Lors de son discours aux ambassadeurs français réunis à Paris le 29 août, pour la première fois, de manière claire, Emmanuel Macron a désigné l’ennemi : «Le terrorisme islamiste». Mais est-ce suffisant ?
Avec les derniers attentats en Espagne, à Barcelone et à Cambrils, le terrorisme islamiste fait à nouveau la « une » de l’actualité. Sur ce sujet, chaque État d’Europe occidentale a sa propre politique. La politique antiterroriste au niveau européen n’est pas l’essentiel, contrairement à ce que pense le président Macron. Chaque État sait bien que l’arme antiterroriste est d’abord dans les mains des services secrets et ces dispositifs spéciaux n’ont pas tendance à faire confiance aux services des pays voisins.
Les Services français
Le dispositif français fait partie des meilleurs systèmes, aujourd’hui, si l’on fait des comparaisons internationales. Certes, nos services ne disposent pas des immenses ressources budgétaires des États-Unis, mais la qualité humaine des agents y semble assez supérieure. La France a une certaine antériorité pour comprendre ce qui se passe dans le monde musulman. Israël et le Royaume-Uni ont aussi des services secrets réputés. En France les principaux services dépendent des ministères de l’Intérieur (DCRI, qui a succédé à la DST) et de la Défense (DGSE principalement).
Ces services sont efficaces : 80% des tentatives d’attentats sont repérées à temps. Mais ils commencent à être à court d’effectifs devant la montée du nombre des guerriers islamistes infiltrés, les djihadistes. Macron vient de réorganiser les services antiterroristes et a choisi les hommes les plus efficaces comme le préfet Pierre Bousquet de Florian, nommé récemment à la tête du Centre National du Contre-Terrorisme.
Prévenir, soit, mais comprendre, c’est mieux.
Outre les services secrets, les fonctionnaires et militaires des services de la police judiciaire et de la gendarmerie ont également de grandes qualités professionnelles. Ces services de police judiciaire travaillent pour La section antiterroriste du parquet de Paris. La loi du 9 septembre 1986 définit l’infraction terroriste et donne les compétences exclusives aux magistrats de Paris. D’autres lois retardant la prescription des actes, autorisant les perquisitions et saisies de nuit, autorisant la fouille des véhicules, prévoyant le blocage des sites internet et prévoyant une interdiction administrative de sortie du territoire (2014) complètent le dispositif. Notre système judiciaire est moderne et est souvent copié à l’étranger. L’état d’urgence décrété après l’attentat du Bataclan et prorogé depuis lors, mais qu’une nouvelle loi, prochainement votée au Parlement, permettra de remplacer, autorise toutes les mesures nécessaires au contrôle de la situation.
La riposte intellectuelle
Un jour, je déclare à mes collègues du ministère de l’Intérieur que tout ce cadre législatif est efficace mais qu’on reste incapable d’empêcher le recrutement de nouveaux jeunes djihadistes prêts à sacrifier leur vie dans leur combat contre l’Occident « impie » dont la France est une cible principale. Réponse de mes collègues : on va leur apprendre « les valeurs de la République », notamment de la laïcité et de la déclaration des droits de l’homme. Je répliquai que l’histoire montre que l’homme est prêt à mourir pour sa famille, sa patrie ou son Dieu mais, certainement pas pour « les valeurs républicaines » ou la laïcité ou la sécurité sociale ou pour une déclaration idéologique.
Beaucoup de nos fonctionnaires et militaires ne sont pas formés à comprendre la pensée totalitaire d’un djihadiste islamique. Les hommes politiques, Macron en tête, sont encore plus loin de la réalité. Il faudrait avoir une formation philosophique et surtout historique qui a disparu au sein de nos élites depuis longtemps. Si j’avais un conseil à donner au gouvernement actuel, je dirais à nos Excellences de lire d’urgence Les Démons de Fiodor Dostoïevski où le célèbre écrivain russe décrit la mentalité d’un cercle de terroristes socialistes sous la Russie des Tsars. Un des personnages, écoutant les projets du chef des révolutionnaires, lâche le mot : « Vous êtes un ivrogne, non d’alcool mais d’idéologie ». On peut être ivre, intoxiqué par l’alcool comme par l’idéologie. Les cours de « déradicalisation » donnée aux djihadistes capturés sont ridicules face à cette réalité. À preuve, tous les mécomptes de ces derniers temps, pourtant si coûteux !
