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Macron-le-funèbre

Macron s’est rué à Ajaccio pour serrer la main de François. Il a réussi à le coincer à l’aéroport pour lui offrir le livre officiel de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris, Rebâtir Notre-Dame de Paris.

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Le pape avait pourtant tout fait pour bien faire comprendre au président non seulement qu’il tenait les vieilles pierres en petite estime mais en plus qu’il avait du mal avec un chef d’État sanctuarisant l’avortement, qu’il assimile à un assassinat, et promouvant l’euthanasie, qu’il considère comme un « échec d’amour ». Mais Macron ne voit que sa gloire, et il ne mesure plus sa gloire qu’aux mains illustres qu’il serre et aux épaules renommées qu’il enlace ; tant pis si on lui tend trois doigts avec une moue dégoûtée, il les saisit quand même et prend un selfie.

Fini, le maître des horloges

Il aimerait mesurer autrement sa gloire, aux échos flatteurs de ses déclarations publiques, par exemple, comme lorsqu’il séduisait l’Union européenne avec son discours de la Sorbonne, aux encens qui monteraient vers lui du peuple, aux décisions mondiales frappées du sceau de son génie, que sais-je, au respect des hommes qui l’entourent, respect chargé d’un étonnement sacré pour la clarté de ses vues ?

Mais Bayrou va partout disant qu’il a forcé Macron à le nommer, se moque comme de colin-tampon des « formats Élysée » que Macron lui avait recommandé d’utiliser pour ses consultations – consultations qu’il a inaugurées en recevant le RN que le président avait exclu – et impose son calendrier pour nommer son gouvernement : fini, le maître des horloges. Pendant ce temps, Macron voit son Mémorial du terrorisme annulé, le Pass Culture critiqué – il semblerait que ce soit moins démocratique que prévu –, le SNU empêché de s’étendre, avant d’être probablement supprimé… Pas un de ses hochets n’aura duré. Non seulement les politiques français lui en veulent et le méprisent, mais le peuple français le hait et va jusqu’à souhaiter la disparition de la Ve République uniquement parce que Macron affirme qu’il en est le gardien et s’en sert pour justifier son maintien au pouvoir.

Ne pas laisser s’éteindre le rêve européen

Quand il n’est pas en train d’appeler tout son agenda pour être certain qu’un homme véritablement important va accepter d’être photographié avec lui lors de ces cérémonies et de ces sommets qu’il affectionne – et que les Français ne supportent plus –, il se promène, inaugure un bâtiment de l’OMS à Lyon, qui aura coûté 120 millions à la France, se rue à Mayotte – on imagine le coût et le tracas de ce voyage inutile –, va en Éthiopie inaugurer le Palais national, transformé en « une institution culturelle et patrimoniale de niveau international, dont le programme scientifique et culturel, la gestion et la gouvernance seront définis de manière durable et inclusive pour des publics diversifiés » selon l’Agence française de développement qui y a englouti 25 millions d’euros. Inutile de rappeler une fois encore le bilan africain de Macron. Pathétique, il saute comme une petite puce à la surface du globe ; ou adresse depuis Paris des messages vidéo aux Géorgiens en condamnant les violences policières – impudique inconscience de celui qui accepta et justifia que la police française éborgnât des Français – en les appelant à ne pas laisser « s’éteindre le rêve européen » et à soutenir une présidente rebelle, française naturalisée depuis peu et formée à Washington, s’accrochant au pouvoir malgré les élections. Pendant ce temps, Ursula von der Leyen valide le Mercosur après avoir boudé Notre-Dame et reprend à son compte toutes les “bonnes idées” unionistes de Macron mais en les tournant systématiquement au profit de l’Allemagne et des États-Unis. Son discours à la Sorbonne pourra bientôt être réédité comme un manuel de déconstruction française.

Il ne reste à Macron ni pouvoir ni avenir (aux Français non plus mais bon, s’il fallait vraiment se préoccuper du peuple…) ; alors, cédant invinciblement à sa nature profonde, il va une fois de plus célébrer la mort, miroir dans lequel il se regarde de plus en plus souvent. Il manquait un accessoire à sa panoplie de grand ordonnateur des fêtes macabres, il vient de l’ajouter : Mayotte sera l’occasion d’un deuil national. Certes, il en avait déjà décrété deux, quand Giscard et Chirac avaient rendu l’âme : petits deuils de courtoisie. Mais là, c’est pour de vrai, comme Hollande après le Bataclan, comme Doumergue en 1930 à cause des inondations, comme Pétain en 1942 à cause des bombardements alliés. Après les hommages nationaux à répétition, après les panthéonisations à outrance, voilà le deuil, imposé à tous, par Macron, président de rien mais maître de notre tristesse ; il n’avait pas besoin de Mayotte pour la susciter.

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