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Dissolutions, la République terroriste

La Ve République a fait de l’intolérance une règle institutionnelle, inscrite dans sa pratique et de plus en plus dans ses lois. Une intolérance institutionnelle qui relaie celle des groupes de pression progressistes et débouche sur un totalitarisme d’État intellectuel et moral sous couvert de défendre les nébuleuses mais sacrées « valeurs de la République ».

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Dissolutions, la République terroriste

La révolution est en marche. Le règne de la Terreur commence. Certes, il ne s’agit pas de la Terreur de 1793-1794, avec ses charrettes et ses monceaux de têtes coupées. Il s’agit de la poursuite, jusqu’à son terme, du processus de terrorisme idéologique et moral qui n’a cessé de s’amplifier depuis près de soixante ans, et qui consiste en la mise au ban de la société de tous ceux qui ne souscrivent pas aux « valeurs de la République » telles que les entendent la gauche, l’intelligentsia, les maîtres des médias, tous libéraux, politiquement corrects, européens, mondialistes, polyethnicistes, multiculturalistes, acquis à la défense inconditionnelle du droit à l’avortement, à la PMA, à la GPA, à la promotion du mariage homosexuel, des droits des LGBT, et donc hostiles à toute vision politique en opposition avec tout cela, en particulier à la morale traditionnelle et au principe de la préférence nationale, au motif qu’une telle inclination tiendrait de la « provocation à la haine », s’inscrirait en faux relativement aux principes fondateurs de notre démocratie, relèverait de « l’ultra droite », du « fascisme », et nous ramènerait aux « heures les plus sombres de notre histoire ». « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté », déclarait Saint-Just, qui s’entendait à envoyer au « rasoir national » tous les ennemis de la dictature instaurée par Robespierre, eussent-ils été (comme les Girondins ou les Dantonistes) les plus ardents des révolutionnaires. Exagération ? Nullement, hélas. En septembre 2015, Julien Sanchez, maire RN de Beaucaire, se permettait de critiquer la politique migratoire du gouvernement Valls au cours d’une assemblée de 600 maires invités par Bernard Cazeneuve, alors ministre de l’Intérieur. Son discours fut couvert par les huées et les injures, et on entendit, de la part d’un de ces édiles, le « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ! » de Saint-Just, auquel nous faisions allusion. Ce genre de propos est devenu banal dans toute la classe politique et tout le milieu médiatique. En 2023, il semble que tous les gens qui s’expriment par des articles, des livres, des émissions télévisées ou des conférences, considèrent comme normal que ceux qui ne partagent pas leur orientation gauchisante, pseudo-humaniste et européo-mondialiste soient vilipendés, stigmatisés, interdits de d’accès aux médias et aux lieux de réunion dans « l’espace public », poursuivis en justice lorsqu’ils parviennent malgré tout à se faire entendre ou lire, exclus de la fonction publique, et persécutés de toutes les manières possibles.

L’intolérance institutionnalisée

Et, là encore, nous n’exagérons pas. Jamais l’intolérance n’a été à ce point institutionnalisée dans notre pays comme elle l’est depuis une bonne dizaine d’années. On considérait naguère les libertés de pensée et d’expression comme inviolables et sacrées, et donc applicables sans discussion à tous, y compris à ceux qui, non seulement s’opposaient au pouvoir politique en place, mais professaient des idées à contre-courant de celles dont se réclamaient ce dernier et ces pouvoirs collatéraux que sont l’intelligentsia et la classe médiatique. On affirmait haut et fort que la liberté ne se divise pas. On ne considérait pas les libertés de pensée et d’expression comme subordonnées au respect à la lettre des principes fondateurs de la démocratie, formulés dans notre constitution. Il n’en va plus ainsi désormais. Au motif que notre constitution repose sur l’adhésion à la Déclaration des Droits de l’homme et du Citoyen (comme le précise son préambule) et « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion » (article 1er), on considère comme contraire à ces principes, et discriminatoire, tout propos hostile à une immigration non réglementée et se justifiant par des considérations mettant en avant le risque pour notre identité nationale d’une intégration sans limite de ressortissants de pays culturellement trop différents du nôtre pour être pleinement assimilables. De tels propos sont jugés incompatibles avec les « valeurs de la République », dont tous les partis nous rebattent les oreilles. Pire qu’inconstitutionnels (et donc incompatibles avec la démocratie), ils sont jugés vecteurs de haine et lourds de dangers pour l’ordre public, la sécurité intérieure, et la sécurité physique des personnes, en raison de la tentation de discrimination ou d’agression qu’ils peuvent provoquer à l’encontre de gens issus de l’immigration. Ainsi, nos dirigeants ont, par l’article 16 de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021, modifié dans un sens scandaleusement liberticide l’article L 212-1 du Code de la sécurité intérieure relatif à la possibilité pour l’exécutif de dissoudre des groupements politiques (ou intellectuels) censément hostiles aux principes dont ils font, dès lors, des instruments d’intolérance active et d’oppression. En effet, le sixième point de cet article ainsi modifié stipule que peuvent être désormais dissouts les groupes « qui, soit provoquent ou contribuent par leurs agissements à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine, de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée, soit propagent des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence ».

