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Noël ! Noël !

Les fêtes approchent. Et si on mettait un nouveau saint au calendrier ? Il suffit de suivre Laurent James, qui nous propose un Saint Fernandel fort réjouissant (éd. Nouvelle Marge).

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Noël ! Noël !

Voilà un bon saint pour rire, un de ces saints du double fond de la hotte de saint Nicolas, qui sert à pousser les enfants et les âmes simples dans la joie du Père par la porte d’à-côté, la petite porte où ne passent que les ravis, les coccinelles et les éléphants, dont l’apparence trompe énormément – à la crèche, ce qui fascine l’ingénu, c’est l’éléphant des rois mages, à peine plus gros qu’eux.

Dans cette hagiographie de fantaisie, on commence par la litanie de tous les personnages que Fernandel joua dans ses 148 films, dont la liste est fournie en appendice, avec deux oranges et un sucre d’orge. Ne comptez pas y apprendre ce qu’ils sont, comme il en irait avec des fiches bien documentées des Cahiers du cinéma. Vous y trouverez seulement un poème, propre à vous labourer les souvenirs, y faisant remonter divers vieux trésors un peu terreux. 

Ensuite, on déballe prestement les anecdotes, en arrachant le papier d’emballage. Fernandel est partout, il est tout, il a tout joué. Il fait penser au renne du fameux barbu en habit rouge, mais lui, il a une tête de cheval. On le reconnaît tout de suite, et dès qu’il est reconnu, tout le monde se marre. Il a beau tenter d’échapper à cette malédiction, rien n’y fait. « Il prend l’air affligé : on rigole. Il regarde par terre : on se tord. Il regarde en l’air : on se tape sur les cuisses. » Et pourtant, il n’était pas toujours amusant, comme en témoigne sa rivalité avec Raimu. Vous verrez : Laurent James vous raconte ça en détail. Mais toujours on revient à Noël, parce que Fernandel voulait bien faire toutes les pitreries demandées, sauf ne pas être chez lui à Noël avec sa femme et ses enfants pour accueillir convenablement le petit Jésus. C’est que cet immense acteur était aussi un chrétien du genre charbonnier, qui s’émerveillait avec les petits sans avoir la triste pensée de se guinder à la manière des vedettes avariées. 

Il ne manque même pas les miracles nécessaires, au moins dans ses films. Vous vous souvenez de Don Camillo en conversation avec son Seigneur en croix ? À ces ravis-là, on peut raconter sans hésitation que ce qui arrondit le dos des petits bossus, ce sont les ailes de chérubins qui sont en train de leur pousser.

On comprend qu’à écrire la vie d’un tel saint, l’auteur ait été pris d’une transe de la plume, qui le transforme en David devant l’écran de lumière, un David éperdu qui s’envole sur ses phrases comme sur des tapis volants ! Je vous aurai prévenus : nuques raides, s’abstenir, car vous aurez un peu le torticol en essayant de le suivre dans ses courses sur les nuages. Cela dit, les phrases de cet auteur carillonnent aussi frénétiquement que la clochette de ce diablotin d’enfant de chœur dans Les trois messes basses d’Alphonse Daudet, et c’est assez réjouissant pour veiller en sa compagnie !


Noël, c’est aussi le moment des contes. Voici donc Bébé d’Olivier Rasimi (éd. Arléa), qui nous raconte l’histoire du nain du roi Stanislas, le dernier duc de Lorraine, beau-père de Louis XV, une histoire sérieusement documentée, filée avec tant de tendresse et de poésie que c’en est un fameux cadeau. Il n’est pas facile de se mettre dans la peau d’un nain, mais l’auteur a découvert qu’il y a des âmes qui restent à flotter dans les images où on peut les toucher du cœur, et entrer dedans comme un nain dans un pâté. Il suffit d’un tableau, et nous voilà dans un univers de porcelaine rocaille ! avec les cruautés inséparables de ces cours où les nains servaient de jouets, et en devenaient méchants, conformément à leur nature mystérieuse, entre monstre et lutin. L’auteur est bien obligé de mêler le fiel à ses douceurs pour ne pas trahir la vérité ; cependant, il reste si humain, si tendrement curieux, tellement délicat styliste qu’on peut faire de son livre une sorte de préparation méditative à la visite du petit Jésus, rejeté par les fêtards indifférents dans son étable obscure. 


