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La Droite nationale italienne est-elle porteuse d’avenir ? il semble que non 

Le gouvernement formé par Giorgia Meloni ne conduira qu’une politique acceptable par Bruxelles. Ce qui est logique puisque sa coalition ne représente qu’une droite constitutionnelle modérée.

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La Droite nationale italienne est-elle porteuse d’avenir ? il semble que non 

Les élections législatives italiennes du 25 septembre 2022 ont donné lieu à d’abondants commentaires de la part des journalistes et de la classe politique, en France comme dans toute l’Europe. Le parti Fratelli d’Italia (Frères d’Italie) de Giorgia Meloni a obtenu en effet 26 % des suffrages exprimés. Associé à la Ligue de Matteo Salvini (9 %) et à Forza Italia (8 %), il apparaît comme le fer de lance d’une coalition de droite qui accède au pouvoir, avec 43,82% des voix contre 26,12 % à la gauche, 15,42 % au mouvement populiste (de gauche) Cinq étoiles, et 7,78 % à Azione (dissidence de gauche). La coalition de droite obtient 237 députés et 115 sénateurs. 

Des craintes où le sociétal prévaut largement sur le reste

Cela étant, on peut se demander si tout le bruit fait autour du résultat de ces élections a un sens. On a parlé, avec effroi de l’accès de « l’extrême droite » au pouvoir. Ce qui est amusant – mais tellement révélateur de l’esprit général de notre époque – c’est que la très grande majorité des craintes suscitées par l’arrivée de cette prétendue « extrême droite » se rapportent aux questions sociétales, qui préoccupent tellement nos sociétés aujourd’hui. On redoute que le nouveau ministère italien restreigne (de droit ou de fait) le droit à l’avortement, remette en question les droits des couples homosexuels et s’oppose fermement à leur mariage, réduise les droits des familles monoparentales, etc. Il est remarquable que Mme von der Leyen, présidente de la Commission européenne, ait semoncé préventivement les dirigeants de la droite italienne à ces sujets, et que, dans les journaux télévisés, 80 % des craintes exprimées par les journalistes et autres intervenants se soient rapportées à ces questions. Manifestement, les questions économiques et sociales, le niveau de vie, les conditions de vie et de travail, le chômage, l’inflation, n’occupent que peu de place dans les inquiétudes des commentateurs. 

De toute façon, toutes ces appréhensions sont vaines. Car la formation du gouvernement qui sortira de ces élections sera un non-événement. En Italie comme en France et partout en Europe occidentale, la droite nationale est, depuis 1945, imago sine re, image sans substance, ne représentant aucune réalité. Elle n’est qu’un fantôme, un spectre dont on s’effraie, ou dont on feint de s’effrayer. Giorgia Meloni est fréquemment présentée comme nostalgique de Mussolini. Or la restauration, même partielle, du fascisme est impossible. La démocratie libérale et parlementaire est devenue, depuis 1945, le seul régime possible dans toute l’Europe de l’Ouest. 

Le Mouvement social italien (Movimento sociale italiano, MSI) fut officiellement fondé le 26 décembre 1946 par des partisans convaincus du régime de Mussolini. Se réclamant très explicitement du fascisme, le parti se voulait populaire, anticapitaliste et socialisant. Mais, bientôt divisé en tendances mutuellement opposées (révolutionnaires socialisants, modérés favorables à un rapprochement avec la démocratie chrétienne, fascistes puristes et doctrinaires de tendance évolienne, etc.), le parti resta marginal dans la mesure même où il revendiquait l’héritage d’un régime dictatorial honni, même si le MSI obtenait, grâce au mode de scrutin proportionnel, quelques sièges au Parlement. 

L’évolution du parti néo-fasciste vers la droite modérée

En février 1972, Giorgio Almirante réussit à unifier le parti, qui prit le nom de Movimento sociale italiano-Destra Nazionale, et se présentait comme le tenant d’une droite « dure », dont l’anti-communisme était le cheval de bataille. Cependant, malgré un élargissement de son audience et des progrès électoraux, dus à la personnalité charismatique de son chef Giorgio Almirante, le MSI-DN restait un parti marginal tenu en lisière par la Démocratie chrétienne, la grande force de la droite et du centre en Italie. Pourtant à l’origine meneur de la tendance révolutionnaire et socialisante de son parti, Almirante finit par recentrer ce dernier sur le thème de la défense de l’ordre, de la lutte contre le communisme, et l’ancra fermement à droite, une droite très conservatrice et délibérément non extrémiste. Contre Pino Rauti, qui regroupait autour de lui les « socialistes », les « révolutionnaires » et les idéalistes et doctrinaires évoliens, il favorisa la montée de son dauphin, Gianfranco Fini, modéré. 