Dans sa version initiale, cet article ne comportait pas ce point particulier. Son adjonction, manifestement inspirée par des considérations partisanes (imagine-t-on les auteurs du texte initial se souciant du « sexe » et de l‘ « orientation sexuelle » de certains ? Il s’agit là du résultat de la pression des lobbies LGBT, c’est évident) et par une vive intolérance, permet au gouvernement de dissoudre toute association dénonçant les risques de l’immigration de personnes culturellement inassimilables par notre nation, critiquant les conséquences nocives de l’avortement sans restriction, du mariage homosexuel, de la destruction de la famille traditionnelle, des agissements sourdement anti-français et anti-occidentaux de certains groupes musulmans, etc. De telles limites imposées à la simple liberté d’existence et aux libertés de pensée et d’expression sont proprement effarantes. Désormais, il sera interdit de critiquer le droit à l’avortement et de s’inquiéter – fût-ce en se fondant sur une argumentation objective, sérieuse et précise – des effets délétères pour notre civilisation de tous les bouleversements sociaux et sociétaux à l’œuvre depuis deux ou trois décennies, et qui affectent nos mœurs, notre morale et notre identité ethnique et culturelle. Nous devrons tous nous montrer, sans ambiguïté, ultra-féministes, libéraux en toutes matières, européens, mondialistes, cosmopolites, anti-nationalistes, hostiles à toutes les traditions, favorables à l’émergence d’une société de melting pot, ouverts à toutes les « différences » LGBT, écologistes bon teint, animalistes et végétariens ou en bonne voie de le devenir… à l’instar de toute notre classe politique « républicaine » (tous partis confondus), de notre classe médiatique et de notre intelligentsia, auxquelles le bon peuple devra se rallier, et ne manquera pas de le faire, abruti par un perpétuel conditionnement audiovisuel, informatique et journalistique.

Jusqu’il y a peu, la pensée unique, le politiquement correct, le conformisme intellectuel et moral ne constituaient rien de plus, à eux trois, qu’un mal (certes très inquiétant) de notre société, qu’il était encore possible de critiquer dans des espaces de liberté, et, quelquefois dans les espaces éminemment publics. Tel n’est plus le cas. Il est désormais interdit d’exprimer publiquement des idées hostiles aux prétendues vérités et aux valeurs consacrées par le pouvoir politique et le pouvoir médiatique.

Le totalitarisme intellectuel et moral. La multiplication des dissolutions et des interdictions de réunions

Dès lors, il convient de ne plus parler de conformisme, mais de totalitarisme intellectuel et moral (et politique, bien entendu). Toute échappatoire est désormais impossible : on acquiesce ou on se tait. Aussi, les dissolutions et interdictions pleuvent sur les non-conformistes depuis dix ans. En juillet 2013, Manuel Valls, Premier ministre, dissolut cinq formations politiques de droite coupables d’avoir manifesté contre le mariage homosexuel, et censément responsables de la mort de Clément Méric, cet « antifa » mort en ayant essayé de frapper par derrière un militant nationaliste. En avril 2019, le gouvernement d’Édouard Philippe dissolut sept groupes nationalistes, simplement en raison de leurs idées ou des prétendus « dangers » qu’elles représentaient. Au total, depuis la première élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République en 2017, 33 groupes divers ont fait l’objet soit d’une dissolution, soit d’une menace ou d’une annonce d’une dissolution prochaine.

