Et si une crise venait du Japon ? Une crise qui aurait des répercussions, d’abord sur l’économie américaine, puis sur le reste du monde, tant il est vrai que la démondialisation rêvée par M. Trump est encore loin d’être réalisée. Expliquons cela.
On sait que le Japon est la quatrième puissance économique mondiale, derrière l’Allemagne. On sait également que sa dette atteint 250% du PIB : un chiffre extravagant, mais, il convient de le préciser, une dette détenue à 92% par les Japonais eux-mêmes, ce qui est très différent, par exemple, de la dette française détenue majoritairement par des créanciers étrangers. On sait enfin que sa population est en baisse continue, donc vieillit, donc consomme moins. Ce pays est en décadence économique, à cause de la montée de la Chine qui a effacé les effets de dumping qui avaient tant profité à l’Archipel durant plusieurs décennies entre les années 50 et 90 ; également à cause d’une crise immobilière qui à bien des égards ressemble à celle de la Chine aujourd’hui ; enfin à cause d’une dépréciation du dollar en 1985 qui a ruiné la créance japonaise. Il faut dire que le Japon est le premier détenteur de la dette américaine, devant la Chine elle-même. Eh bien, cette fois-ci, c’est encore la relation avec le dollar qui risque de poser un nouveau problème.
Ce qui fait craindre une crise, c’est que les marchés ne prêtent plus au Japon. S’il ne peut plus entretenir son endettement, le pays va devoir vendre sa dette américaine, donc vendre des dollars contre des yens qui seront destinés à racheter sa dette. Une vente qui d’ailleurs ne sera pas si profitable, parce que la valeur de sa créance a baissé, dans un contexte de remise en cause progressive du dollar, notamment par la Chine, mais pas seulement : par l’Arabie, par la Russie qui de toute façon ne peut plus s’en servir à cause de l’utilisation politique que l’Amérique en a faite.
Le Japon est le premier détenteur de la dette américaine
Bon, de toute façon, le Japon n’a pas d’autre choix que de vendre son épargne constituée d’obligations américaines, pour renforcer le yen et venir au secours du pouvoir d’achat de sa population. Mais cette vente va affaiblir le dollar ; donc les États-Unis vont devoir hausser leurs taux d’intérêt pour attirer les créanciers. Cette hausse aura évidemment un effet négatif sur la croissance américaine, parce que les crédits seront plus difficilement accessibles, donc l’argent, dont la circulation est comme le sang dans le corps, viendra à manquer, provoquant des thromboses dans l’appareil de production de l’autre côté du Pacifique.
Et naturellement, si l’Amérique s’enrhume, c’est le monde entier qui éternue. On voit ici comment l’imbrication des économies peut tout emporter. La dette américaine, nous le savons, est encore plus terrible, elle n’a en fait aucune concurrente, elle s’élève à 100.000 dollars par habitant – dans ce pays rempli de pauvres – et correspond à un tiers du PIB mondial. Ce n’est donc pas vraiment le moment d’affaiblir le dollar par une vente massive décidée par son premier créancier. Mais le Japon n’a pas le choix… Attendons de voir la suite.