte le 49-3 qui devient la procédure ordinaire, mais ce ne sera seulement envisageable que si le gouvernement n’est pas – pas encore ! – censuré. Sinon quoi ? Les douzièmes provisoires ? Attal, Premier ministre démissionnaire pendant plus d’un mois et demi, tout en étant président de parti à l’assemblée, a envoyé à chaque ministère ses lettres de plafond. De quoi rassurer les créanciers de la France ? Allons donc ! La triste réalité politique du pays achèvera de faire exploser la situation financière avec une dette insoutenable et des ravages économiques et sociaux qu’il sera impossible d’enrayer. La France paiera les paquets de sottises de ses dirigeants dans tous les domaines, y compris évidemment celui de la sécurité, de l’islamisme conquérant, de l’immigration, des prétendues politiques de la ville. Ce qu’on a connu ne sera rien par rapport à ce que nous connaîtrons sous peu.

Macron, combien de temps ?

La machine politicienne maniée par Macron pourra-t-elle continuer à tourner longtemps sous ce régime ? Jusqu’à quand ? C’est la seule et vraie question. Car pour le poste de Premier ministre « introuvable », il y a encore et toujours pléthore de prétendants. Il ne manquera jamais de Bayrou, de Cazeneuve, de Bertrand, de Pécresse, de Delga, de Bouamrane, de Lucie Castets même si Macron l’a récusée, pour penser qu’ils ou elles sont naturellement faits pour gouverner, diriger, administrer les Français. Idoines pour l’emploi, pensent-ils tous, gonflés de leur importance, ridicules dans leurs prétentions. Et s’ils font attention de ne pas trop s’avancer pour le gouvernement, c’est que les Philippe, Darmanin, Attal, Wauquiez et tutti quanti visent la présidentielle. La vérité toute simple : aucun de nos responsables politiques, n’est fait pour gouverner la France. Aucun, strictement aucun ! Cette fonction ne relève pas d’eux, de leur fausse compétence. C’est la folie de cette République de leur faire croire qu’ils sont aptes à continuer deux mille ans d’histoire de France. Quelle fatuité ! Quelle insupportable prétention avec leurs déplorables habitudes de médiocres politiciens et d’imbéciles démagogues ! La France relève d’un autre ordre. Ils sont même incapables d’appréhender le mystère prodigieux de notre histoire nationale et royale. À les écouter, ils savent ce que les Français veulent et il n’y aurait qu’eux qui seraient en état de les satisfaire. Bande d’hypocrites qui débitent les mots de République, d’arc républicain, de démocratie, de droits de l’Homme, de respect des minorités, ce qui les autorise à se dire « justes » aux yeux du monde, comme jadis les pharisiens, dans le seul but de récupérer et d’accaparer le pouvoir, eux qui ne font jamais rien pour le peuple français, en tant que tel, qu’ils abandonnent à son triste sort et dont ils se fichent éperdument. Tous les jours fournissent leurs lots d’illustration de cette effroyable carence de l’ordre politique : encore ce gendarme tué sur la route par un multirécidiviste. Et c’est à longueur de temps ainsi ! La France se déshonore littéralement, en politique intérieure, en politique extérieure, avec son régime délétère que plus personne ne comprend ni à l’étranger, ni au fond du cœur des Français.

Les pays d’Europe peuvent encore se relever, oui, même l’Angleterre, même l’Allemagne, l’Italie, le Danemark…, cela se voit et se sent, malgré l’effroyable chape de plomb européo-mondialiste qui pèse sur eux. Mais la France ? Dirigée par un Macron qui ne croit pas, qui n’a jamais cru ni dans la France ni dans les Français qu’il méprise, c’est le cas de le dire, souverainement, lui qui ne s’en est servi que pour accéder au pouvoir et qui ne rêve que de retirer à la France toute sa souveraineté pour la fondre dans l’Europe de son utopie, peut-être demain cette Communauté politique européenne qu’il a constituée en 2022 et dans laquelle il s’apprête vraisemblablement à rebondir quand il sera obligé d’en finir avec la France dont peu lui chaut le sort.

La démocratie, telle que nous la vivons aujourd’hui en France, est un régime qui dans sa décrépitude se voudrait fabuleux, digne des plus beaux récits enfantins. Chaque politicien se voit comme un prince charmant qui viendrait par son baiser d’amour réveiller la belle princesse France qui, elle-même, aussitôt ne pourrait que se jeter dans les bras de cet amant, si parfait, si nécessaire et si prévenant.

Cependant tout Français, normalement pourvu de bon sens, sait que ces godichons de politiciens malappris, tous plus ou moins pervers et corrompus – car la politique en République est corruptrice, dans les faits comme dans les idées, en atteignant jusqu’au mental, ce qui la constitue en véritable voyoucratie – ne sont pas des princes charmants. Ce sont comme Macron des violeurs de l’histoire, des usurpateurs de légitimité, des pilleurs de votes et d’opinions. Ils prétendent s’installer dans un lit qui n’est pas fait pour eux. La France attend son prince, c’est vrai. Mais il viendra d’un autre monde que le monde politique d’aujourd’hui et sa légitimité ne pourra être que sacrale et historique, d’un ordre au-dessus, oui, largement au-dessus ! À quand, ce jour béni ? Et après quel drame ?

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