Ce ne sont pas seulement les dissolutions qui s’abattent sur les groupes placés dans le collimateur du pouvoir. Les interdictions de réunion dans « l’espace public » s’abattent également sur eux. Ainsi, l’institut Iliade a vu son colloque annuel habituellement tenu à la Maison de la Chimie, à Paris, interdit en mai de cette année au motif qu’« il existe des risques sérieux pour que, à l’occasion de cet hommage, des propos incitant à la haine et à la discrimination soient tenus ». Gérald Darmanin a d’ailleurs envoyé une circulaire à tous ses préfets leur ordonnant de prendre de telles mesures d’interdiction à l’égard de réunions organisées par des associations ou partis à orientation nationaliste ou identitaire, en invoquant ce type de motifs. Et on sait qu’aux yeux du pouvoir (quels qu’en soient les maîtres du moment), de toute la classe politique et des patrons et animateurs des médias, il suffit qu’un propos ait tant soit peu une coloration ou une connotation nationaliste, identitaire, anti-islamiste et se prononce, fût-ce timidement, contre les méfaits de l’immigration sans frein ou de tel lobby LGBT ou autre, pour se voir taxé d’ « incitation à la haine et à la discrimination » et valoir à ses auteurs une mesure d’interdiction ou de dissolution. Dernière mesure destinée à frapper les adversaires de la pensée unique, du conformisme moral, du totalitarisme idéologique actuel : la suppression des aides publiques aux périodiques politiquement incorrects. Aucun de ceux-ci ne bénéficie plus, depuis un an, de telles aides.

Une chape de plomb s’est abattue sur notre pays. Une chape de plomb qui consacre l’hégémonie de l’idéologie et de la morale gauchères actuelles et en révèle la véritable nature : celle d’un implacable totalitarisme. Un totalitarisme étayé sur de prétendues « valeurs de la République » et de faux et hypocrites principes humanistes qui font consister la liberté et les droits de la personne dans des comportements et des modes de vie destructeurs des valeurs fondatrices et gardiennes de notre civilisation, et générateurs d’un brave new world sans valeurs réelles, sans transcendance, sans traditions, sans hiérarchie autre que celle du pouvoir et de l’argent, sans ordre autre que policier, sans famille, et, pour tout dire, sans âme. Un totalitarisme qui est celui d’un monde où on se soucie bien plus des droits des LGBT et de la liberté des femmes d’avorter (ou de se faire inséminer) à leur gré que de la condition matérielle des millions de nos concitoyens confrontés à la précarité et à la vie chère, sans parler des problèmes climatiques et environnementaux. Bref, un monde de cauchemar dont la philosophie prétendument individualiste et libertaire cache, plutôt mal que bien d’ailleurs, une profonde misère matérielle et morale, un désarroi abyssal, une décadence irrémédiable et un ordre autoritaire faisant régner une police de la pensée prompte à vouer à la marginalité tous ses opposants, sans être nullement capable d’améliorer le sort de ceux qui vivent en lui.

Une singulière hypocrisie fondée sur la diabolisation des victimes et la victimisation des oppresseurs

C’est de ce péril-là qu’il convient de s’alarmer, avec sa pseudo-éthique droit-de-l’hommiste, humaniste, libérale et soi-disant démocratique, en réalité intolérante, policière et discriminatoire, et non, comme le font la gauche, les macroniens, la droite « républicaine », les médias et les « antifas », du risque de retour au pouvoir d’une « extrême droite » fasciste. Et l’une des hypocrisies de notre temps consiste précisément à sonner le tocsin pour annoncer ce retour tout à fait impossible et à en présenter les prétendues manifestations comme les signes tangibles de la progression des « fascistes » dans leur conquête de l’opinion au moyen de leur mainmise sur certains médias, en attendant leur (re)conquête du pouvoir politique. Ainsi, à entendre, secrétaire générale EELV, qui s’alarme de l’existence de CNews et de Valeurs actuelles, on a l’impression que « l’extrême droite » occupe une position prépondérante dans nos médias, se trouve en mesure de conditionner l’esprit de nos malheureux compatriotes, et est bien partie pour accéder au pouvoir, Bolloré et Zemmour jouant le rôle de fourriers du fascisme. Madame Tondelier fustige l’absence de pluralisme à CNews, oubliant délibérément qu’en réalité l’absence de pluralisme caractérise actuellement l’ensemble des médias français et consiste en la domination absolue de la pensée unique que nous décrivions plus haut, et en l’exclusion ou la diabolisation de tout ce qui s’y oppose, à commencer par cette « extrême droite » si critiquée par la patronne des Verts, et de plus en plus privée de possibilités d’expression en dehors de CNews ou Valeurs actuelles.

Ce jeu n’est pas innocent. Il consiste à criminaliser les victimes du totalitarisme ambiant en justifiant les mesures discriminatoires prises à leur encontre, et à faire passer ce même totalitarisme pour le paradigme incontournable de la liberté, de la démocratie et de la défense des droits de la personne. Et, hélas, cette mystification fondée sur une inversion des rôles marche plutôt bien. Mais devons-nous nous en étonner de la part d’un peuple qui a fondé sa démocratie sur le culte de la Révolution française et de la Terreur, laquelle a accouché de la promesse d’une société égalitaire idéale et dont le gouvernement de Salut public a fait face à la coalition des monarchies européennes ?

 

Illustration : « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté. » Saint-Just, rédacteur de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1793.

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