France
Vous dites déni de démocratie ?
L’illégitimité des prétentions du Nouveau Front populaire à diriger le gouvernement.
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Pour dépeindre les mœurs politiques hexagonales, il faudrait un nouveau Montesquieu. Sans doute le héros de contemporaines Lettres persanes écarquillerait-il les yeux devant le spectacle offert par les hommes à qui les Français ont confié leur destin. à commencer par un président de la République conspué à La Courneuve, accumulant les mauvais sondages, mais affichant en toutes circonstances l’air satisfait de celui qui se voit déjà réélu en 2017.
Une obsession qu’un certain discours médiatique, après avoir cédé à un « Hollande bashing » facile et vendeur, alimente depuis quelques semaines en laissant entendre qu’il pourrait y avoir du génie politique chez le sociétaire de l’élysée.
N’a-t-il pas prévu que la croissance reprendrait juste avant la présidentielle de 2017 ? Ne fait-il pas tout ce qu’il peut pour favoriser le succès du FN aux régionales, obligeant ainsi la droite à se déchirer et la gauche à se rassembler derrière lui ? Ne prépare-t-il pas l’avenir de la planète en organisant, à Paris, la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques, la Cop 21 ?
Fort de cette image forgée par ses communicants, persuadé que nul, dans son camp, n’osera le défier, François Hollande dévoile donc peu à peu sa stratégie de campagne pour la prochaine présidentielle, avec le culot d’un joueur de poker.
Partout la colère gronde, mais lui se présente comme le garant raisonnable d’une « société apaisée », qui se transforme en douceur, en particulier grâce au dialogue social dont il veut faire l’un des symboles de son quinquennat. Pendant ce temps, ceux qui regardent la réalité en face – ils sont encore quelques-uns à gauche –, craignent la « coagulation des mécontents », ce scénario catastrophe redouté par tous les gouvernements. Et se demandent bien de quel « dialogue social » le chef de l’état peut se targuer.
Début septembre, ce sont les agriculteurs qui exprimaient à Paris l’exaspération d’une profession rendue exsangue par les réglementations en tous genres et la baisse constante de ses revenus. En France, un agriculteur se suicide tous les deux jours.
Le 14 octobre ce sont les forces de l’ordre, une première depuis 1983, qui s’insurgeaient contre la politique pénale du gouvernement et le laxisme de Christiane Taubira. La blessure d’un policier touché par balle à Saint-Ouen, en Seine-Saint-Denis, du fait d’un braqueur radicalisé en permission de sortie de prison, a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase : 22 policiers sont agressés physiquement chaque jour en France…
Le 15 octobre, c’est la disposition de la loi de finances contraignant les avocats à contribuer au financement de l’aide juridictionnelle qui met le feu aux poudres et provoque la colère de la profession.
Médecins (vent debout contre le projet de loi santé), enseignants (toujours furieux contre la réforme du collège), buralistes (la profession – 126 000 personnes – menace de descendre dans la rue pour protester contre les nouvelles réglementations), retraités (qui réclament l’alignement des systèmes de retraites), commerçants et artisans (écrasés par les taxes)…
L’inventaire des colères sociales est long comme le bras et le ressentiment général. François Hollande entend-il cette colère qui n’épargne aucun secteur ? Que nenni. Rien de tout cela ne semble l’inquiéter. Pas même que ses plus proches soutiens, comme le ministre de la Défense, préfèrent quitter le navire avant qu’il ne se change en galère.
Apprécié des militaires – il a arrêté une fronde des gradés en sauvant ce qu’il pouvait du budget de la Défense –, compensant comme il le peut le naufrage diplomatique de Laurent Fabius (on le lira dans notre dossier), Jean-Yves Le Drian préfère prendre la tête de la liste socialiste aux élections régionales en Bretagne – une région qui vote à gauche – plutôt que de rester au gouvernement. Comme, avant lui, François Rebsamen, redevenu maire de Dijon. On imagine avec un certain soulagement.
Hollande, champion, dans un passé récent, des synthèses molles et des motions désincarnées, devenu subitement un tacticien hors pair ? Hollande génie politique, Mazarin des temps modernes ? Mais à qui veut-on faire prendre des vessies pour des lanternes ?