Ce dernier transforma le MSI en un parti classique de la droite modérée. Alleanza nazionale fut le nom dont il l’affubla. Cette nouvelle formation devint une des composantes de la droite constitutionnelle dans le spectre politique italien, et participa à tous les gouvernements dirigés par celle-ci. Fini lui-même fit une brillante carrière, devenant successivement vice-président du Conseil (2001-2006) et ministre des Affaires étrangères (2004-2006) des cabinets Berlusconi, puis président de la Chambre des Députés (2008-2013). Alleanza nazionale fusionna dans Il Popolo della Libertà, dont il devint l’élément dirigeant (2009), avant de se dissoudre dans la Forza Italia de Berlusconi (2013). 

Fratelli d’Italia naquit en décembre 2012, fondé par des anciens militants et cadres du MSI et d’Alleanza nazionale hostiles à l’évolution modérée, libérale et europhile de Fini, et aux ambitions hégémoniques, dans le camp de la droite, de Berlusconi et de sa Forza Italia. Dirigé depuis 2014 par Giorgia Meloni, le nouveau parti refuse l’enterrement pur et simple des références fascistes par Fini, et entend affirmer son identité et son indépendance vis-à-vis de Berlusconi. 

La prétendue « extrême droite » n’est rien de plus que la réapparition d’une vraie droite constitutionnelle et modérée en Italie 

La Ligue (Lega) de Matteo Salvini, autre composante de la droite italienne actuelle, initialement vouée à la défense des intérêts de l’Italie du nord contre (selon elle) le parasitisme et la « corruption » de Rome et du sud de la péninsule, se présente comme un parti souverainiste mais régionaliste, libéral en économie, plutôt hostile à l’Europe et à la mondialisation, opposé à l’immigration, et populiste. 

Les trois partis ont en commun un attachement au libéralisme économique, une option sociale conservatrice et la défense farouche des intérêts italiens au sein de l’Union européenne. Par là, ils se présentent comme les composantes d’une droite conservatrice on ne peut plus classique. Cela est en soi une nouveauté en Italie. D’une certaine façon, on peut dire que la droite redevient la droite. L’ancienne Démocratie chrétienne, qui domina la vie politique italienne et détint le plus souvent le pouvoir pendant près de cinquante ans (1945-1994), se présentait surtout comme un parti centriste, forgé dans le refus affirmé du fascisme, attaché à la démocratie parlementaire, progressiste, assez volontiers dirigiste en économie, non nationaliste, et résolument européen. Et, d’ailleurs, après avoir connu bien des avatars, la Démocratie chrétienne finit par fusionner avec les communistes dans le parti démocrate, principale force de gauche de l’Italie actuelle. Au fond, elle n’était pas vraiment une droite. Les trois partis coalisés et vainqueurs des dernières législatives, Fratelli d’Italia, Lega et Forza Italia, apparaissent donc, ensemble comme la résurrection de la droite (la vraie droite, pas le centre) en Italie. Cela étant, ils ne sont rien de plus. Ensemble, ils ne font que constituer en Italie la droite économiquement libérale et socialement conservatrice présente dans tous les pays ouest-européens, représentée entre autres par les Tories britanniques, la CDU-CSU allemande, ou le parti populaire espagnol. Et, de ce fait, il n’y a aucune raison de la considérer comme « l’extrême droite », ainsi que la présentent avec appréhension les journalistes. Et il n’y a pas davantage de raisons de la semoncer et de lui lancer de solennels avertissements à ne pas détruire les « libertés », comme le font Mme von der Leyen, Emmanuel Macron et autres étoiles politiques européennes. Cette droite italienne n’aura pas une politique différente de celle des partis que nous venons de mentionner. Elle se prononce pour une restriction du droit à l’avortement et contre l’institution du mariage homosexuel. Mais la CDU et la CSU allemandes se sont très longtemps opposées à l’avortement et ont fait en sorte, lorsqu’il devint légal, qu’il fût conditionnel et très strictement encadré. À Malte, le plus petit État de l’UE, l’avortement reste un crime. En Finlande, la loi n’autorise l’avortement que pour les femmes de moins de 17 ans ou de plus de 40 ans (il est vrai que la pratique excède souvent la stricte légalité en la matière). Or, aucun de ces pays n’a jamais été gouverné par « l’extrême droite ». En Pologne, seules les femmes victimes d’un viol, d’un inceste, ou dont la grossesse présente des risques, ou dont l’enfant en gestation souffre de malformation, peuvent avorter. Le gouvernement de ce pays est régulièrement critiqué pour cela et sa prétendue orientation d’« extrême droite », mais sans que l’UE, dont la Pologne fait partie, prenne des sanctions contre lui. 

