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L’angoisse des Syriens

Le 22 juin, un dimanche, les fidèles de l’église Mar Elias de Damas ont été victimes d’un attentat islamiste en pleine messe. Au moins 27 personnes ont été tuées et des dizaines blessées. La communauté grecque orthodoxe syrienne pleure des amis, des frères, des filles déchiquetés par les balles puis la ceinture explosive d’au moins un assaillant islamiste. C’est une première attaque directe contre des chrétiens en prière à Damas depuis la fin du XIXe siècle.

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L’angoisse des Syriens

Si les services du nouveau dirigeant syrien, Ahmed al-Sharaa, ont bien sûr condamné ce déluge de violence, Hind Qabbat, unique ministre chrétienne du gouvernement, a été la seule à se rendre au chevet des blessés. Un manque d’intérêt qui tranche avec les habitudes syriennes après ce genre d’événements.

Par ailleurs, les bons suiveurs du pays ont relevé avec peine que les communiqués officiels ne reprenaient pas l’appellation traditionnelle de « martyrs » pour les victimes de la sauvagerie jihadiste, sans compter d’autres variations linguistiques qui ne sont pas sans questionner ceux qui craignent la ségrégation des communautés non sunnites dans la Syrie dirigée par les anciens patrons d’Al Quaeda dans le pays.

Plus inquiétant encore, les autorités ont directement incriminé l’Organisation État Islamique pour cet attentat, produisant une démonstration très empressée des responsabilités dans l’attentat, sans vraiment convaincre. À ce jour, l’identité du groupe commanditaire n’est toujours pas claire, ne permettant donc pas d’enquêter l’historique de ses relations avec les familiers des nouveaux hommes forts à Damas.

Sa Béatitude Jean X, patriarche d’Antioche et de tout l’Orient des grecs orthodoxes, a livré une homélie poignante pour les morts de Mar Elias, citant le nom de trois jeunes chrétiens qui ont tenté de maitriser le kamikaze, témoignant de la douleur que tous les Syriens devraient éprouver pour ce deuil et affirmant « Monsieur le Président, nous vous avons félicité pour la révolution, nous vous avons félicité pour votre accession à la présidence. Nous avons tout fait comme il convenait, car nous sommes des enfants de ce pays. Notre patrie est notre terre, notre honneur. Nous avons tendu la main pour construire la nouvelle Syrie. Et nous attendons encore… avec regret… que cette main nous soit de nouveau tendue. » Une homélie qui lui a valu un déluge de haine de la part des soutiens d’Ahmed al-Charaa sur les réseaux sociaux.

Assauts violents contre des chrétiens orientaux

Notons que le mode opératoire de l’attentat du 22 juin à Mar Elias rappelle douloureusement d’autres assauts violents contre des chrétiens orientaux réunis pour la messe, comme celle de l’église Saint-Pierre et Saint Paul du complexe patriarcal du Caire, le 11 décembre 2016, qui avait fait plus de 25 morts et celle de Notre-Dame -de-L’Intercession, à Bagdad, le 31 octobre 2010, causant plus de 60 morts en plein office. J’ai évoqué ces drames dans les pages de Politique Magazine.

Les nouvelles désolantes qui s’accumulent au sujet de la Syrie ne peuvent que décupler l’angoisse de nombreux Syriens quant à la capacité des autorités de fait à assumer leurs responsabilités pour tout le pays. Pas une journée ne se passe sans que les équipes de SOS chrétiens d’Orient ne doivent recouper des informations au sujet de fusillades, de menaces ou de véritables provocations, comme le mercredi 25 juin, où un étrange responsable de la Sécurité générale, soit la nouvelle police syrienne, a voulu interrompre la fête du Lycée français Charles de Gaulle à Damas. La musique heurtait ses mœurs… Pas de morts bien sûr mais un fanatique investi de pouvoirs de police considérant qu’il peut impunément se comporter comme un taliban dans la capitale syrienne.

Les autorités de fait en Syrie ont reçu bien des hommages, des encouragements, des secours depuis la chute de Bachar al-Assad. Elles doivent désormais démontrer la sincérité de leurs promesses, la valeur de leurs capacités, et la justesse de ceux qui les ont portées au pinacle sans prudence.

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