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Au-delà des présidentielles

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Au-delà des présidentielles

La campagne électorale pour l’élection présidentielle en France ne peut pas se dérouler sereinement. La passion pour le pouvoir qui en est le ressort essentiel, dénature la discussion politique, défigure l’image de la puissance publique et fausse jusqu’à la notion même de politique. Tous les cinq ans maintenant, tout est remis en cause. La fois suivante, ce sera en 2017, autant dire demain. Les candidats à ces élections doivent présenter des « projets » à l’ensemble des citoyens et ces projets sont censés justifier et leur prétention au pouvoir et, le cas échéant, leur accession au sommet de l’état.

Il ne s’agit même plus de discussions de principes. « Le débat » comme il est dit à satiété avec cette sotte et ridicule suffisance que notait le regretté Philippe Muray, porte sur des points de PIB, sur l’aménagement des recettes fiscales, le redéploiement des dépenses publiques, les financements des actions de l’état, la relance des activités privées, la ré-industrialisation, le traitement du chômage, la création d’emplois, l’équilibre des comptes de la Sécurité sociale dont la situation est désastreuse, la vaste question du logement, l’éducation nationale en état de perpétuel échec, la recherche et le développement où la France accumule les retards, le problème des énergies dont, bien sûr, l’avenir du nucléaire, la sécurité publique qui n’est plus assurée, les questions de police et de justice, l’immigration et la citoyenneté, et cette liste n’est pas exhaustive.

Comment les candidats peuvent-ils sur tous ces points prendre des engagements alors qu’ils n’ont la maîtrise de rien, que les domaines de la souveraineté française sont de plus en plus réduits, que le fonctionnement de l’état et de ses administrations est si pesant qu’il n’a plus d’efficacité réelle, que les moyens de la puissance publique diminuent nécessairement et surtout que la situation financière et économique internationale leur échappe totalement ? Et donc le règlement même des dettes publiques ?

Leurs programmes – et tout le monde le sait – ne sont que des ratiocinations en chambre déversées ensuite sur le public pour faire croire à la pertinence de leurs objectifs. Tout est chiffré. Inutile de dire que ces chiffrages sont parfaitement aléatoires et donc fantaisistes malgré la fatuité des partis. La crise a déjà perturbé les plus sûrs des pronostics, et comme elle est loin d’être finie, il n’est pas un programme électoral qui soit en état de lui résister.

D’où la tentation de se contenter de formules, de faire du « sociétal » en légalisant tout et n’importe quoi, de sombrer dans la démagogie, de faire croire qu’il suffit de jeter quelques incantations au « produire » et au « consommer français » pour trouver une solution à la crise.

Tout cela relève d’une mauvaise conception de la politique qui prévaut dans tous les partis et dont la France pâtit de plus en plus. La référence au modèle américain n’est pas appropriée. Le système des états-Unis est de conception profondément différente : au-delà des partis, des candidats, des équipes au pouvoir, il y a à Washington une continuité des politiques de l’état qui les projette au-delà du court terme. Même chose en ce qui concerne le modèle allemand, fruit d’une histoire et d’institutions différentes.

La France ressemble de plus en plus à ces pays mal gouvernés où le pouvoir n’est plus qu’un enjeu de luttes personnelles, partisanes et idéologiques. Les hommes politiques français se transforment en régents de collège qui prétendent faire de la pédagogie avec leurs concitoyens, tout ça pour être élus ou réélus. La politique tourne à l’enfantillage.

La Vème République qui avait été constituée à l’origine pour échapper le plus possible au régime des partis, y est retournée entièrement du haut en bas de l’échelle. Comme les précédentes. Les grands hommes politiques qui ont servi sérieusement la France au cours de son histoire plus que millénaire, ont d’abord et fondamentalement cherché à préserver l’état de l’influence débilitante des factions quelles qu’elles fussent. Le point de départ de leur réflexion et de leur action fut toujours l’établissement ou le rétablissement d’un état souverain, indépendant, libre, arbitral, centré sur l’essentiel de l’action proprement politique, installé dans la durée et doté d’une vision intelligente et d’une volonté forte. Et le reste, tout le reste était donné par surcroît. L’autorité restaurée ouvre de justes droits aux authentiques libertés. Que l’on ne dise pas que la mondialisation ou l’internationalisation des échanges rend obsolète ce schéma simple et clair du premier bien public français ; il n’en est que plus nécessaire. Il s’imposera à nouveau, fût-ce après les plus dures épreuves.

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