Puisque nous voilà devant la crèche, déposons sur la paille quelques cadeaux plus classiques. Comme il convient que chacun ait le sien à son humeur, je proposerai d’abord un roman pour le plaisir brut de la lecture, celui de Valérie Perrin, Trois (éd. Albin Michel). Les personnages sont trois amis, deux garçons et une fille, unis depuis l’école primaire, et dont l’histoire est racontée par une autre fille, tenue à l’écart de leur groupe, mais qui en reste passionnée au point de vouloir les retrouver des années plus tard, alors qu’elle est devenue journaliste et enquête sur une mystérieuse voiture avec squelette, remontée d’un lac après un long séjour dans la vase. À côté de ce lac, où trempent les souvenirs comme du vieux linge crasseux, l’autre pivot de l’histoire est un refuge de la SPA, dirigée aujourd’hui par la fille du groupe, qui a trouvé sa vocation dans le sauvetage des toutous abandonnés. 

Valérie Perrin connaît son affaire : le mécanisme de son récit fonctionne à la perfection, mêlant les époques et les points-de-vue avec subtilité, de telle sorte qu’on est pris, et que ses plus de six-cents pages sont avalées avec un plaisir goulu, jusqu’à un final particulièrement réussi. L’auteur ensemence son intrigue de jolies notations, de scènes vivantes et variées, grâce à une observation attendrie des tourments que le cœur des hommes doit endurer. On se divertit à cette lecture, ce qui n’empêche pas qu’on en soit nourri, et qu’on en sorte heureux, quasi fier de l’avoir dégustée.


Pour dernière surprise, je vous propose un livre qui appartient à la littérature pour amateurs de haute graisse, et plus particulièrement à la poésie nourrie de correspondances baudelairiennes, le dernier roman de François-Henri Désérable, Mon maître et mon vainqueur (éd. Gallimard, Grand Prix du roman de l’Académie française). Ce titre est un demi vers de Verlaine, qui appelle ainsi son cœur. Rien d’étonnant : l’auteur va nous raconter une histoire d’amour où le « cœur » joue un rôle surprenant, et qui fleurette avec l’aventure attristante que le pauvre Lélian eut en s’amourachant de la petite frappe mosellane, « l’homme aux semelles de vent ». On a même en prime la photographie du revolver avec lequel le plus ivrogne tira sur le plus bête.

Je crois cependant que le cœur n’est pas vraiment la cause des malheurs des héros, ce cœur calomnié qui serait plutôt en chacun la victime de ses passions incontrôlées. Aussi me semble-t-il qu’un autre hémistiche de Verlaine aurait pu étiqueter plus justement cette histoire drolatique, celui qui ouvre un poème de confidences du recueil Amour : « J’ai la fureur d’aimer ». Car il s’agit bien de cette fureur du corps que le désir affole et transforme en tyran. Tina, l’héroïne, en est possédée, comme l’explique le narrateur au juge : « il y avait surtout le désir de Tina, avide et violent, impérieux désir auquel on ne pouvait pas si facilement se soustraire : Tina subordonnait le réel à son désir. » 

S’il y a un juge, c’est qu’il y a un procès, un procès pour un crime, dont je ne vous dirai rien. L’habileté malicieuse de l’auteur consiste à nous faire découvrir l’histoire de Tina, Edgar et Vasco à travers les réponses que fait le narrateur à ce juge, qui voudrait comprendre ce qui s’est passé, tâche surhumaine puisqu’il s’agit de comprendre ce que nul ne comprend : les folies auxquelles on se livre soudain, saisi qu’on est – autant que surpris – par les exigences de ce cœur que Pascal disait « plein d’ordures », c’est-à-dire de déjections diverses. Parce qu’il s’en est passé, des choses, et des vilaines ! 

Racine est un des modèles cachés de l’auteur, Racine, le metteur en scène de la passion déchaînée, qui conduit Phèdre à s’abandonner en hurlant de chagrin au trouble que Vénus fait s’élever dans son « âme éperdue ». Tina est aussi folle, mais au lieu de s’en punir par la mort, elle se contente de s’enlaidir, comme Lamiel, héroïne de Stendhal, autre modèle enfoui – elle-même s’inspirant, avec moins de fureur, de Célidée, personnage de L’Astrée – « on n’est pas sérieux quand on a 17 ans », les hommes d’aujourd’hui ont acquis cette adolescence permanente qui fait qu’ils ne sont jamais sérieux, pas plus en leur maturité de guignols qu’en leur décrépitude de Pantalons. 

Un doute me vient. La crudité de ce récit convient-elle pour un cadeau de Noël ? Bah ! réservons-le à des adultes aguerris par la lecture de notre vieux François – le moine à si grand gosier que ça ne le gênerait pas de venir à la crèche un peu pompette – et le tour est joué !

 

  • Saint Fernandel Laurent James, Nouvelle Marge, 97 p., 15 €.
  • Bébé, Olivier Rasimi, Arléa, 232 p., 18 €.
  • Trois, Valérie Perrin, Albin Michel, 672 p., 21,90 €.
  • Mon maître et mon vainqueur, François-Henri Désérable, Gallimard, 192 p., 18 €.

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