Quant au mariage homosexuel, le nouveau ministère de droite de l’Italie continuera de s’opposer à sa légalisation, mais ne pourra sûrement pas revenir sur l’union civile spécifique accordée aux couples gays et lesbiens, qui place l’Italie sur le même plan en ce domaine, que d’autres pays de l’UE (Hongrie, République tchèque, Slovénie, Croatie, Grèce) non accusés (sauf le premier cité) d’être aux mains de « l’extrême droite ». 

En vérité, ce qui déplaît en Europe occidentale, c’est que la droite constitutionnelle italienne, opposée traditionnellement à la gauche et alternant avec elle au pouvoir suivant les règles du jeu démocratique, soit une vraie droite, et non une droite de façade, destinée uniquement à donner l’illusion de la liberté de choix et de la neutralité d’un système en réalité dominé par la gauche – tant dans les esprits et les mœurs que dans les médias, l’intelligentsia et la plus grande partie de la classe politique – et qui n’admet pas d’autre politique que celle de cette dernière. 

De ce point de vue, la victoire de cette droite italienne est une nouveauté. Cependant, il est prévisible que, à la tête d’un pays engoncé dans l’UE, et face à une opposition déterminée, maîtresse des médias et de l’intelligentsia et soutenue par ses relais européens, elle ne pourra pas faire grand-chose. À vrai dire, elle ne pourra pas être autre chose qu’un gouvernement conservateur un peu plus déterminé, un peu plus musclé, que ne l’étaient ceux de la Démocratie chrétienne.

Plus que ceux-ci, elle défendra les intérêts italiens en Europe mais ne pourra le faire que dans d’étroites limites, très vite atteintes. Comme la France, l’Italie ne jouit plus, depuis 1992, et plus encore depuis 2002 et 2005, que d’une souveraineté très réduite, laquelle ne lui permettra pas de changer l’orientation libérale, individualiste et gauchardisante de l’UE, de l’Europe de l’Ouest (celle à laquelle elle appartient) en particulier. Elle ne sera rien d’autre que l’aile conservatrice d’un système qui ne changera ni de nature ni de direction. 

Un conservatisme économique et social dur qui renforcera le système tout en rebutant la population 

Prisonnière de ce système, elle sera vouée à la défense du libéralisme économique sans frein étatique (une orientation chère à Berlusconi), à la défense des grands capitalistes, à la lutte contre les syndicats et les grévistes, à la défense de l’ordre bourgeois sur fond de catholicisme de convention, au démantèlement sans solution alternative du système de protection sociale. Une orientation à la Trump ou à la Bolsonaro, l’atout de la souveraineté nationale en moins. Et, par là, le véritable maître de cette coalition de droite sera Berlusconi plus que Giorgia Melloni. La droite nationale italienne prendra ainsi la forme d’un capitalisme brutal, anti-social, fermé aux questions d’ordre écologique (pourtant d’une importance cruciale à notre époque), et dont le conservatisme moral se heurtera à l’hostilité de l’opinion publique dans la mesure où il procédera plus du préjugé tenace et de l’obstination bornée que de la défense avouée des valeurs essentielles de notre civilisation. À ce jeu, la droite nationale ne gagnera rien, ni en Italie, ni en France, ni en Europe de l’Ouest, et semblera plutôt confirmer l’image rebutante qu’en donnent la gauche, les médias et l’intelligentsia, à savoir celle d’un ramassis de défenseurs des forts et des puissants, ennemis des petits et des faibles, et, pour cela, décidés à fouler au pied les droits et libertés de ces derniers et de l’individu en général. Et, bien entendu, au terme de cinq ans de législature, elle sera fatalement battue, sans avoir rien changé à rien.

 

Illustration :  « Qui s’interroge [ sur les défauts de l’UE ] n’est pas un ennemi ou un hérétique mais quelqu’un qui veut contribuer à une intégration européenne plus efficace pour affronter les grands défis qui l’attendent » Giorgia Meloni, 25 octobre, discours de politique générale devant le Parlement.

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