Les pratiques de la Terreur sont toujours les mêmes : la France en sait quelque chose.
Il faudrait lire les écrits des fondateurs du mouvement révolutionnaire islamiste moderne, Sayid Qutb et El Mawdudi. Ils expliquent clairement que leur but est le Califat mondial, la norme le Coran dans son interprétation littérale, les acteurs les soldats d’Allah (djihadistes) prêts à mourir, et la terre d’islam la base appelée à s’étendre au monde entier par la guerre sans merci. Notre société sans idéal, sans religion, sans esprit de sacrifice, sans patriotisme, est mal armée pour résister. Macron est un inspecteur des finances passé par la banque Rothschild : comment peut-il comprendre un révolutionnaire religieux ? De plus, comment condamner des révolutionnaires, fussent-ils islamistes, lorsqu’on a été élevé dans l’approbation de la Terreur comme mode de gouvernement, telle qu’elle fut conçue par un Robespierre ou quand on ne condamne pas les colonnes infernales qui ont ravagé la Vendée ? On s’est horrifié des décapitations accomplies par l’État islamiste mais qu’a fait la République française à ses débuts sinon couper des têtes ?
La faille immigrationniste
La deuxième faiblesse de Macron est sa tendance à décrocher la lutte antiterroriste du problème de l’immigration. L’idéologie d’ivrogne qu’est l’anti-racisme lui interdit d’aborder le sujet. Pourtant un terroriste ne peut rien faire si le terreau social lui est totalement hostile. Il ne peut agir s’il ne trouve pas des complicités même passives dans certains quartiers. Mao Tsé-tung disait que le révolutionnaire efficace devait vivre parmi les prolétaires comme le poisson dans l’eau.
Dans un pays sans immigration musulmane comme la Pologne, il n’y a jamais d’attentat islamiste, pas plus qu’en Tchéquie, en Slovaquie ou en Hongrie, pays qui s’insurgent tous contre la politique d’accueil des « réfugiés » de la Commission européenne. L’actualité terroriste leur donne raison.
Nos services doivent surveiller non seulement les terroristes fichés mais encore ceux qui appartiennent aux différents cercles concentriques de la population musulmane sur notre sol. Le premier cercle est constitué de ceux qui ne feront jamais un attentat mais qui apportent de l’aide (une voiture, un appartement, etc.). Le deuxième cercle est composé de ceux qui approuvent l’idéologie islamiste sans avoir la moindre activité : mais il ne faut pas s’attendre à les voir dénoncer les criminels. Le troisième cercle comprend ceux qui sont indifférents, et ils sont nombreux. Puis il y a ceux qui sont horrifiés par les attentats. On voit alors qu’il faut surveiller non quelques milliers de terroristes actifs, ce qui est déjà difficile, mais des populations bien plus nombreuses. Des sondages effectués en France ou au Royaume-Uni montre que jusqu’à 30% des populations concernées approuvent l’idéologie islamiste révolutionnaire, soit, pour la France, deux ou trois millions de personnes.
Macron dispose d’un outil policier et judiciaire qu’il n’a pas créé et qui a une véritable efficacité. Mais cet outil ne saurait suffire. Il faudrait être apte à comprendre l’adversaire islamiste qui est un adversaire révolutionnaire comme on en a connu dans le passé. Il a fallu un siècle pour que le communisme perde son pouvoir d’attraction et d’addiction. Cela risque d’être pareil avec l’islamisme révolutionnaire. Or, bien comprendre une révolution est difficile lorsqu’on a été élevé dans le catéchisme républicain des grands bourgeois. Il faudrait changer drastiquement la politique d’immigration pour supprimer le terreau sociologique qui permet aux terroristes de vivre parmi nous. Mais l’idéologie dominante empêche les dirigeants d’avoir une vue saine sur le sujet ! Âme de Dostoïevski, priez pour nous !
Dernier ouvrage :
Le terrorisme islamiste, un mouvement révolutionnaire
Editions Apopsix.