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Le mur du mépris

Le terrorisme intellectuel que la gauche exerce sur les esprits de la caste politique et médiatique est un alliage dosé de mensonge, d’aveuglement et d’idéologie que Jean Sévillia fait fondre au feu de ses analyses.

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Le mur du mépris

Ce formidable succès de librairie que fut en 2000 Le terrorisme intellectuel de Jean Sévillia aurait pu n’évoquer que des années de pensées de totalitarisme intellectuel dont nous aimerions sourire aujourd’hui en nous gaussant d’avoir réussi à percer le mur de sophismes, d’amalgames ou d’intimidations qui ont fait les beaux jours de la scène intellectuelle. Or, s’il est toujours très agréable de découvrir et lire un nouvel ouvrage de Jean Sévillia, la joie en est quelque peu altérée à constater que, depuis 50 ans, non seulement le terrorisme intellectuel est toujours bien présent, mais qu’il a, en outre, revêtu de nouveaux atours. La police de la pensée, détenue par un petit milieu qui se targue de détenir les clés de la vérité et s’empresse, avec la hargne des esprits repus de leur bien-pensance, de décider ce qui doit être légitimement dit, défendu et mis en avant, le bien en somme, ne cesse de sévir et s’est même radicalisée.

Se réclamant des valeurs de la République pour se draper dans la dignité autorisée d’une élite auto-proclamée, la police de la pensée fait rimer avec un brio sidérant liberté avec censure, égalité avec discrimination, fraternité avec exclusion. Une intolérance idéologique qui s’agenouille devant le sacro-saint progressisme dont la tyrannie et l’ampleur évoluent avec le temps, au gré des lubies de l’histoire et d’une gauche totalitaire qui pourfend l’hérétique et terrorise ses adversaires avec un zèle qu’elle ne saurait envier à ceux qu’elle vilipende pourtant à ce titre sur les sujets dont elle s’empare. Gare à ceux qui osent sortir du rang, et beaucoup d’intellectuels qui provenaient originellement de cette famille et ont adopté des positions de rupture se sont vus rappelés à l’ordre comme étant les nouveaux réactionnaires. Philippe Muray pouvait à ce titre paraître comme visionnaire dans son livré publié en 1991 L’Empire du Bien.

Terroriser par la reductio ad Hitlerum

Depuis 2000, le terrorisme intellectuel s’est installé et s’est fortifié sur le terreau d’une Europe dénaturée, d’un communautarisme exalté, d’une instrumentalisation de notre passé, d’une culture de l’excuse exacerbée, des bouleversements anthropologiques, d’une montée de l’islamisme, de l’émergence du wokisme et du racialisme. Peu importe le domaine, au fond. Comme le rappelle Jean Sévillia, le procédé reste toujours le même : imprimer dans l’imaginaire collectif un archétype du mal pour faire taire tout adversaire, jusqu’à pratiquer la reductio ad Hitlerum, le fameux point Godwin. Une torsion du réel que Jean Sévillia, dans ce nouvel ouvrage, dénonce avec l’élégance de plume et le talent intellectuel qu’on lui connaît, au travers de douze chapitres revus et parfois abrégés, issus de son livre originel de 2000, auxquels viennent s’ajouter huit nouveaux chapitres balayant les terrains actuels de foisonnement de ce système dont les mécanismes sont bien connus, mais dont la forme est diffuse et insaisissable.

Combien de sujets à l’heure actuelle sont devenus des champs de mines au point que leur simple évocation a pour effet immédiat de vous vouer aux gémonies ou, à tout le moins, de tester la capacité de résistance et d’endurance du courageux qui osera s’y risquer. Colonisation, esclavage, Seconde Guerre mondiale, identité nationale, patrie, famille traditionnelle, transgenre, roman national, rois de France, et tant d’autres sujets où seule est respectable la position officielle du Camp du Bien. Une chasse aux sorcières qui se joue à coups de pétitions, de demandes de censure, de procès, de barrages républicains, de cris d’orfraie et d’indignation, pour mettre au ban tous ces prétendus néo-réacs et néo-fachos qui osent défendre ou mettre en avant des idées jugées nauséabondes.

Pour citer Mathieu Bock-Côté, qui a préfacé cet ouvrage, résister « c’est assumer un patrimoine de civilisation qui nous transcende, nous illumine, qui nous ancre et nous élève tout à la fois. » À être toujours plus dans l’excès, il est à prévoir que ce système qui commence déjà à se fissurer n’aura pas éternellement de beaux jours devant lui. Des voix s’élèvent, fort heureusement, et celle de Jean Sévillia nous est précieuse. Dévoiler ce système pernicieux est un acte de résistance en soi, en prendre connaissance un devoir, aimer son pays une obligation, rester dans l’espérance, une vertu à cultiver.

 

Jean Sévillia, Les habits neufs du terrorisme intellectuel. Perrin, 2024,416 p., 23€.

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