Voilà que le pape voit se constituer devant lui un front de refus pour le moment trop hétérogène pour le dénoncer : les conservateurs américains se tiennent debout à côté des progressistes français, la jeune Afrique enlace le vieil Occident, impossible de vitupérer ce coup-ci contre les rigides. Encouragés par un rejet aussi roide et manifeste, les cercles catholiques prudents proposent une littérature assez abondante pour critiquer la déclaration, cependant que le préfet du dicastère pour la Doctrine de la Foi, le cardinal Víctor Manuel Fernández, se voit reprocher d’être un piètre théologien – et un mystique bien bizarre.

Les Africains sont contre avec des arguments qui, en partie validés par le Vatican, remettent en question l’universalité de la doctrine, au point que leur attitude est un curieux pharmakon, remède et poison tout à la fois. Le reste du monde rappelle la doctrine et, surtout, s’étonne que la charité franciscanienne paraisse faire bon ménage des scrupules des fidèles n’ayant pas encore eu la témérité de contrevenir directement aux enseignements de l’Église.

Il semble que le fait d’aller synodaler en permanence jusqu’aux périphéries les plus lointaines et les plus brumeuses ait fini par surprendre même les mieux disposés. Sagement, ils viennent de décider que tout le monde n’avait pas vocation à aller discerner dans les confins avec une ébriété casuistique toute jésuite s’enchantant de trouver « l’incorruptible dans le corruptible, […] la hauteur dans la bassesse, la noblesse dans l’ignominie, la gloire dans la confusion. » Ils viennent de décider que l’ultramontanisme n’est plus le plus sûr moyen de perpétuer l’Église.