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Zemmour et la reconstruction de la droite : perspectives 

Éric Zemmour a-t-il les moyens de transformer son engagement personnel en un véritable mouvement politique ? L’espace qu’il a creusé entre RN et LR va-t-il se transformer et accueillir non pas seulement des “prises”, mais un véritable personnel politique visant le long terme ?

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Zemmour et la reconstruction de la droite : perspectives 

Dans un article précédent, je notais la persistance de l’hégémonie des idées dites de gauche – d’où l’emprise du « politiquement correct » et le conformisme médiatique. Le glissement indéniable à droite, sur le terrain politique et sur des thèmes comme l’immigration ou la sécurité, reste limité à certains aspects du débat politique, ce n’est pas l’émergence d’un mode de pensée alternatif. Je rappelais qu’un vrai changement supposerait un changement de paradigme dans le mode de pensée collectif, dont on reste loin.

Dans ce contexte, le phénomène Zemmour est important mais pas conclusif à lui seul. Outre qu’il reste loin d’une véritable pensée conservatrice, il incarne un retour du patriotisme sur la base d’un corpus de pensée dominant dans les années 50, comme tel souvent juste et utile. Mais il a suscité une réaction violente, qu’il aggrave par ses défauts, de la brutalité de langage à la défense d’idées contreproductives. Même si Zemmour a les 500 signatures, ses chances sont limitées. Cela dit, son irruption est globalement bénéfique. Mais qu’est-ce que cela peut donner à terme ?

Si on se base sur les données actuellement disponibles, voici ce qui me paraît le scénario le plus plausible. Même avec les 500 signatures, Zemmour ne serait pas au deuxième tour. Face à E. Macron on trouverait V. Pécresse ou M. Le Pen. Et Macron les battrait. Mais Macron n’a pas créé de vrai parti implanté, et il n’aura très probablement pas de majorité à l’Assemblée ; son règne absolu et son style olympien auront donc leur fin. Pour gouverner, il lui faudra un allié, et le seul qui aura les troupes pour cela, c’est LR, les Républicains. Qui ne pourront pas non plus gouverner seuls. Et donc leur alliance est très probable – comme beaucoup de gens le pressentent. A vrai dire les différences entre eux sont minces, hors la frange droite de LR. La conséquence en serait de revigorer la partie de LR que symbolise le choix de V. Pécresse ; mais en même temps d’exposer LR à un dilemme encore plus cornélien, car se mouiller plus encore avec E. Macron impliquerait de dégager dangereusement son flanc droit. Ce qui laisserait de la place pour une alternative de ce côté. Naturellement le rapport de force serait meilleur pour eux si c’est V. Pécresse qui est au second tour ; mais sans changer l’équation.

Ni du chiraquisme ni du lepénisme

Dans ce scénario, une fois de plus M. Le Pen raterait son coup. Mais moins nettement si elle est au second tour avec 45 % des voix. On peut imaginer alors qu’elle se maintienne en position en attendant 2027. Mais il n’est pas évident qu’elle profite pour autant des dilemmes de LR ; ce qui confirme l’existence d’un espace politique entre elle et LR. Si en revanche c’est V. Pécresse qui est au second tour, là le dilemme deviendrait beaucoup plus dur pour M. Le Pen, et l’espace alternatif à droite serait encore plus grand. 

Comme on voit, il y a des prospectives favorables pour le développement d’une offre politique à droite qui ne serait captive ni du chiraquisme ni du lepénisme. Indéniablement, E. Zemmour l’a réveillée et actualisée politiquement. Peut-il l’exploiter ultérieurement ? Cela suppose la construction sur la durée d’un mouvement politique, opération très différente tant du rôle de polémiste indépendant que de celui de candidat dans une élection hyper-personnalisée. D’autant que si c’est pour rééditer la personnalisation du pouvoir façon RN, cela ne servirait à rien. Cela suppose une évolution en profondeur dans un sens pluriel et bien plus rassembleur, faisant vivre ensemble sur la durée des personnalités multiples et pouvant rayonner au-delà d’un noyau dur de passionnés. Le tout malgré des perspectives électorales longues (sauf inattendu politique), qui impliquent de durer sans se mettre une opportunité sous la dent : il n’y aura pas d’élection majeure avant la fin du quinquennat en 2027, en dehors des européennes de 2024.

Ce n’est pas en soi infaisable, mais cela supposerait une nouvelle mutation d’E. Zemmour. À moins que quelqu’un d’autre prenne le relais, en accord ou pas avec lui…

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