Philibert Delorme, assez justement excédé par un enseignement historique défaillant, une culture historique nulle et des discours officiels aussi vertueux qu’ignorants et malfaisants, a décidé de raconter l’histoire de France en tordant le cou à tous les mensonges qui perdurent, malgré toute la science historique accumulée. Science qu’il mobilise d’ailleurs fort à propos, refusant autant d’écrire un roman national, anachronique, qu’une déconstruction en règle de la France. Sa Contre-histoire n’est pas téléologique (ni Louis XIV ni la Ve République n’étaient inscrits dans le destin de la Gaule), elle n’est pas un album d’images comme celles qu’établit la IIIe République (le chapitre consacré à Charles Martel est exemplaire), elle n’est pas non plus une relecture progressiste tout aussi anachronique ni un fervent plaidoyer en faveur de toutes les invasions. Sans jamais céder à l’éloge hors de propos ni à la trop facile critique a posteriori, Philibert Delorme raconte la France, ses rois, ses chefs, ses malheurs et ses succès. Les chapitres sont courts, la langue est claire, les faits sont établis, les mensonges sont dénoncés – y compris les chimères qu’une vision béate du passé a engendrées –, les querelles d’historiens sont signalées. On ne peut pas non plus dire que l’auteur n’a aucune opinion : sa charge contre le Comte de Chambord surprend par sa violence – mais au moins, on sent où vont ses sympathies ! Ce livre, survol à l’érudition dissimulée, est une très bonne introduction à un examen plus détaillé de notre histoire.

 Philibert Delorme, Contre-histoire de France. Ring, 2022, 496 p., 22 €.